Le 28 juillet, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a menacé Israël d’une intervention militaire en rappelant le soutien qu’avait apporté la Turquie au gouvernement d’union national libyen et à l’Azerbaïdjan en mobilisant des mercenaires recrutés parmi les groupes armés syriens alignés sur les positions d’Ankara.
Ce mode opératoire avait été fermement dénoncé par le président Macron, en octobre 2020. Alors qu’il était avéré que la Turquie avait envoyé des mercenaires syriens pour appuyer l’offensive que venait de lancer l’Azerbaïdjan pour reprendre le contrôle du Haut-Karabakh, il avait invité « l’ensemble des partenaires de l’Otan à regarder simplement en face ce qu’est un comportement de membre de l’Otan ».
Après les propos tenus par M. Erdogan, Israël est sur la même ligne. « À la lumière des menaces du président turc […] d’envahir Israël et de sa rhétorique dangereuse, le ministre des Affaires étrangères Israël Katz a demandé aux diplomates […] de s’engager d’urgence auprès de tous les membres de l’Otan, appelant à la condamnation de la Turquie et exigeant son expulsion de l’alliance régionale », a en effet indiqué la diplomatie israélienne, via un communiqué.
Ce n’est pas la première fois que la place de la Turquie au sein de l’Otan est ainsi remise en question. Après les purges lancées par le gouvernement turc dans la foulée du coup d’État manqué de juillet 2016, le chef de la diplomatie américaine, qui était alors John Kerry, avait adressé une mise en garde à M. Erdogan.
« L’Otan a également des exigences en termes de démocratie. Beaucoup de gens ont été arrêtés, et arrêtés très rapidement. Le niveau de vigilance et d’observation va évidemment être élevé dans les jours à venir. J’espère que nous pourrons travailler de manière constructive et éviter un retour en arrière », avait ainsi déclaré M. Kerry, à l’issue d’un sommet du Conseil de l’Europe.
Le porte-parole du département d’État avait ensuite rappelé que les « responsabilités démocratiques » allaient « de pair avec l’adhésion » à des institutions internationales comme l’Union européenne [UE] et l’Otan. Mais, la Turquie occupant une position stratégique permettant de s’assurer du contrôle des accès à la mer Noire, les choses en restèrent là.
Pour autant, Ankara continua de s’attirer les griefs de certains membres de l’Otan. Sa décision d’acheter des systèmes de défense aérienne S-400 Triumph auprès de la Russie lui valut d’être exclue du programme de chasseurs-bombardiers F-35A par l’administration Trump. Puis, ses opérations militaires contre les Forces démocratiques syriennes [FDS, à majorité kurde] alors que celles-ci étaient en première ligne contre l’État islamique [EI ou Daesh] renforcèrent les critiques à son égard. De même que ses revendications territoriales en Méditerranée orientale, assorties d’intimidations à l’égard de la Grèce et de la République de Chypre.
En 2020, l’ex-président Hollande estima que les « comportements agressifs » de la Turquie posaient la question de sa « présence dans l’Alliance atlantique ». D’autant plus que, quelques semaines plus tôt, un navire turc avait illuminé la frégate de type La Fayette « Courbet » avec son radar de conduite de tir… L’ancien locataire de l’Élysée n’était alors pas le seul à s’interroger. Avant lui, des élus du Congrès américain, comme le représentant démocrate Eric Swalwell, avaient en effet affirmé que l’exclusion de la Turquie de l’Otan devait « être mise sur la table ».
Seulement, les uns et les autres peuvent toujours remettre en question l’adhésion de la Turquie au Traité de l’Atlantique Nord… Cela ne changera rien car l’Otan, contrairement à d’autres organisations internationales, ne possède pas de mécanisme pour exclure l’un de ses membres.
En effet, le traité n’évoque le départ de l’un des États membres que dans son article 13.
« Après que le Traité aura été en vigueur pendant vingt ans, toute partie pourra mettre fin au Traité en ce qui la concerne un an après avoir avisé de sa dénonciation le gouvernement des Etats-Unis d’Amérique, qui informera les gouvernements des autres parties du dépôt de chaque instrument de dénonciation », indique le texte.
Par ailleurs, même si un telle procédure d’exclusion existait, probablement que le règle de l’unanimité s’imposerait. Or, la Turquie ne manque pas de « partenaires » proches parmi les membres de l’Otan, à commencer par l’Espagne et le Royaume-Uni.