Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

dimanche 16 avril 2023

Que faisait l’épouse du chef de l’espionnage russe à Paris le week-end dernier ?

 

Moscou a-t-il un œil à Paris ? Comme le rapporte Le Parisien, Tatyana Narychkina a été aperçue dans une voiture diplomatique dans la capitale le lundi 10 avril. Elle est l'épouse de Serguei Narychkine, le patron du renseignement extérieur russe (SVR), héritier du KGB qui n'était pas avec elle. D'après des sources russes, Mme Narychkina aurait passé quelques jours sur la Côte d'Azur, avant de se rendre à Paris. Sa présence interroge.

« Admettons que Tatyana Narychkina vienne faire son shopping… Le fait qu'elle circule dans une voiture diplomatique soulève de nombreuses questions », souligne Cécile Vaissié, professeure à l'université Rennes-II et autrice du livre Les Réseaux du Kremlin en France. « L'épouse du chef des services russes de renseignement extérieur est-elle là pour voir des gens ? Pour régler des affaires ? Serait-ce une forme de voyage quasi officiel ? » « Le système européen de sanctions peut paraître solide, mais la présence de l'épouse d'un dirigeant de si haut niveau montre qu'il y a plein de trous dans le dispositif », affirme Cécile Vaissié

Un proche de Vladimir Poutine

Serguei Narychkine est interdit de territoire européen depuis l'annexion de la Crimée en 2014. Une interdiction qui ne semble pas l'atteindre. Ainsi, peu après l'annexion de la Crimée à Paris, sous couvert d'une visite au Conseil de l'Europe, il en avait profité pour rencontrer une délégation de chefs d'entreprise comme Dassault, Total, GDF-Suez et des députés, amis fidèles du pouvoir russe, rapportait à l'époque le journal Le Monde.

Serguei Narychkine est un ancien agent de la même génération que Vladimir Poutine. Il a gravi chaque échelon du pouvoir au côté du chef d'État. Il a été chef de l'administration présidentielle, puis député et président de la Douma, et enfin espion en chef. Le 21 février 2021, trois jours avant le début de la guerre en Ukraine, il avait été humilié publiquement par Poutine, à la tribune d'un conseil de sécurité retransmis en direct à la télévision. « Oui… oui… Je soutiendrai… » cafouillait le patron du renseignement sur la situation en Ukraine. « Parlez sans détour », lui avait lancé Vladimir Poutine, le pressant de questions, jusqu'à ce que Narychkine finisse par difficilement déclarer : « Je soutiens la proposition quant à la reconnaissance de l'indépendance des Républiques de Donetsk et de Louhansk. » Poutine avait alors conclu, s'adressant tel un enseignant à son élève : « Merci, vous pouvez vous rasseoir. »

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