Le ministère de la Justice américain a ouvert une enquête sur l’origine des fuites de documents du Pentagone concernant l’Ukraine et d’autres pays, a annoncé dimanche une porte-parole du Pentagone. Les documents – environ 100 pages photographiées – indiquent que les services de renseignement américains ont pénétré l’armée russe et ont apparemment espionné des alliés tels qu’Israël, la Corée du Sud et l’Ukraine. Ils datent de quelques mois ou semaines seulement et circulent sur diverses plateformes, dont Discord, Telegram et Twitter.
Dans une analyse portant sur ces fuites, le journaliste du New York Times David Sanger note qu’elles ne se comparent pas en importance aux quelque 250 000 documents diplomatiques américains communiqués par WikiLeaks il y a 13 ans ou aux révélations d’Edward Snowden sur le programme de surveillance de la NSA trois ans plus tard. Sanger cite néanmoins une source du renseignement occidental qui les qualifie de « cauchemar ». Un expert affirme que les fuites pourraient notamment permettre aux Russes de comprendre comment les Américains parviennent à connaître les plans de leur service de renseignement militaire et les mouvements de leurs unités militaires.
En attendant, des documents ayant fait l’objet d’une fuite laissaient entendre le 28 février dernier que la défense aérienne ukrainienne pourrait être en péril à cause de l’épuisement de ses stocks de missiles. Au rythme où ces missiles étaient utilisés à l’époque, ils devaient être épuisés à la mi-avril ou au début de mai, note le New York Times dans un autre article dont on trouve ici une version en français.
Et le journal d’ajouter : « L’administration Biden a annoncé la semaine dernière qu’elle enverrait des intercepteurs de défense aérienne et des munitions supplémentaires dans le cadre d’un programme d’aide de 2,6 milliards de dollars, dont une partie sera utilisée pour aider Kyiv à se préparer une offensive de printemps prévue contre les troupes russes. »
Les documents contiennent de mauvaises nouvelles pour certains alliés américains, qui apprennent ou obtiennent la confirmation de l’espionnage dont ils font l’objet, gracieuseté des États-Unis. Étant membre de l’alliance « Five Eyes », le Canada n’est pas du nombre, mais il trouve aussi de mauvaises nouvelles dans les documents du Pentagone : un groupe de pirates informatiques, sous la direction du Service fédéral de sécurité russe, pourrait avoir compromis l’adresse IP d’une société canadienne de gazoducs en février.
« Jusqu’à présent, rien n’indique que des acteurs russes aient lancé une attaque destructrice », affirme David Sanger dans son analyse.
Qui est derrière ces fuites ? Contrairement à Edward Snowden ou Chelsea Manning, le responsable pourrait ne pas être guidé par des considérations idéologiques. Mais l’enquête du ministère de la Justice nous réserve peut-être des surprises.