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vendredi 24 mars 2023

Selon le «Financial Times»; UBS et Credit Suisse ont fusionné sous pression américaine

 

Dans la crise qui balaie Credit Suisse, le «Financial Times» britannique était toujours bien informé de ce qui se disait derrière les portes closes. Souvent, le journal économique était le premier à savoir ce qui devenait public par la suite.

Rien d'étonnant, donc, à ce qu'une enquête du même média fasse parler d'elle dans le monde politique suisse: selon cette dernière, la fusion de Credit Suisse et de l'UBS était déjà scellée bien avant le dimanche où la reprise a été communiquée.

Le président de Credit Suisse Axel Lehmann aurait été cité dès mercredi dernier par la ministre des Finances Karin Keller-Sutter, la Banque nationale suisse (BNS) dirigée par Thomas Jordan et l'autorité de surveillance des marchés financiers (Finma). A cette occasion, il aurait reçu un message clair: «Vous allez fusionner avec l'UBS. Ce n'est pas une option», peut-on lire dans le «Financial Times».

«Séisme politique majeur»

Cette déclaration a une force politique explosive, car la BNS et la Finma ont fait savoir mercredi soir que les problèmes aux Etats-Unis «ne présentaient pas de risque de contagion directe pour le marché financier suisse» et que Credit Suisse remplissait toutes les exigences financières nécessaires. Le public a-t-il donc été mené en bateau?

Les politiciens suisses sont en tout cas indignés. Le président des Verts libéraux, Jürg Grossen, a déclaré à la SRF: «Si ce qui est écrit est vrai, cela pourrait être un séisme politique majeur.»

Selon lui, la bourse a réagi positivement à cette annonce. «Cette communication a eu une grande influence sur l'évolution du marché. Droit d'urgence ou pas, on peut questionner le droit de tromper ainsi le marché et la population» ajoute-t-il.

Il demande qu'une commission d'enquête parlementaire (CEP) fasse la lumière sur cette question. «Nous ne voulons pas faire de nouvelles suppositions, mais savoir concrètement qui savait quoi et à quel moment», déclare la coprésidente du PS Mattea Meyer. «Et qui a exercé quelle influence sur la Suisse!»

Quel était le rôle exact des États-Unis?

Karin Keller-Sutter aurait été soumise à une forte pression internationale. Un conseiller de l'UBS a ainsi raconté au «Financial Times» que ce sont surtout les Etats-Unis et la France qui auraient «fait vivre un enfer à la Suisse». La ministre américaine des Finances, Janet Yellen, a eu notamment plusieurs entretiens avec Karin Keller-Sutter ce week-end.

Les Etats-Unis auraient-ils mis le pistolet sur la tempe de la Suisse et décrété un mariage forcé entre Credit Suisse et UBS? «Je crains qu'il y ait eu cette pression, même si je ne peux pas le prouver», répond le conseiller national UDC Lars Guggisberg. Si cela s'avérait véridique, «ce serait scandaleux».

«Nous ne sommes plus les seuls à décider»

Son collègue de parti au conseil national Roland Rino Büchel ne comprend d'ailleurs pas que la Suisse ait cédé à la pression de l'étranger: «Nous sommes tellement liés et imbriqués que nous pensons ne plus pouvoir décider seuls.»

«Le fait que l'on ait parlé anglais lors de la conférence de presse de dimanche montre de manière exemplaire que l'affaire n'est plus considérée comme suisse», déclare le conseiller UDC.

Il est donc favorable à ce que le travail de la Finma soit examiné à la loupe. Il est cependant plus critique à l'égard de l'établissement d'une CEP: «Je peux comprendre les demandes d'une CEP plus poussée, mais je crains qu'elle ne soit incitée.» En d'autres termes: que les parlementaires ne puissent pas faire la lumière sur cette affaire.

Sophie Reinhardt

blick.ch