Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 7 mars 2023

Algérie, de nouvelles purges au sein du renseignement militaire

 

Moins de six mois après sa nomination à la tête de la Direction centrale de la sécurité de l’armée (DCSA), le bras armé des services au sein de l’institution militaire, le général Abdelaziz Nouiouet Chouiter est limogé. Ce gradé avait été désigné à la tête de ce service le 11 septembre 2022. Son mandat aura été de courte durée, alors que la DCSA, le plus puissant désormais des services secrets algériens, aurait besoin d’un minimum destabilité.

Tout aussi significatif du « turn over » qui existe désormais au plus haut niveau de l’institution militaire, le général Chouiter avait remplacé le général Sid Ali Ouled Zmirli. Lequel était un fidèle du général Chengriha, le patron de l’armée. Malgré cette haute protection, le général Zmirli n’aura duré que dix huit mois dans ses fonctions.. La faute en revient à son frère, Omar Ouled Zmirli, officier de la DCSA lui aussi et « parrain à Paris du fils du général Chengriha, qui avait été interpellé par la justice militaire dans une affaire de divulgation des secrets d’Etat et complot contre le commandement de l’armée.

Les raisons de l’éviction 

L’obsession du chef d’état-major de l’armée est de tenir d’une main de fer toutes les structures de l’institution militaire. Aucun écart n’est toléré surtout à l’endroit de sa personne. Selon nos sources, le désormais ex patron de la DCSA avait commis une faute grave en consultant le dossier du son chef d’état-major. Si l’affaire est restée entre les quatre murs de son bureau, il serait encore à son poste. Mais, le fait qu’il a révélé à certains de ses proches collaborateurs quelques extraits contenus dans le dossier confirmant en partie les révélations de l’adjudant-chef Guermit Bounouira, ainsi il signe la fin de ses fonctions.

La question qui s’impose : a-t-il consulté ce dossier pour sa propre curiosité où a-t-il agi au nom d’un clan ? La question mérite d’être posée étant donné le contexte paranoïaque imposé par le chef d’état-major dont l’estime et le respect est loin de trouver une unanimité au sein de l’armée.

Il est convoqué au siège de l’État major, le 03 mars où on lui annonce son éviction, Il est arrêté et transféré au siège du SCORAT (service de coordination opérationnelle et du renseignement antiterroriste) dépendant de la DCSA et qui se situe à Douira dans la banlieue d’Alger. Le 05 mars, il est transféré à la Caserne ANTAR qui pourtant dépend de la DGSI.

De l’opérationnel au renseignement

Le natif de l’Oued Zenati, dans la région de Guelma, a commencé sa carrière militaire au sein des parachutes. On le décrit comme officier discipliné et professionnel gravitant les échelons au sein des unités opérationnelles des corps des Paras. Il s’est affirmé durant la décennie rouge des années 90 comme officier très performant.

De 1995 à 1999, étant officier des Paras, il a coordonné des opérations avec le DRS dirigé par le général Mohamed Mediene alias Toufik dans le cadre de la lutte antiterroriste. Comme il a collaboré avec le CCLAS (commandement de coordination de la lutte contre les activités subversives) dirigé par le chef d’état-major Mohamed LAMARI.  

De 2005 à 2013, il est l’un des adjoints du directeur de la DCSA dirigé par le général Djebbar Mhenna, actuel patron de la DGDSE (direction générale de la documentation et de la sécurité extérieure).

De 2015 à 2018, il est nommé par le patron du DRS à l’institut supérieur des techniques du renseignement de Beni Messous à Alger.

En 2018, il est mis en retraite dans le sillage des purges orchestrées par le général de corps d’armée et vice-ministre de la défense Gaid Salah lors du démantèlement du DRS.  

Des purges à répétition également dans les services extérieurs

Le renseignement militaire n’est pas le seul à connaitre des mises à l’écart à répétition de ses dirigeants. En trois ans seulement, la DGDSE, l’équivalent de la DGSE française (services extérieurs ) a vu se succéder cinq directeurs. Un recors absolu! Les voici:

Nommé par Gaïd Salah dont il était une éminence grise en 2019 sans que son nom apparaisse, le général Kameleddine Remili, longtemps en fonction aux États Unis, cède sa place au général Mohamed Bouzit, alias « Youssef » en avril 2020.

Neuf mois de fonctions seulement avant que le général « Youssef » ne soit  emprisonné.

Le 21 janvier 2021, le général Youssef est donc remplacé par le général Nordine Mokri, alias Mahfoudh « Polisario », un dossier dont il a été chargé pendant une quinzaine d’années. Quinze mois à ce poste, et lui aussi est congédié.

Le 14 Mai 2022, le général Mokri, alias « Polisario », est remplacé par le général Kehal Madjdoub, pur produit du DRS, qui est réhabilité Il avait écopé de trois ans de prison dans l’affaire e 2015 des coups de feu à la résidence présidentielle de Zéralda où il était chargé de la protection de Bouteflika.

En juillet 2022, le général Kemal Madjdoub  est nommé à la tète de la DGSI (services intérieurs) à la place du général Rachedi, ancien attaché militaire aux Émirats et très proche du demi frère de MBZ, l’Émir des EAU. Lequel Rachedi, du coup,  a été recasé à la tète des services extérieurs à la place … du général Kehal Madjhoub. Une sorte de permutation dont on ne connait pas la signification. Depuis, le général Rachedi, accusé de « fuites » vers les réseaux sociaux et détesté par ses collaborateurs, a été victime d’un AVC et a été transporté d’urgence à Paris.  Les services extérieurs, un des fleurons de l’État algérien depuis toujours, navique désormais à vue après avoir épuisé cinq patrons successifs. 

mondafrique.com