Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 14 février 2023

Les services de renseignements de l’état islamique: des origines de l’organisation à la menace terroriste actuelle

 

La proclamation d’un nouveau Calife, le 30 novembre dernier, à la tête de l’état islamique nous offre l’occasion de revenir sur un des outils de puissance, véritable pilier sous le Califat : la constitution de services de renseignements à la structure comparable aux services d'États occidentaux.

Définir le terrorisme n’est pas chose aisée, puisque absente du code pénal. Le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, précise - pour tenter de combler ce vide juridique - notamment que le terrorisme frappe « sans discernement des civils [et que] la violence [qu’il déploie] vise d’abord à tirer parti des effets que son irruption brutale produit sur les opinions publiques pour contraindre les gouvernements ». Le terme a pour origine épistémologique la “terreur”. Ainsi, les fidèles qui choisissent la voie du jihadisme ont avant tout un objectif clair : semer la terreur et déstabiliser le gouvernement et la population ciblés, dans le but d’instaurer un état islamique (Dawla Islamiya). L'État islamique, avec Al Qaïda (AQ), représentent les deux principales organisations terroristes islamistes sunnites jihadistes dans le monde, chacune ayant des filières réparties sur plusieurs continents. Il faut toutefois noter que si le jihad renvoie à la notion de “lutte”, il en résulte de ces définitions, qu’al-Qaïda et Daech (acronyme de “Dowlat al-Islamiyah f'al-Iraq wa Belaad al-sham”) constituent deux organisations islamiques et djihadistes, considérées conjoncturellement comme terroristes par certains acteurs nationaux et internationaux, et ayant adhéré aux thèses du salafisme. 

S’il y a bien une filiation originelle entre les deux organisations, leurs stratégies demeurent différentes. Une différence parmi tant d’autres repose dans le fait que, contrairement à l’État islamique, Al-Qaïda ne contrôle aucun territoire a proprement parlé, mais se compose de plusieurs branches régionales très autonomes. A contrario, Daech mise sur la consolidation d’un Califat local en Irak et en Syrie pour servir de base à la conquête du monde, et le rassemblement de la Ouma (communauté musulmane dans le monde). AQ quant à elle, opère des attaques ciblées spécifiquement contre l’Occident, alors que l’EI mène aussi des actions contre les minorités et les populations, y compris en zone SYRAK (Syrie, Irak). 

Si l’on s’accorde à dire que le Califat a pris fin en 2019, la menace terroriste demeure. Si le nom de Ben Laden a fait couler beaucoup d’encre, celui d’Abdullah Azzam semble parfois oublié des travaux de recherche. Il n’en résulte pas moins qu’il est considéré comme étant le père du jihad, mort dans un attentat à la bombe en 1989, et dont les successeurs continuent d'œuvrer en sa mémoire, afin de faire perdurer et de réaliser cet objectif. Il a notamment été précisé par la suite, par Abou Mohamed Al Suri, théoricien du jihad dès 2004 :« sans confrontation sur le terrain, et sans prendre le contrôle des zones, nous ne pouvons pas établir un État, ce qui reste l’objectif stratégique ». Ce dernier a aussi rédigé un manifeste du cyberdjihadisme, preuve ici-encore, d’une conscience des enjeux intrinsèques à nos sociétés modernes, et qui n’est pas nouvelle. L’EI se trouve sur plusieurs parties du globe, avec plusieurs filiales lui ayant prêté allégeance, principalement présents au Sahel et en Afghanistan. L’EIGS (État islamique du Grand Sahara), par exemple, est né suite au départ d’Abou Walid et de ses partisans, un groupe qui se veut dissident d'Al-Qaïda. L’EIGS a été absorbé par la suite, début 2019, par la wilaya de l’Afrique de l’Ouest, formée à l’origine par Boko Haram - qui sévit toujours de nos jours. 

Il faut toutefois admettre une nuance, quant à la qualification des terroristes avec d’une part les « partisans », et d’une autre les « soldats du califat », qui est fondamentale. En effet, quand les « soldats du califat » sont évoqués, cela signifie que l’EI est à l’origine de l’opération conduite. Dans l’autre cas, il s’agit de sympathisants qui ont lancé une opération sans lien direct avec l’organisation, que l’on a coutume de qualifier de « loups solitaires ». Gilles Kepel, sociologue, déclare alors à ce propos, qu’il s’agirait plutôt d’un “jihadisme d’atmosphère”, dans lequel les individus auraient tendance à opérer seuls leurs crimes, tout en appartenant à un écosystème tant doctrinal que relationnel. Cet élément précis est primordial afin de comprendre les nébuleuses terroristes. 

Naissance et origines de l’Amniyat 

Comme détaillé dans le livre de Matthieu Suc, “Les espions de la terreur”, l’idée de l’armature de l’Amniyat provient d’Ali Mohamed, ancien officier des renseignements égyptiens. Il se rapproche de Al Zawahiri, qui lui demande d’infiltrer les services de renseignements américains. Après cette tentative qui a échoué, il épouse une citoyenne américaine et s’engage dans l’armée. Il s’occupera notamment, au fil des années, de briefings de soldats quant à l’islam radical, tout en ayant accés aux documents confidentiels de l’armée américaine, qui ne s’est pas méfiée de lui à l’origine. Il leur a même annoncé combattre “les rouges” en Afghanistan à plusieurs reprises. En réalité, durant ces voyages, il apprend aux soldats - de ce qui n’était pas tout à fait encore AQ - le savoir qu’on lui a transmis, comme par exemple le fait de ne pas se faire infiltrer par des espions occidentaux. En gravissant les échelons, il retient tout ce qu’il a appris là bas afin de l’appliquer pour leur cause.  

Si il a finalement été interdit de sol américain puis arrêté par le FBI, il n’en demeure pas moins qu’il a initié les combattants à la mentalité occidentale, qu’il les a formés, rappelant alors la célèbre phrase « sois proche de tes amis, et encore plus proche de tes ennemis ».  Ces derniers ont donc ensuite transmis et transposé ces savoirs jusqu’au cœur de l’EI, à Raqqa. Sur internet, plus tard, des modes opératoires sont détaillés, avec des termes bien précis, qui proviendraient même du KGB ou de la CIA. Ceci démontre qu’ils ont puisé leur organisation et leur stratégie auprès des services occidentaux, ont transmis ces savoirs - parfois même d’une prison à l’autre - et sont en réalité, bien loin de l’image d’individus irréfléchis que l’on peut parfois avoir d’eux. 

L’Amnyat (dérivé du terme “sécurité” en arabe) a été détecté dès 2014, et démontre, déjà à l’époque, une importante organisation ainsi qu’une voie hiérarchique bien en place. En atteste l’exemple du parcours d’Abdelhamid Abaaoud qui avait déjà opéré plusieurs séjours en détention dès 2002, s’est radicalisé en prison, pour être nommé émir d’une katiba après avoir enregistré une célèbre vidéo dans laquelle il déclarait lutter contre « les murtards (apostats), les kuffars (mécréants), ceux qui nous combattent, ceux qui combattent l’islam ». Il a ensuite gravi les échelons,  rejoignant l’Amniyat. 

Une organisation structurée 

L’Amnyat est adroitement structuré, adepte de méthodes précises, y compris en matière de contre-espionnage. Bien que cela puisse paraître paradoxal, plusieurs témoins ont rapporté qu’ils s’adonnent énormément à la torture. Les travaux de Matthieu Suc en la matière démontrent l’exemple de Maxime Auchard, jihadiste français, qui aurait été torturé à son arrivée au sein de l’EI pendant que d’autres combattants vérifiaient chaque aspect de sa vie privée en France. Ils ont d’ailleurs utilisé des contacts sur le territoire français afin de vérifier les dires de ce dernier. Cet exemple, loin d’être unique, démontre qu’ils ont réussi à s’organiser et à se structurer, à placer des capteurs humains dans plusieurs pays, malgré la distance géographique qui peut paraître a priori, comme étant un obstacle au fonctionnement de l’organisation. 

On peut aussi observer que l’organisation s’est développée dans d’autres domaines, y compris sur l’éducation, dont l’embrigadement de jeunes enfants repose sur une véritable stratégie, traduite par la création à cet effet, d’un ministère dès 2014. En outre, des chercheurs québécois ont identifié des manuels scolaires conçus pour les écoliers au sein de l’EI, dans lesquels on peut constater que l’organisation inculquait aux enfants son idéologie rigoriste et violente. A titre d’exemple, dans les livres de mathématiques, on additionnait des mitraillettes et des grenades. En sciences, chaque chapitre s’ouvre sur une sourate du Coran, ce qui leur permet d’accentuer la religiosité de l’enseignement et de relier l’apprentissage du Coran, avec un type de contenu choisi, en fonction de l’interprétation qu’ils en font. Dans les livres de contes, on défigurait les personnages, toute représentation humaine étant interdite. Olivier Arvisais souligne à ce sujet que tous les visages d’humains et d’animaux sont brouillés, conformément à une vision rigoriste de l’islam.

La question de la fourniture du matériel, ainsi que de son utilisation relève aussi de l’organisation. A cet effet, de véritables camps d’entraînements ont été mis en place. Pour effectuer leurs entraînements, au sein des territoires de l’EI, sont installés de véritables camps allant même jusqu’à la création de forces spéciales, appelées les Qwat khas. Tant dans la recherche de renseignement que dans la préparation d’attentats, les services de renseignements créés sont divisés en plusieurs grands départements avec notamment l’Amn al-Askari (renseignement militaire), l’Amn al- Dawla (service de contre-espionnage) et l’Amn al-Kharji (service chargé des opérations extérieures). Ici aussi, apparaît une inspiration occidentale dans la structure même des services, qui correspond plus ou moins à celle des services occidentaux. En outre, un manuel, qui aurait été écrit par un membre de l’Amniyat et portant le titre “How to survive in the West” décrivait alors les manières à adopter pour tout combattant se trouvant en Occident, à savoir comment déjouer une filature ou encore les pratiques à mettre en place au quotidien, etc. C’est d’ailleurs après la lecture de ce manuel, en 2015, qu’un adolescent de dix sept ans a eu l’idée de frapper au fort de Béar et de décapiter un militaire. S’il a été arrêté, avant d’avoir pu passer à l’acte, la diffusion de ces manuels démontre une volonté d'embrigadement et une capacité de communication développée. 

Plusieurs manuels ont suivi, comme celui portant sur d’autres sujets comme la survie en garde à vue, ou encore sur les techniques d’interrogatoire.

Les services prennent d’ailleurs en charge la sécurité des hauts dignitaires de l’organisation, en allant jusqu’à régulièrement les faire changer de kounya (nom de combattant)  dans l'objectif de les faire passer pour morts, ou de rendre plus difficile le suivi opéré par d’autres services étrangers. Cette structuration et ce savoir-faire organisationnel permettent à l’EI de tenir malgré leur perte de territoire, certes conséquente. Ce n’est d’ailleurs qu’après les attentats de Bruxelles que les autorités ont pu récupérer l’ordinateur du commando, précieuse source d’informations sur le fonctionnement du groupe. Ils ont alors appris que ceux qui planifient les attentats passaient, par exemple, par des  boîtes aux lettres mortes avec clés à  codes, se laissaient des messages sans avoir de discussion directe entre eux. 

Matthieu Suc a notamment étudié le processus de choix des projets portés par l’organisation dans ses enquêtes, mettant en avant que le gouvernement de l’état islamique, équivalent d’un conseil des ministres - est consulté par le chef de celui qui est en charge des Opex (Opérations extérieures), avec le calife en place - ils regardent si selon leur interprétation le projet présenté est conforme à leur idéologie et à leurs objectifs. Suite à cela, le chef des Opex travaille le projet, très probablement avec d’autres cellules avant son lancement. 

En outre, le contrôle de la propagande et des communications est un pilier central dans la surveillance du territoire. Chaque lieu relié à internet dans le califat était sous l’égide de l’organisation, qui surveillait même les conversations des combattants avec leur propre famille. À ce titre, la police islamique, avant la chute du califat, dépendait directement de l’Amniyat.

Les femmes au sein de l’EI : une place trop souvent sous estimée 

L’exemple de l’américaine Allison Fluke-Ekren est à ce titre évoquant. Entre 2012 et 2019, Allison Fluke-Ekren a soutenu des organisations jihadistes en Libye, en Irak et en Syrie, où elle a fourni un entraînement militaire à plus d’une centaine de femmes. En juin 2022, lors de son procès, elle a notamment reconnu avoir appris à ses consoeurs, dont certaines n'avaient qu’une dizaine d’années, à manier des fusils d'assaut ou des ceintures d'explosifs. Elle a effectué de nombreux voyages en Syrie et a reconnu avoir planifié et recruté des combattants dans le but de commettre une attaque aux Etats-Unis. Allison Fluke-Ekren, prenant la kounya de Oum Mohammed al-Amiriki,  a surtout dirigé un bataillon de l’EI dont le principal objectif était d'entraîner des jeunes filles, et femmes, au combat, plus connu sous le nom de “Katiba Nussaïba”. Cette Katiba a été créée en 2016 et est composée exclusivement de personnes féminines, mariées elles-mêmes à des combattants de l’EI. 

Un second exemple, tout aussi parlant, est celui de la jihadiste française Emilie Koning  qui a été mise en garde à vue dès son arrivée sur le territoire français et est soupçonnée, parmi plusieurs autres griefs, de n’avoir recruté pas moins de 200 combattants de l’EI. L’amniyat contrôlait, à ce sujet, la hisba, police - constituée de femmes - des mœurs féminines au sein du territoire. Elle veillait par exemple, au strict respect de règles établies, concernant les vêtements ou encore à la séparation des indidivus de sexe masculin et féminin dans les espaces publics. 

La France face à la menace terroriste actuelle : entre contraintes et enjeux 

Si le terrorisme est un sujet difficile à questionner au vu du peu de sources accessibles, certains enjeux cruciaux sont néanmoins à appréhender au vu d’une actualité toujours brûlante. L’exemple même de leur présence, détectée par des analystes américains sur des plateformes NFT démontre une réelle volonté de s’adapter à la nouvelle ère technologique, et de continuer leur combat, malgré un territoire et des moyens largement plus restreints qu’avant. De même que l’arrestation, le 8 janvier dernier, d’un iranien soupçonné de confectionner des armes biologiques à des fins terroristes rappelle le changement de stratégie, et la tentative de modernisation des moyens, certes moindres en la matière, qu’utilisent les terroristes dans la réalisation de leurs objectifs. 

Des risques majeurs demeurent présents en France, dont une potentielle projection d’attentats peut être envisagée, qui pourrait notamment survenir lors d’évènements sportifs comme les Jeux Olympiques à venir, à Paris en 2024. A titre d’exemple, la branche yéménite d’AQ dans la péninsule arabique (AQPA) a appelé au boycott de la coupe du monde de football ayant lieu au Qatar. Le groupe terroriste a alors accusé les pays du golfe de “travailler à la solde des croisés” et a déclaré que cet événement faisait partie de la “stratégie d’invasion de l'ennemi”.  

Les sortants de prison représentent aussi un risque conséquent et nécessitent un suivi, et non des moindres, qui est opéré par les autorités compétentes. En outre, leur nombre accroît durant ces dernières années avec plus de 300 individus condamnés pour terrorisme qui ont été libérés, dont environ 70 en 2022. A ce sujet, l’UCLAT (Unité de Coordination de la Lutte Anti-Terroriste), qui dépend du ministère de l'Intérieur, travaille sur ce suivi inhérent aux risques que composent les sortants de prison. Un des responsables avait alors précisé son fonctionnement : “c'est un dispositif qui permet de rassembler tous les mois l'ensemble non seulement des services antiterroristes, renseignement et judiciaire, mais également tous les partenaires qui vont mener une action d'entrave, y compris administrative”. 

Si la pratique de taqiya n’est pas nouvelle, comme le rappelle le juge Marc Trévidic, “la dissimulation est une technique vieille comme le monde", elle peut tout de même permettre à certains de passer outre la vigilance des services. Cette attitude de dissimulation opérée par certains musulmans radicaux, ayant pour objectif de dissimuler leurs croyances afin de ne pas attirer l’attention, s’ajoute aussi au panel des difficultés rencontrées par les services compétents en la matière. 

De plus, les conflits d’aujourd’hui sont polymorphes et comprennent différents protagonistes et belligérants, rendant les rapports de force d’autant plus forts, d’autant plus longs. Dans un tel contexte, la lutte de certains États contre des organisations protéiformes qui n’ont pas de territoire à proprement parler, pose aussi des problèmes juridiques dans la résolution des conflits. La dichotomie opérée entre les services de renseignements intérieurs et extérieurs est certes réelle car départagée en fonction du domaine de compétences, mais celle-ci n’en demeure pas moins complémentaire. En matière de sécurité extérieure, quelques éléments d’actualité comme la situation turque  -  dont une éventuelle accaparation des forces démocratiques syriennes par la menace turque, pourrait potentiellement engendrer une sécurité diminuée autour des camps d’Al-Hol et d’Al-Roj notamment, représenterait des risques avérés de libération de jihadistes - remettent à l’ordre du jour les liens existants entre ce qu’il se passe en dehors de nos frontières et le territoire national. Ces camps représentent un État dans l'État, et dont les démonstrations d'allégeance à l’EI se répètent régulièrement, comme celui de l’index levé vers le ciel notamment, ne cessent de démontrer que la menace pèse toujours sur le territoire national. 

Si les professionnels s’accordent à dire qu’il est très difficile de faire un état des lieux précis des nébuleuses jihadistes, des menaces demeurent menaçantes pour la France. En outre, certaines sont plus facilement identifiables que d’autres, bien qu’elles puissent paraître contraire d’un prime abord. Certains courants de l’islam politique espèrent s’intégrer dans les méandres de l’administration française, se servant ainsi d’elle, et s’inscrivent, finalement, dans le même objectif que le jihad d’épée. Le salafisme politique - dont la galaxie des Frères musulmans en est une illustration -  est bien souvent oublié dans les discours politiques, mais n’en demeure pas moins comme étant une mouvance servant in fine, comme écrit ci-dessus, les mêmes objectifs. 

Ce constat est partagé par le général d’armée (2s) Richard Lizurey, Frédéric Péchenard et Eric Delbecque, qui ont ensemble co-rédigé la préface du livre “Le jihad en France” d’Alexandre Rodde, déclarant alors que le “salafisme politique et le jihadisme salafiste sont en réalité les deux faces d’une même médaille, l’un préparant la survenue de l’autre”. 

Madeleine Robbin

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