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jeudi 22 décembre 2022

Pourquoi la Suisse fait davantage d'affaires avec la Russie qu'avant

 

Davantage d'or russe trouve son chemin vers la Suisse qu'avant le début de la guerre
Le volume des échanges commerciaux entre la Suisse et la Russie a augmenté de 19% depuis le début de la guerre
Les exportations ont également augmenté: cela est dû à la branche pharmaceutique


Les sanctions économiques occidentales censées étouffer l’économie russe en réponse à l’invasion de l’Ukraine n’ont eu «jusqu’à présent que des effets limités». Les chiffres analysés et publiés par le «Tages-Anzeiger», mercredi, sont édifiants.

Le total des transactions commerciales enregistrées entre les deux pays se situait en moyenne à 321 millions de francs par mois entre 2017 et 2021, selon les données de l’Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières (OFDF). Depuis le début de la guerre en février, cette moyenne est passée à 383 millions, soit une hausse de 19%. Les exportations vers la Russie ont progressé de 6,5% et les importations de 54%. La hausse des exportations s’explique par la livraison de produits pharmaceutiques, non sanctionnés pour des raisons humanitaires.

Hausse aussi dans d’autres pays

La Suisse n’est pas le seul pays à connaître un boom du commerce avec la Russie, précise le «Tages-Anzeiger». Sans surprise, la Chine et l’Inde, non alignées sur les sanctions, connaissent une hausse, mais aussi des membres de l’UE et de l’OTAN comme la Belgique et l’Espagne. La dépendance envers le pétrole et le gaz russe n’a pas permis à certains pays de diminuer leurs achats et la hausse des prix a profité au Kremlin. On constate tout de même des baisses de livraisons vers la Russie pour des produits comme les ordinateurs et les voitures. Mais les analyses du Fonds monétaire international (FMI) montrent que les sanctions ont eu des effets plus limités que prévu. En avril, le FMI annonçait un recul de 8,5% de l’économie russe en 2022. En juillet, il était question de 6% et en octobre de seulement 3,4%.

Conforme aux exigences

Mais le bond en avant des importations est plus surprenant, estime le «Tages-Anzeiger». Il est presque exclusivement dû à l’achat d’or russe, pourtant frappé d’une rigoureuse interdiction depuis le 4 août. L’OFDF assure que les «importations d’or remplissent les règles en vigueur» depuis cette date.

Les chiffres indiquent pourtant que 6,4 tonnes d’or «d’origine russe» ont franchi la frontière suisse, en novembre, pour un total de 344 millions de fr. Comment est-ce possible? L’OFDF explique qu’en réalité cet or est acheté sur le marché britannique mais enregistré avec la mention du pays d’origine.

Dans le contexte des sanctions reprises par Berne, l’importation en question n’est donc pas considérée comme provenant de Russie mais de Grande-Bretagne. Le pays d’origine est pris en compte dans les statistiques suisses sur le commerce extérieur, «conformément aux exigences méthodologiques», nous explique l’OFDF. Ce dernier précise aussi que l’or en provenance du Royaume-Uni importé en novembre est sorti de Russie, avant l’entrée en vigueur des sanctions du 4 août.

Acheteurs pas connus

Il est aussi impossible de savoir qui a acheté cet or en Suisse pour des raisons de «protection des données», indique l’office des douanes. L’ambassade de Russie ne donne pas non plus davantage d’information. Les sanctions peuvent aussi être contournées si l’or est transformé dans un pays intermédiaire qui devient ainsi le pays d’origine. Des transactions via les pays du Golfe avaient déjà soulevé des questions dans les mois suivant le déclenchement du conflit ukrainien.

Nicola Imfeld

blick.ch