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samedi 9 janvier 2021

Le harcèlement d’AQMI contre Barkhane

 

En l’espace de cinq jours, la force Barkhane a perdu cinq des siens lors de deux attaques revendiquées par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans [GSIM ou JNIM], commises avec des engins explosifs improvisés [IED].

Il est difficile de savoir exactement le nombre d’attaques à l’IED ayant visé les convois de Barkhane au Mali, toutes ne faisant pas l’objet d’une communication de la part de l’État-major des armées [EMA], ce dernier ne les évoquant que quand, malheureusement, elles tuent et/ou blessent gravement des militaires français.

Selon un décompte fait par Jean-Marc Tanguy [blog le « Mamouth »], 22 militaires français sur les 53 qui ont perdu la vie au Sahel depuis 2013 ont été la cible d’une attaque commise avec un IED/mine/SVBIED.

La consultation des rapports sur le Mali publié par le secrétaire général des Nations unies montre que le recours aux IED est privilégié par les groupes armés terroristes [GAT]. Celui rendu public en septembre dernier faisait état, au premier semestre 2020, d’une augmentation de près de 65% du nombre d’attaques commises avec des engins explosifs improvisés contre les Casques bleus de la MINUSMA.

« Si le nombre global d’accidents liés à des engins explosifs improvisés est resté constant, le nombre de victimes civiles dans le centre a augmenté du fait d’une plus grande utilisation du type d’engins explosifs improvisés déclenchés par les victimes : 153 cas au cours du premier semestre 2020 [35 morts et 118 blessés], contre 108 au cours de la même période en 2019 », indiquait encore le rapport.

Et, visiblement, cette tendance risque de s’accentuer au cours des prochains mois, si l’on en juge par les récentes actions de la force Barkhane depuis le début de cette année.

En effet, selon le compte-rendu des opérations hebdomadaire de l’EMA, plusieurs opérations « ponctuelles » ont été conduites contre les groupes armés terroristes cherchant à poser des IED.

Ainsi en a-t-il été le 2 janvier, quand deux individus enfouissant un engin explosif improvisé sur l’axe reliant Hombori à Gossi ont été repérés par une patrouille d’hélicoptères français. « Une frappe a été réalisée en direction des individus. Leur moto a été détruite », relate l’EMA, avant de préciser que l’arrivée sur les lieux de soldats du Groupement tactique désert [GTD] « Lamy » a permis la saisie d’armement et de matériels servant à fabriquer des IED.

Trois autres actions ont visé la logistique des GAT pour confectionner leurs engins explosifs. L’une, menée dans la nuit du 3 au 4 janvier par la Task Force Takuba [forces spéciales européennes, ndlr], l’Unité légère de reconnaissance et d’intervention [ULRI] n°2 des forces armées maliennes et un détachement du GTD Conti, a permis de mettre la main sur 100 kg « d’éléments de base entrants dans la fabrication d’explosif artisanal. »

Lors de la seconde, conduite le 4 janvier à Sema, en coordination entre Barkhane et les FAMa, plusieurs emplacement occupés par les jihadistes ont été découverts, dont un atelier de fabrication d’IED. « De l’armement individuel, des munitions, des roquettes, sept motos, des moyens de communication ainsi que sept EEI et de nombreux composants servant à leur confection ont ainsi été saisis », affirme l’EMA.

Puis, dans les environs de Menaka, un détachement du GTD Conti a trouvé et saisi des ressources entrant dans la fabrication d’IED ainsi que d’équipements utilisés pour creuser des sapes.

Enfin, manipuler des IED n’est pas sans risque. En effet, toujours selon l’EMA, le 2 janvier, un jihadiste a déclenché celui qu’il était en train de poser sur la route nationale 20, qui relie Ansongo à Menaka. Gravement blessé, il a été repéré par des militaires de Barkhane, qui l’ont pris en charge médicalement, avant de succomber à ses blessures.

Un véhicule piégé cible un VBCI de Barkhane : six soldats français blessés

Le 8 janvier, lors d’une opération menée dans la région de Serma aux côtés des Forces armées maliennes [FAMa], un Véhicule blindé de combat d’infanterie [VBCI] du Groupement tactique désert [GTD] Lamy, armé principalement par le 1er Régiment de Tirailleurs [RTir] a été touché par l’explosion d’un véhicule piégé [VBIED – Vehicle Borne Improvised Explosive Devices] entre Mondoro et la route nationale 16.

Selon les explications données par l’État-major des armées [EMA], « un véhicule inconnu s’est dirigé à vive allure » vers l’arrière du convoi, ce qui a conduit un VBCI à s’interposer « pour protéger les autres éléments de la force. » Et, poursuit-il, « devant cette manoeuvre, le conducteur » du VBIED a « fait déclencher sa charge explosive. »

Six militaires français qui se trouvaient à bord du VBCI ont été blessés. Pris en charge médicalement, ils ont été évacués par hélicoptère vers l’hôpital de campagne [rôle 2] de Gao. Si leur pronostic vital n’est pas engagé, l’état de trois d’entre-eux justifie toutefois leur rapatriement en France.

Les faits se sont produits dans la région de Douentza, où est active la katiba Serma, membre du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans [GSIM/JNIM], qui a renvendiqué les deux attaques à l’IED ayant coûté la vie à cinq militaires français la semaine passée.

Pour rappel, le VBCI est un blindé 8×8 de 28 tonnes pouvant transporter jusqu’à 8 fantassins. Ce n’est pas la première fois qu’un tel véhicule est visé par un VBIED. En juillet 2018, l’un d’entre-eux avait été endommagé par l’explosion d’un véhicule kamikaze à Gao, alors que les fantassins qu’il transportait étaient en patrouille.

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