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dimanche 20 décembre 2020

Pékin a-t-il accès aux données des demandeurs de visa pour le Canada ?

 

Parmi les grands bailleurs de fonds d’une compagnie utilisée par Ottawa pour récolter et traiter les renseignements personnels des demandeurs de visa, on compte l’un des plus importants fonds d’investissement chinois. Une enquête du Globe and Mail, le plus influent quotidien du Canada.

Une société chinoise a-t-elle récupéré des informations personnelles de demandeurs de visa pour le Canada ? Le risque est élevé, d’après une enquête du Globe and Mail. Le grand quotidien canadien a épluché les informations du registre d’entreprises britanniques Companies House. Ses investigations révèlent que la Chengdong Investment Corp. est l’un des importants partenaires de la société mère TT Services, qui gère 24 centres de demandes de visa pour le gouvernement canadien dans 24 pays. 

Chengdong est une filiale de la China Investment Corp. et TT Services appartient à une société basée à Dubaï, VFS Global, qui agit comme sous-traitant pour le traitement de visas dans 144 pays. Or “ses services comprennent la collecte d’empreintes digitales, de photos, d’informations biographiques et d’autres données personnelles”, révèle le quotidien.

Des consultants en immigration au Canada ont fait part de leurs préoccupations au sujet du contrat avec VFS depuis 2008, souligne le Globe and Mail.  Selon Richard Kurland, un avocat spécialisé en immigration de Vancouver, la quantité d’informations personnelles traitées par VFS est immense : “Les arbres généalogiques des candidats passent entre leurs mains.”

VFS est susceptible de détenir plus d’informations personnelles que sur les candidats pour les services d’immigration que des pays entiers ” 

Un ancien directeur du service canadien de renseignement de sécurité, Ward Elcock, juge quant à lui que le rôle joué par Chengdong au sein de TT Services devrait susciter des interrogations.

Je soupçonne que les visas et les applications associées pourraient intéresser les Chinois (…). Dans l’environnement actuel, il ne serait pas avisé d’ignorer les risques potentiels.”

Des relations sino-canadiennes exécrables

Les relations entre Ottawa et Pékin demeurent très mauvaises en raison de l’affaire Huawei. Les détenus canadiens Michael Spavor et Michael Kovrig, détenus en Chine depuis décembre 2018, passeront tout vraisemblablement leur troisième Noël en prison. 

Le ministre canadien des Affaires étrangères, François-Philippe Champagne, a rapidement riposté le 18 décembre à des critiques de la Chine sur les efforts d’Ottawa pour construire une alliance internationale afin de libérer les deux hommes :

Je ne prendrai de leçons de personne et certainement pas de la Chine pour ce qui est (…) de défendre les intérêts canadiens et de défendre Michael Kovrig et Spavor. 

De son côté, le premier ministre Justin Trudeau a déclaré, sans autres précisions, qu’il “garde l’espoir d’avoir de bonnes nouvelles d’ici une heure, un jour, une semaine, un mois” sur la libération des deux Michael.

Martin Gauthier

courrierinternational.com