Une semaine après l'attentat de Vienne qui a fait quatre victime et provoqué l'arrestation de deux hommes à Winterthour (ZH), la police genevoise s'inquiète à son tour du nombre de signalements pour des soupçons de radicalisation dans le canton.
Que ce soit sur internet ou en groupes officieux, le risque de radicalisation n'a pas disparu en Suisse. Début novembre, la procureure de la Confédération, Juliette Noto, estimait dans la NZZ que le terreau pour la radicalisation islamiste existe en Suisse, notamment en Romandie et dans l'Arc lémanique.
500 signalements à Genève
Si les autorités vaudoises se refusent à communiquer leurs chiffres, à Genève le nombre de signalements est constant et se monte à 500 lors des cinq dernières années, essentiellement en provenance de la police, du service de renseignement cantonal et de la population.
Depuis 2018, la police cantonale a enquêté sur deux cents personnes et dans 50% des signalements, le profil des suspects est le même: un jeune homme âgé entre 20 et 30 ans, d'origine kosovare, bosniaque ou macédonienne.
La police genevoise redoute un scénario comme l'attaque de Morges (VD) en septembre dernier, qui a coûté la vie à un homme de 29 ans. L'assaillant avait justifié son crime par "vengeance contre l’Etat suisse" et avait dit qu'il s'agissait de "venger le Prophète", selon une source judiciaire.
"Risque très élevé"
Interrogée sur le plateau du 19h30, la cheffe de la police genevoise, Monica Bonfanti, s'est dite "inquiète" de la situation rencontrée actuellement en Suisse et en Europe.
"Depuis 2015 et les attentats de Paris, le risque d'une attaque sur le territoire européen et suisse est de nouveau très élevé, en raison de deux mouvances: le groupe Etat islamique et Al-Qaïda", explique-t-elle, tout en précisant que les récents attentats étaient le fait de personnes seules ou de petits groupes et qu'ils n'avaient pas été revendiqués par le groupe EI, passablement affaibli depuis mars et la perte de son dernier fief en Syrie.
A Genève, Monica Bonfanti dispose de 22 policiers au service du renseignement, mais dont les tâches ne se limitent pas qu'au terrorisme. "Beaucoup de travaux sont faits par d'autres entités de la police genevoise", indique-t-elle.
Concernant plus particulièrement le djihad, 9 personnes sont parties à l'époque en zone de combats et deux sont revenues, selon la cheffe de la police cantonale. "Il a fallu mettre en place une collaboration avec la Confédération. Pour ces deux retours, les choses se sont bien passées à Genève", affirme Monica Bonfanti.
Un réseau plus vaste?
Dans le volet suisse de l'investigation sur la fusillade en Autriche, les deux hommes arrêtés à Winterthour, originaires des Balkans, étaient aussi dans le radar du service de renseignement de la Confédération et étaient même déjà sous enquête à Zurich.
A ce stade de l'instruction, leurs liens avec le terroriste de Vienne, un jeune homme de 20 ans de nationalités autrichienne et macédonienne, restent flous, avec une question en toile de fond: faisaient-ils partie d'un réseau essentiellement germanophone ou plus vaste qu'on ne l'imagine?
Annabelle Durand
Jérémie Favre