Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 4 février 2020

Un médecin de Wuhan a tenté de donner l'alerte sur le coronavirus en décembre; on l'a fait taire !


Trente décembre 2019, à Wuhan: le docteur Li Wenliang lâche une bombe dans le groupe de discussion des anciens élèves de son école de médecine: sept personnes ayant fréquenté le marché de fruits de mer du coin ont attrapé un virus de type SRAS et ont été placées en quarantaine dans son hôpital. Le médecin explique à ses confrères que d'après un test dont il a eu connaissance, la maladie en question est un coronavirus. «Je voulais juste rappeler à mes camarades d'université de faire preuve de prudence», explique Li Wenliang à CNN.

En privé, le Chinois de 34 ans avertit ses amis et les prie de prévenir leurs proches. Mais en quelques heures, des captures d'écran des messages envoyés par le médecin commencent à circuler sur les réseaux sociaux. Et le nom de Li Wenliang n'est pas flouté. «Quand je les ai vus circuler en ligne, j'ai réalisé que j'avais perdu le contrôle et que j'allais sûrement être puni», témoigne le trentenaire. L'intuition du Chinois est bonne: la police de Wuhan l'accuse, lui et certains de ses confrères, de propager des rumeurs.

Le même jour, la Commission municipale de l'hygiène et de la santé de Wuhan émet une notice d'urgence informant les institutions médicales qu'une série de patients ayant fréquenté un marché de fruits de mer souffrait d'une «pneumonie inconnue». «Les organisations ou les particuliers ne sont pas autorisés à communiquer au public des informations sur les traitements sans autorisation», était-il écrit dans cette notice. Aux premières heures du 31 décembre, les autorités sanitaires de Wuhan tiennent une réunion d'urgence pour discuter de l'épidémie. Dans la foulée, Li est convoqué par les responsables de son hôpital pour expliquer comment il a eu connaissance des cas.

Dans les premiers jours de janvier, le médecin est convoqué par les autorités et forcé de signer une déclaration dans laquelle il reconnaît avoir commis un «méfait» et promet de ne plus être l'auteur «d'actes illégaux». Li Wenliang craint alors de finir en prison, mais on le relâche une heure plus tard. L'ophtalmologue reprend son poste à l'hôpital central de Wuhan, mais se sent totalement impuissant: «Je ne pouvais rien faire. Tout devait adhérer à la ligne officielle», explique-t-il.

Le 10 janvier, après avoir traité sans le savoir un patient souffrant du coronavirus, Li commence à tousser et à avoir de la fièvre. Il est hospitalisé deux jours plus tard, avant d'être admis aux soins intensifs. Le 1er février, le diagnostic tombe: il est atteint du coronavirus et se trouve actuellement sous oxygène. Le médecin toussait trop et respirait trop difficilement pour pouvoir s'entretenir au téléphone avec la chaîne américaine. C'est par l'intermédiaire de l'application WeChat qu'il a raconté son histoire.