Le Conseil fédéral a délivré ce matin son «message sur l’armée 2020». Document touffu de plus de 80 pages, ce dernier indique les besoins des forces suisses en attendant l’assentiment prochain du parlement. Voici ce qu’il annonce de plus important.
Pour quelques milliards de plus
Entre 2021 et 2024, les forces militaires suisses espèrent obtenir un budget de 21,1 milliards de francs. Celui-ci se compose de 5 milliards de francs par an – chiffre stable – agrémenté d’une «réserve technique» de 200 millions et d’une rallonge de 900 millions sur quatre ans. Celle-ci se justifie par le «renchérissement», indique le Conseil fédéral, qui ajoute que ce montant correspond «plus ou moins à̀ la croissance moyenne des dépenses de la Confédération»: +1,4% par an.
«Des investissements de 15 milliards de francs seront nécessaires dans les dix prochaines années», plaide l’exécutif suisse. Et ils seront particulièrement stratégiques: 6 milliards de francs pour l’achat de nouveaux avions – à condition que le peuple y donne son assentiment en septembre – 2 milliards pour un système de défense sol-air et 7 milliards pour les «autres composantes de l’armée». Toutes ces dépenses, souligne la Confédération, «seront financées au moyen du budget ordinaire».
Moderniser les télécommunications
A partir de 2020, celle qu’on appelle à tort la grande muette – terme qui désigne en fait l’armée de la Troisième République française – a aussi notamment prévu les choses suivantes: moderniser ses moyens de télécommunication «pour rester opérationnel en cas de crise et de cyberattaques» pour la somme de 600 millions et rajeunir le système de surveillance et de gestion de l’espace aérien des forces aériennes – en attendant de nouveaux jets – pour 155 millions.
Il est également prévu de renouveler le matériel d’aide en cas de catastrophe – une partie de l’équipement anti-incendie ayant «plus de 30 ans» – pour 116 millions et de prolonger de 2023 à 2040 la durée de vie des 186 «chars de grenadiers 2000» du pays: 438 millions de francs. L’armée prévoit également de mettre à niveau les avions PC-21, qui servent à l’instruction des futurs pilotes de F/A-18: 45 millions de francs.
Le livret de service dématérialisé
Plusieurs projets inscrits dans le message ont également pour but le développement technologique de l’armée: la numérisation du livret de service, l’acquisition de nouveaux simulateurs de combat et de nouveaux logiciels informatiques ou encore le renforcement de la division «science et technologie» d’Armasuisse (l’Office fédéral de l’armement) sont prévus ces prochaines années à hauteur de 225 millions de francs.
Le renouvellement d’une large partie du «matériel de l’armée» est également annoncé: des bottes de combat aux véhicules d’extinction des feux des bases aériennes en passant par des simulateurs de conduite et autres «équipements personnels» (des élastiques de jambe?), la modernisation de l’attirail gris-vert est devisé à 440 millions de francs. Enfin, 172 millions de francs serviront à remplir les fusils, canons et gants cirés des militaires avec de nouvelles munitions, obus et grenades à main.
Rénovation d’une installation classifiée
L’armée continue par ailleurs de réduire son parc immobilier. En Suisse romande, la place d’armes de Moudon sera bientôt définitivement fermée. L’école d’hôpital de la future ancienne caserne sera transférée vers celle de Chamblon, au-dessus d’Yverdon, qui sera modernisée pour accueillir 430 militaires supplémentaires. Cette opération devrait permettre des économies de l’ordre de 66 millions de francs, indique le Conseil fédéral, montant qui comprend le produit estimé de la vente de la caserne de Moudon.
En Suisse alémanique, la base aérienne zurichoise de Dübendorf sera elle aussi en partie désaffectée. Si elle est destinée à continuer d’accueillir des hélicoptères militaires, sa piste ne sera plus utilisée que par des avions civils et une partie du périmètre sera transformé en vaste parc d’innovation. L’une des plus importantes casernes de Suisse, Frauenfeld, sera également agrandie et modernisée. A noter encore la mystérieuse rénovation d’une «installation classifiée» – dont nul ne connaît la localisation – qui recevra un coup de peinture pour la modique somme de 41 millions de francs.
Boris Busslinger