jeudi 27 février 2020
Ayant encore subi des pertes importantes face à Barkhane, les jihadistes cherchent à se doter de drones
Comme les semaines précédentes, la force Barkhane a maintenu son effort contre les katibas de l’État islamique au grand Sahara [EIGS] implantées dans la zone dite des « trois frontières », c’est à dire dans une région située aux confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso.
Ainsi, la semaine passée, les Mirage 2000D et les drones Reaper MQ-9 Reaper, désormais en mesure d’emporter de l’armement, ont visé des groupes armés terroristes [GAT] à trois reprises [les 19, 22 et 24 février, ndlr]. Ces frappes ont permis de détruire un plot logistique ainsi que leurs campements… Et de « neutraliser » une vingtaine de jihadistes.
« La réalisation de ces frappes s’est appuyée sur un travail extrêmement minutieux et rigoureux de renseignement, en multipliant les capteurs de renseignement et leur action dans la durée, ce qui a permis de caractériser précisément plusieurs zones refuges abritant des terroristes, dans une région reculée du Liptako connue pour être une zone de prédation de l’état islamique au grand Sahara », a expliqué l’État-major des armées [EMA].
Au sol, les légionnaires des groupements tactiques [GTD] Altor [2e REP] et Centurion [2e REI/ 1er REC] n’ont pas chômé…
En effet, opérant depuis un mois dans le Liptako nigérien aux côté des forces armées nigériennes, le GTD 3 « Altor » a neutralisé « plusieurs terroristes » et saisi « des ressources logistiques et du matériel de guerre », souligne l’EMA. Mais l’une de ces prises a de quoi confirmer les craintes exprimées il y a quelques mois par le général François Lecointre, le chef d’état-major des armées [CEMA], au sujet de la disposition des terroristes à utiliser des technologies dites « nivelantes ».
Le 14 février, lors d’une vaste opération de fouille, le GTD Altor a découvert plusieurs campements « inoccupés » par les jihadistes. Et, selon l’EMA, au cours de ce « ratissage », du matériel de guerre a été saisi en grande quantité, dont des munitions, des éléments permettant de fabriquer des engins explosifs improvisés [IED], des postes radios et… des drones.
Sauf erreur, c’est la première fois que l’EMA évoque la découverte de drones dans un campement jihadiste dans l’un de ses « points de situation ».
L’automne dernier, le général Lecointre avait dit redouter la mise en oeuvre de tels appareils par les jihadistes actifs dans la bande sahélo-saharienne, à l’instar de ceux de l’État islamique [EI ou Daesh] qui, au Levant, ont l’habitude d’en utiliser pour leurs opérations, tant pour faire des repérages que pour lancer des attaques.
« Les diverses menaces ainsi mises en œuvre le sont au moyen de technologies de plus en plus ‘nivelantes’. […] Le fait que ces technologies soient de plus en plus fréquemment utilisées nous conduit à revoir nos moyens de défense et de protection. Outre cela, la technologie employée aujourd’hui dans un conflit dissymétrique en puissance […] pourrait être certainement utilisée demain par Daesh, par l’État islamique dans le Grand Sahara [EIGS] ou par le Rassemblement pour la victoire de l’islam et des musulmans [RVIM ou GSIM] contre nos installations au Sahel. C’est très préoccupant », avait expliqué le CEMA aux députés de la commission des Affaires étrangères.
Lors d’une précédente auudition, le général Lecointre avait estimé que le « phénomène drone change[ait] la donne, assez peu contre les véhicules blindés » mais « très sérieusement contre des dispositifs tactiques ou mobiles »
Cependant, l’EMA ne précise pas si les drones retrouvés par les légionnaires pouvaient emporter une munition ou être piégés, comme ceux utilisés par les jihadistes en Irak et en Syrie.
Quoi qu’il en soit, le GTD Altor a par ailleurs « neutralisé six combattants armés et détruit trois motos cours d’actions menées contre les groupes opérant dans cette région reculée », précise encore l’EMA.
Quant au GTD 2 « Centurion », il s’est concentré sur le Liptako malien, en menant des raids blindés ainsi que des actions de ratissage et de bouclage de zone. Ces dernières ont permis la neutralisation de « 3 jihadistes et la saisie d’armement et de ressources, notamment de l’essence et du matériel de vie en campagne. »
Enfin, dans le Gourma malien, caractérisé par un terrain recelant de nombreux oueds, des massifs rocheux et de forêts pouvant constituer autant de caches potentielles pour les GAT, le GTD aérocombat a été sollicité pour une opération ayant mobilisé toutes ses capacités [commandos, hélicoptères français, CH-47 Chinook britanniques, Merlin danois, appuis en transmission, contrôleurs aériens, etc]. « Un poste de commandement tactique complet a également été projeté lors de cette opération pour diriger la manœuvre sur le terrain », précise l’EMA.
« L’action permanente et coordonnée entre patrouilles de véhicules terrestres et patrouilles aériennes d’hélicoptères offrant une très grande réactivité en cas d’évolution de la situation tactique a permis de contrôler une très large zone », a-t-il souligné, sans donner le bilan de cette opération.