Un groupe de serveuses nord-coréennes censées avoir fait "défection" au Sud en 2016 ont en fait été enlevées par la Corée du Sud, selon les conclusions de l'enquête d'une équipe internationale d'avocats qui a réalisé une visite à Pyongyang.
Cette affaire qui avait fait grand bruit suscite depuis longtemps la polémique. Pyongyang affirmait que les 12 femmes qui travaillaient dans un restaurant nord-coréen de la localité chinoise de Ningbo avaient été enlevées et Séoul martelait qu'elles avaient fait défection de leur plein gré.
Pendant leur séjour de six jours dans la capitale nord-coréenne, qui s'achève jeudi, les avocats ont rencontré sept autres anciennes serveuses qui disent être parvenues à fuir tandis que leurs collègues étaient piégées et contraintes de se rendre à Séoul.
Les sept Nord-Coréennes ont affirmé n'être parvenues à fuir, puis à retourner au Nord, que parce que leur responsable avait entendu une conversation entre le gérant du restaurant et un agent du renseignement sud-coréen venu les récupérer à l'aéroport.
Les 12 autres serveuses avaient déjà été emmenées sans savoir qu'elles allaient en Corée du Sud, a indiqué dans un communiqué l'équipe appartenant à l'Association internationale des avocats démocratiques.
Les 12 femmes ont été "emmenées par tromperie (...) contre leur gré, séparées de leurs familles et de leur pays", affirment les avocats. "Cela relève du crime d'enlèvement."
Lors d'un point presse à Pyongyang mercredi, un des avocats a fustigé la gestion de l'affaire par Séoul.
L'équipe d'avocats a reçu la "pleine coopération" de Pyongyang mais n'a pas pu rencontrer les 12 serveuses, qui vivent actuellement en Corée du Sud, a déclaré Niloufer Bhagwat, vice-présidente de la Confédération des avocats d'Asie et du Pacifique. Les jeunes femmes (...) sont toujours surveillées par les renseignements sud-coréens et la police nationale", a-t-elle dit.
Dans des révélations explosives, Heo Gang-il, gérant du restaurant nord-coréen où travaillaient les serveuses, avait raconté à la télévision sud-coréenne en mai 2018 que les jeunes femmes avaient été piégées par le renseignement sud-coréen.
S'exprimant dans le programme Spotlight de la chaîne JTBC, l'une des émissions d'enquête les plus en vue de Corée du Sud, M. Heo avait déclaré avoir menti aux serveuses sur leur destination finale et leur avoir fait du chantage pour qu'elles le suivent au Sud. Il avait expliqué avoir été recruté par le Service national du renseignement sud-coréen (NIS) en 2014 en Chine.
La Commission nationale sud-coréenne des droits de l'homme a réalisé une enquête sur cette affaire, dont les conclusions n'ont pas encore été annoncées. Les avocats doivent, eux, rendre un rapport à l'ONU.
Certains soupçonnent que la "défection" des 12, présentée à l'époque comme la plus importante depuis de longues années, avait pu être manigancée par le gouvernement conservateur de l'ex-présidente destituée Park Geun-hye afin de séduire l'électorat avant les législatives.
AFP