A ceux qui sont si peu nombreux !
Morts à cause de l'imprudence de certains !
Plusieurs indices laissaient penser que deux ressortissants français disparus depuis le 1er mai lors d’une excursion dans le de Pendjari, au Bénin, près de la frontière avec le Burkina Faso, avaient été enlevés par un groupe armé terroriste [GAT]. Cette piste était d’autant plus crédible que le corps mutilé de leur guide fut retrouvé peu après.
Dès l’annonce de leur disparition, le renseignement et les militaires français de l’opération Barkhane, aidés par un détachement américain ainsi que par les forces burkinabè, ont tenté de localiser ces deux touristes aussi vite que possible. Manifestement, ce travail aura été efficace, le camp des ravisseurs ayant été repéré dans le nord du Burkina Faso, le 9 mai.
D’où la décision de solliciter les forces spéciales de la Task Force Sabre pour mener une opération dans la nuit du 9 au 10 mai afin de libérer non seulement les deux ressortissants français mais aussi deux autres otages, dont une américaine et une sud-coréenne.
Pour le moment, l’État-major des armées [EMA] n’a pas donné de détails sur le déroulement de cette opération spéciale, si ce n’est que les militaires français ont réussi à libérer les quatre otages et à neutraliser leurs geôliers. Mais, malheureusement, cela s’est fait prix de la vie de deux commandos marine.
L’annonce de la libération des otages et de la mort des deux militaires français a été faite par le président Macron, via un communiqué.
« Le Président de la République se félicite de la libération de quatre otages au Sahel, dont nos deux compatriotes, M. Patrick P. et M. Laurent L., enlevés le 1er mai dernier au Bénin. […] Outre les deux otages français, une citoyenne américaine et une ressortissante sud-coréenne ont également été libérées », a d’abord salué l’Élysée.
« Cette libération a pu être obtenue grâce à une opération militaire, conduite par les forces françaises dans la nuit de jeudi à vendredi, au nord du Burkina Faso. Au cours de celle-ci, deux militaires ont trouvé la mort au combat, le maître Cédric de Pierrepont et le maître Alain Bertoncello, tous deux officiers mariniers au sein du commandement des opérations spéciales », a ensuite ajouté la présidence de la République.
Le deux officiers mariniers tués appartenaient au commando Hubert
« Marins, les MT Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello, du commando Hubert, sont morts cette nuit au combat dans une opération de libération d’otages. J’admire leur courage, je partage la peine de leurs familles et de leurs proches », a déclaré l’amiral Christophe Prazuck, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM].
Évoquant une « action précise, déterminée et audacieuse », le général François Lecointre, le chef d’état-major des armées [CEMA] a dit s’incliner devant « la mémoire du maître Cédric de Pierrepont et du maître Alain Bertoncello », en soulignant « la détermination héroïque » dont ils ont fait preuve.
Le CEMA a également salué « l’engagement exemplaire des forces spéciales françaises qui, avec le concours direct de l’opération Barkhane, des forces armées burkinabé et le soutien en renseignement américain, ont libéré quatre otages de leurs ravisseurs terroristes. »
Évoquant les deux commandos marine, la ministre des Armées, Florence Parly, a dit que « toute la Nation s’incline aujourd’hui devant leur courage, reconnaissante et fière de ses héros qui ont donné leur vie pour sauver celle des autres. »
«Ils ont donné leur vie pour en libérer d'autres. Portons nos pensées vers leurs familles et frères d'armes»
E.Macron
Maîtres Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello
Photo : Marine nationale
Ces deux militaires appartenaient au Commando Hubert, qui est l’une des six unités de la Marine nationale qui agissent au profit du Commandement des opérations spéciales [COS].
Né en 1986, Cédric de Pierrepont [à gauche sur la photo ci-dessus] s’engage au sein des équipages de la flotte de la Marine nationale à l’âge de 18 ans pour devenir fusilier-marin. Très motivé, il termine premier [sur 47] de son cours de Brevet élémentaire. Puis, 18 mois plus tard, promu au grade de second-maître et ayant passé avec succès le stage commando, il est affecté au commando de Penfentenyo. Entre deux missions, il réussit le cours de nageur de combat en 2012 et rejoint le commando Hubert.
Chef de groupe depuis le 1er avril 2018, le maître de Pierrepont comptait quinze années de service avant de tomber pour la France au Sahel, théâtre qu’il avait rejoint le 30 mars dernier. Il était notamment titulaire de quatre citations avec attribution de la Croix de la Valeur Militaire, d’une citation à l’ordre de la Brigade avec attribution de la Médaille d’or de la Défense nationale et de la médaille d’Outre-mer avec agrafes Sahel et Liban.
Ayant intégré l’École de Maistrance en février 2011, à l’aube de ses 20 ans, Alain Bertoncello choisit la spécialité de fusilier marin. En 2012, il réussit le stage commando, ce qui lui permet d’être affecté au commando Jaubert. Son brevet de nageur de combat en poche, il rejoint, en juillet 2017, le commando Hubert.
Selon la Marine nationale, le maître Bertoncello a pris part à des « missions de défense des intérêts maritimes français aux Seychelles [protection des thoniers] ainsi qu’à plusieurs opérations extérieures au Qatar, au Levant et au Sahel », qu’il avait rejoint le 30 mars. Il était titulaire d’une citation à l’ordre du régiment avec attribution de la Médaille d’or de la Défense nationale, de la Médaille d’Outre-mer pour le Moyen-Orient et de la Médaille d’argent de la Défense nationale.
«Tués à très courte distance»
Selon le récit du chef d'état-major français, le général François Lecointre, «les commandos des forces spéciales se sont infiltrés dans la nuit noire sur une distance de 200 mètres, malgré la présence d'une sentinelle», avant d'être finalement repérés à dix mètres des abris des ravisseurs.
Les commandos décident alors de monter à l'assaut sans ouvrir le feu, pour ne pas provoquer de pertes chez les otages. Les militaires Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello «sont tués à très courte distance». En face, quatre ravisseurs périssent. Cette opération a été «rendue possible par la mobilisation des moyens de (la force antijihadiste française au Sahel) Barkhane, le soutien logistique des forces burkinabè et le soutien américain en renseignement», a précisé le général.
Le corps du guide béninois des deux touristes avait été découvert le 4 mai dans le parc national de la Pendjari où ils effectuaient un safari. Quant aux deux autres otages libérées, une Américaine et une Sud-Coréenne, «personne n'avait connaissance de leur présence» au Burkina, a affirmé le général Lecointre. «A priori elles étaient otages depuis 28 jours», a-t-il précisé.
«Insécurité totale»
Les autorités françaises suivaient l'évolution des ravisseurs depuis plusieurs jours et ont saisi l'opportunité d'agir en raison du risque «de transfèrement de ces otages à une autre organisation terroriste qui agit au Mali (...) la Katiba Macina» du prédicateur Amadou Koufa, ce qui aurait dès lors «rendu impossible d'organiser une quelconque opération de libération», a-t-il détaillé. L'identité des preneurs d'otages est encore inconnue.
«Ce que l'on peut dire c'est qu'il y a deux mouvements terroristes principaux qui opèrent dans cette zone et qui sont affiliés pour l'un à Al Qaïda, pour l'autre à l'EIGS (Etat islamique au Grand Sahara)», a seulement déclaré Florence Parly.
Les attaques djihadistes , concentrées initialement dans le nord du Mali, se sont étendues vers le centre du pays puis vers le Burkina Faso et menacent désormais les pays côtiers du Golfe de Guinée, jusque-là épargnés. «La menace a changé de forme, elle est devenue beaucoup plus mobile et ce sont maintenant les pays situés au sud du Mali qui sont les cibles, avec des fragilités singulièrement au Burkina Faso mais même dans le nord du Bénin», a relevé samedi sur la radio Europe 1 le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.
«Il faut maintenir la pression sur ces groupes», a poursuivi le ministre, jugeant l'action de la force française Barkhane «tout à fait essentielle» dans ce contexte. Cette force antijihadistes compte 4500 soldats sur cinq pays du Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad et Mauritanie).
Jean-Yves Le Drian a invité les touristes à «la plus grande précaution dans ces régions». «La zone où étaient nos deux compatriotes était considérée depuis déjà pas mal de temps comme une zone rouge, c'est-à-dire une zone où il ne faut pas aller, où on prend des risques majeurs si on y va», a-t-il ajouté.
Selon des experts et des sources sécuritaires, le nord des pays côtiers de l'Afrique de l'Ouest, comme le Togo et le Bénin, est devenu vulnérable ces derniers mois face à la stratégie d'expansion et de multiplication des fronts adoptée par les groupes armés. Depuis 2014, la France a déployé quelque 4.500 hommes au Sahel dans le cadre de l'opération Barkhane qui vise à lutter contre les groupes djihadistes opérant dans la région et au Sahara.
Au fil du temps, les violences djihadistes se sont propagées du nord vers le centre et le sud du Mali, et le phénomène déborde sur le Burkina Faso et le Niger voisins, se mêlant souvent à des conflits intercommunautaires.
Au Burkina, 90% des attaques ne sont pas revendiquées. Elles sont pour la plupart attribuées à Ansaroul Islam, au Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM) ou à l'Etat islamique dans le grand Sahara (EIGS), mais une dizaine d'autres groupes, «plus petits et sans doute moins structurés» sont également actifs, selon International Crisis Group (ICG).
Récompensé par le Qatar
Le Qatar a offert 24 véhicules blindés au Burkina Faso, a rapporté vendredi la télévision publique. Ces véhicules permettront de lutter contre les attaques djihadistes auxquelles le pays est confronté depuis 2015
Ces véhicules de transport de troupes, de type Storm, permettront «de combattre l'adversité dans laquelle nous vivons», a assuré le ministre de la Défense Chérif Sy. Acheminés par des avions de l'armée de l'air du Qatar, ils vont «renforcer les équipements et les capacités opérationnelles» des forces armées nationales, selon l'état-major général du Burkina.
M. Le Drian déplore l’imprudence des deux ex-otages
« Le message adressé aux bandits et aux terroristes est clair : ceux qui s’en prennent à la France et aux Français savent que nous n’économiserons aucun effort pour les traquer, les trouver, les neutraliser. Jamais nous n’abandonnons nos concitoyens. Tout que ce que nous savons, nous l’utilisons et tout ce qui ce qui est en notre pouvoir, nous le faisons », a déclaré Florence Parly, la ministre des Armées, le 10 mai, soit quelques heures après la libération, au Burkina Faso, de quatre otages par les forces spéciales françaises.
Au cours de cette opération, deux militaires du commando marine « Hubert », les maîtres Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello, y ont laissé leur vie, alors qu’ils venaient de lancer l’assaut contre les terroristes « sans ouvrir directement le feu » pour éviter de toucher les otages, parmi lesquels figuraient deux touristes français enlevés le 1er mai lors d’une excursion dans le parc de Pendjari, au Bénin, ainsi qu’une Américaine et une Sud-Coréenne.
D’où le commentaire de Jean-Yves Le Drian, le ministre des Affaires étrangères, sachant que la région où furent kidnappés les deux ressortissant français était (et reste) fortement déconseillé aux touristes par le Quai d’Orsay.
« La plus grande précaution doit être prise dans ces régions pour éviter que de tels enlèvements n’aient lieu et pour éviter des sacrifices de nos soldats », a ainsi déclaré M. Le Drian sur les ondes d’Europe1, ce 11 mai.
« Il faut que tous ceux qui veulent faire du tourisme dans ces pays s’informent auparavant de ce qu’on appelle les ‘conseils aux voyageurs’ mis en place et entretenus régulièrement par le Quai d’Orsay et qui indiquent les zones sûres, celles à petit risque et celles à gros risque », a poursuivi l’ancien ministre de la Défense.
Or, a encore souligné M. Le Drian, « la zone où étaient nos deux compatriotes était considérée depuis déjà pas mal de temps comme une zone rouge, c’est-à-dire une zone où il ne faut pas aller, où l’on prend des risques majeurs si on y va. »
Le site du ministère des Affaires étrangères indique qu’il est « formellement déconseillé de se rendre dans les zones rouges au Mali, au Niger, en Mauritanie mais aussi dans l’ensemble des zones rouges des pays frontaliers ». Et d’ajouter : « Les ressortissants français qui se trouveraient dans ces zones doivent savoir que leur sécurité et leur vie sont explicitement et directement menacées. En particulier pour les touristes, aucune personne, aucun groupe, aucune organisation ne peut prétendre garantir leur sécurité. »
Pour M. Le Drian, la « menace a changé de forme » car « elle est devenue beaucoup plus mobile et ce sont maintenant les pays situés au sud du Mali qui sont les cibles, avec des fragilités singulièrement au Burkina Faso mais même dans le nord du Bénin. »
Quoi qu’il en soit, les deux ex-otages seront accueillis à Villacoublay par le président Macron ainsi que par les ministres des Armées et des Affaires étrangères. La présence du chef d’état-major des arméres [CEMA], le général François Lecointre, est aussi annoncée.
Mais avant de revenir en France, ils ont été reçus par le président burkinabè, Roch Marc Christian Kaboré. À cette occasion, l’un d’eux [Laurent Lassumouillas, ndlr] », a dit avoir une pensée pour les deux commandos marine et à leur guide, assassiné par leurs ravisseurs.
« Toutes nos pensées vont aux familles des soldats et aux soldats qui ont perdu la vie pour nous libérer de cet enfer. On voulait présenter nos condoléances tout de suite », a-t-il dit. « On voulait remercier les autorités françaises et celles du Burkina d’avoir participé à notre libération pour que nous soyons loin de tout cet enfer que nous avons vécu », a-t-il ajouté.
TF121