Les djihadistes suisses doivent être punis si c'est possible dans le pays où ils ont commis leur acte. La Suisse ne procédera par ailleurs pas activement au rapatriement de ces personnes. Le Conseil fédéral a fixé vendredi une ligne de conduite.
Il y aurait actuellement une vingtaine de personnes de nationalité suisse aux motivations terroristes dans la zone de conflit syro-irakienne. Certaines sont détenues par des acteurs non étatiques. Deux objectifs ont été fixés par le gouvernement pour régler ce problème qui préoccupe aussi la plupart des pays européens.
Premièrement, il s'agit d'assurer la sécurité de la population helvétique et d'éviter un retour incontrôlé des djihadistes en Suisse. Deuxièmement, il faut s'assurer qu'ils seront punis. Sur cette base, le Conseil fédéral a fixé une stratégie qui doit guider les autorités compétentes pour l'examen et le traitement des cas individuels.
Pas de retour incontrôlé
Toutes les mesures opérationnelles à disposition seront prises pour empêcher un retour incontrôlé. Cela pourra par exemple se faire via un signalement dans le système d'information Schengen à des fins d'arrestation ou en partageant des informations de police et de renseignement avec les autorités étrangères.
La Suisse n'interdira pas un retour en Suisse, mais elle n'interviendra pas non plus activement pour rapatrier des adultes. Pour des mineurs, un rapatriement pourra cependant être examiné, dans l'intérêt de l'enfant.
Mais il ne pourra se faire qu'avec l'accord exprès des parents ayant le droit de garde et des services compétents en matière de protection de l'enfance. La sécurité des personnes et des organes de sécurité organisant le rapatriement devra dans tous les cas être garantie. Dans les États où elle peut le faire, la Suisse accordera un soutien, dans le cadre de la protection consulaire, à ses ressortissants privés de liberté.
Punis sur place si possible
Le Conseil fédéral souhaite par ailleurs que, dans la mesure du possible, les djihadistes soient poursuivis, jugés et punis dans l'État où une infraction a été commise, avec des procédures respectant les normes internationales. La Suisse peut soutenir la création d'une juridiction internationale spéciale ou la poursuite pénale sur place.
Si la poursuite pénale n'est pas possible dans l'État concerné, les ressortissants helvétiques devraient répondre de leurs actes devant un tribunal dès leur retour en Suisse. Autre possibilité: un jugement dans un État avec lequel la Suisse peut collaborer par le biais de l'entraide judiciaire.
Pour les djihadistes mineurs ou majeurs qui rentreraient malgré tout en Suisse, des mesures de réintégration devront en outre être mises en place avant, pendant et après l'exécution d'une peine.
Problème européen
La ministre de la justice Karin Keller-Sutter s'était récemment déclarée favorable à un jugement des djihadistes suisses là où ils ont été actifs. Le sujet est plus que jamais sur le tapis depuis que le président américain Donald Trump a appelé les pays européens à «reprendre plus de 800 combattants de l'EI» capturés en Syrie «afin de les traduire en justice».
Le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne sont les premiers concernés. Londres a décidé de déchoir de sa nationalité une jeune femme de 19 ans qui avait rejoint Daesh en Syrie.
Mesures à l'étude
L'arsenal suisse visant à lutter contre le terrorisme devrait être renforcé. Le code pénal sera complété par une interdiction de recrutement, d'entraînement et de voyage en vue d'un acte terroriste. Les appels au crime et l'apologie du terrorisme seront aussi poursuivis.
Le dossier est actuellement devant une commission du Conseil des Etats. Celle-ci veut le traiter avec un deuxième volet que le Conseil fédéral devrait prochainement présenter.
Il s'agira de fournir à la police des moyens en plus pour intervenir en dehors d'une procédure pénale contre des personnes potentiellement dangereuses (obligation de s'annoncer, interdiction de quitter le territoire, assignation à un lieu déterminé).
La stratégie du Conseil fédéral comporte un troisième volet consacré aux mesures de prévention. Un plan d'action commun aux cantons, aux communes et à la Confédération a déjà été adopté.
ATS