Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 24 juillet 2018

Bugaled-Breizh : c’est le submersible anglais "HMS Turbulent" qui est à l’origine de la mort des cinq marins-pêcheurs français !


“Bugaled Breizh”
“enfants de la Bretagne”



HMS Turbulent


Pour ceux qui n’auraient pas suivi l’affaire, un rapide rappel des circonstances de cette catastrophe.  Nous sommes au large de l’Angleterre, le 15 janvier 2004, au sud-ouest du cap Lizard (à l’extremité sud du pays). Deux chalutiers français sont sur place :  l’Eridan, immatriculé GV 642417 de Dieppe et dirigé par Yves Cossec, et le Bugaled-Breizh GV 642421 également de Guilvinec (l’aléa GV785720 est aussi sur place, de Gilvinec également).

L’Eridan et le Bugaled sont alors séparés de 9 km de distance.  A 12.21 GMT, c’est l’incident : l’Eridan reçoit un appel de détresse du Bugaled ainsi énoncé « Serge viens vite, on chavire ! Fais vite, on chavire ».  Tout va très vite alors : le chalutier de 150 tonnes va disparaître de la surface en 37 secondes seulement (l’ensemble de l’incident a duré 80 secondes) !



Une telle force d’entraînement vers le fond qu’une simple « croche » du filet sur un rocher ne peut expliquer.  Le responsable de l’Eridan a fait vite pour avertir de ce qui vient de se passer : à 13h36 le CROSS Gris Nez reçois son appel satellitaire d’INMARSAT C avertissant du problème (à gauche les premiers navires et le Dofjin qui vont se détourner pour porter assistance).  En dessous d’eux, ils ne le savent pas, mais il y a du monde, ce jour-là : pas moins de 5 sous-marins sont présents, car on est en plein exercice militaire, l’ASWEX 04 !

Les anglais ont deux SNA, le Torbay et le Turbulent (ils n’avoueront longtemps n’avoir eu que le premier dans le secteur), les néerlandais le Dolfijn et les allemands le U22 (S171) .

Les français sont aussi présents, en surface avec la frégate ASM Primauguet, l’aviso Commandant Blaison, des avions Atlantique II, et un sous-marin nucléaire d’attaque, le Rubis.  On citera un temps aussi l’USS Hyman G. Rickover (SSN-709), submersible américain de « classe Los Angeles » de 110 m de long, depuis retiré du service.  Venu peut-être bien « écouter » l’exercice militaire ou venu surveiller le transport de matériaux fissiles sur un cargo de la compagnie maritime anglaise PNTL qui devait avoir lieu au départ de Charleston, en Caroline du Sud, vers Cherbourg.

On le retrouvera le 2 février suivant accosté au quai de l’Oil Quay Jetty, dans la base navale d’Olavsvern.  Un autre sous-marin  US, l‘USS Albany, autre classe Los Angeles, était alors aussi en mer au même moment, parti de sa base de Norfolk, du 6 au 23 janvier 2004, sans qu’on sache ce qu’il a pu faire exactement.

Le problème étant qu’on imagine mal un engin de type Los Angeles dans des  fonds de seulement 80 mètres.  Cette notion de profondeur minimale existe pour ces gros engins : 88 mètres, c’est déjà 12 mètres de dessous des 100 mètres réglementaires où ils n’ont pas le droit de plonger !  Pour ce qui est de la taille de ses engins à cette profondeur, pourtant, on reste surpris : le Rubis français fait 73,60 m de long avec un maître beau de 7,60, le Turbulent (de Classe Trafalgar) 85,4 pour 9,8 mètres.  Or ils se promenaient tous deux dans les parages ! A se pourchasser, très certainement, étant donné que c’est aussi la règle du jeu dans ce milieu.

Les anglais sont donc aussi bien présents, et l’Eridan s’en aperçoit vite, à se voir survoler par un hélicoptère gris et rouge, qu’il voit survoler un radeau de survie, entièrement rouge, auprès duquel un plongeur est déposé, qui coule rapidement le radeau, désespérément resté vide. Un autre chalutier l’Hermine, assiste lui aussi à la surprenante séquence.  Ce radeau pose tout de suite problème : L’Hermine ramassera en effet en mer le premier radeau de survie de couleur orange, largué par le Bugaled Breizh, retrouvé a 15h08.  Le second est retrouvé flottant mais non déployé.  Or le chalutier français n’en a pas d’autre ! D’où provenait ce troisième radeau; voilà le problème. Or il a bien l’allure des engins de survie…. anglais, comme le montre cette image à droite d’un SeaKing au dessus d’un radeau qu’il vient de larguer.  Le radeau de survie que contiennent aussi les sous-marins anglais.

Les gens de l’Eridan on vu passer trois hélicoptères sur le secteur : avant l’appel de détresse, un appareil entièrement gris, puis un autre, après que le chalutier ait coulé, un gris et rouge cette fois marqué « Rescue » et un entièrement jaune.  La Primauguet (navire « initialement conçu pour la lutte anti-sous-marine au sein d’un groupe aéronaval, » elle dispose de 2 hélicoptères WG-13 Lynx) n’ayant ce jour-là pas lancé de Lynx, seuls des Dauphins ont été vus, le premier vers 09:20 le matin  et le second vers 13:10.  On a donc affaire à des hélicoptères anglais venus de Culdrose : la base est ce jour-là à l’entraînement et entre 08:30 et 17:00. Ce jour là seront aperçus jusqu’à 5 Merlin, 3 Sea King Mk 5 et 2 Sea King Mk 7 qui ont pris part à cet entraînement.  Certains sont ceux de Chivenor , appelés après le naufrage.  Selon le magazine français « Complément d’enquête » l’hélicoptère ayant largué un plongeur « portait un dôme noir » au dessus de son fuselage.  Or ceux à dôme noir sont jaunes, ce sont les Sea-King de la RAF. Ceux, justement de Chivenor !



Le chalutier a été tiré vers le fond à une telle vitesse que l’air contenu dans ses cales en s’échappant d’un coup à fait imploser l’avant du navire (d’où l’aspect « pincé » de la carcasse remontée des fonds.  Or cela a aussi fait un bruit reconnaissable entre mille.  Et cela, un homme, très certainement présent sur le Primauguet, l‘a entendu. En 2011, Rue89 l’avait retrouvé, témoignant sous couvert d’anonymat.  Pour lui il ne pouvait y avoir de doute  : « Le Bugaled Breizh a coulé tellement vite que la cale de stockage du poisson a implosé avec la pression. Ce bruit a été entendu. Le son produit par l’implosion est très spécifique, c’est comme une aspiration rapide avec un claquement. Il est très reconnaissable, et on ne peut pas le confondre avec celui d’une explosion sous-marine, ou d’une motorisation. Pour qu’une cale implose si vite et si fort, il faut des critères de vitesse et de traction très élevée. Il n’y a qu’un sous-marin qui a pu faire ça. La marine l’a su dès le premier jour. »



Tout indique depuis le départ le Turbulent comme responsable et c’est ce qu’indique à nouveau ce témoignage  : « Ouest-France s’est procuré, en exclusivité, le témoignage d’un militaire embarqué à bord du Rubis, sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) français : « Au moment du naufrage, je me trouvais sur ce sous-marin, qui était bien en exercice dans la zone du naufrage. Nous devions effectuer des manœuvres avec l’un des sous-marins anglais. Au moment du petit-déjeuner, un message est arrivé à bord, nous informant que l’exercice était annulé suite à une avarie de notre partenaire du jour. Ce dernier avait déjà pris le cap de son port d’attache afin de procéder aux réparations ». Le 15 janvier 2004, jour du naufrage, un exercice franco-britannique est programmé sur cette zone, auxquels participent des sous-marins nucléaires d’attaque. Puis un second, le 16, dans le cadre de l’Otan.« Ce n’est que plusieurs heures plus tard que nous avons été informés du naufrage d’un chalutier français dans le secteur, poursuit le témoin. Le Rubis n’est pas impliqué dans cet accident, mais j’ai de gros doutes sur notre ’ami’ anglais…»




Le marin français évoque un sous-marin anglais qui a dû rentrer rapidement au port.  Or dès le lendemain 17, à la Chambre des Communes, on le nomme, et on évoque son retour, abîmé selon les sources officielles par un « câble remorqué »  (c’est une allusion aux sonars que traînent derrière eux les sous-marins : « l’HMS Turbulent a navigué de Plymouth le 16 janvier pour les essais près de Rame Head il a fait surface et est retourné à son quai d’attache ce soir-là, vu les dommages subis par un câble remorqué, alors qu’il menait ces essais ».  Outre le coup du câble, les députés anglais entendent donc le fait que c’est bien le Turbulent qui  été abîmé, et non un autre, et qu’il a fait surface… ce qui expliquerait aussi le largage d’un radeau de sauvetage, le sous-marin s’étant rendu compte de sa bévue et devant en ce cas assistance, selon le code de la marine.  Le radeau étant ensuite coulé par le plongeur largué d’hélicoptère, le sous-marin n’étant pas censé être là… lors des manœuvres…

Il n’y avait pas un mais deux radeaux de survie quand l’hélico est arrivé sur zone. L’un orange, celui sérigraphié avec le nom du “Bugaled”, et l’autre, un canot de survie rouge qui n’appartenait pas au
“Bugaled”. Il y avait aussi un hélicoptère gris venu d’on ne sait où. Dix témoins – dont l’équipage de l’“Eridan”, le chalutier français qui a reçu le SOS du “Bugaled” et qui s’est immédiatement rendu à son secours – affirment avoir vu cet hélicoptère et un radeau rouge.

La présence de ce mystérieux radeau rouge, sans immatriculation, sur la zone du naufrage démontre, qu’un équipage héliporté de la Royal Navy aurait assisté au naufrage, puisqu’il aurait balancé à la mer leur canot rouge pour tenter de sauver les rescapés du “Bugaled”. Il n’y avait pas un mais deux radeaux de survie quand l’hélico est arrivé sur zone. L’un orange, celui sérigraphié avec le nom du “Bugaled”, et l’autre, un canot de survie rouge qui n’appartenait pas au “Bugaled”.

Brian Hall, le plongeur anglais de l’unité de sauvetage en mer, qui a repêché deux des corps en pleine mer, a couvert la version de la Royal Navy.


Ce militaire se contredit sans cesse. Il affirme qu’il n’y avait qu’un seul canot de survie, de couleur rouge, quand son hélico est arrivé sur zone, et qu’il s’est emparé du tube étanche contenant les documents d’identification du radeau avant de le couler. Or, un enregistrement radio des Coast Guards anglais le trahit. On l’entend dire : “I see two lifeboats” [“Je vois deux radeaux de survie”], “I’m going on the first boat” [“Je fais route vers le premier”]. Les documents, retournés aux autorités françaises après moult demandes et par voie diplomatique, voudraient nous faire croire qu’il s’agit du canot du “Bugaled Breizh”. Sauf que le “Bugaled” n’avait que deux canots, orange, clairement immatriculés sur les boudins. L’un ne s’est pas gonflé et est resté coincé sur l’épave, et l’autre a été retrouvé avec une crevaison minime. Brian Hall affirme qu’il a poignardé d’au moins deux larges entailles le canot rouge et qu’il l’a vu couler... Je pense qu’il s’est fait hélitreuiller sur ordre, pour crever le canot jeté à la mer par l’hélico témoin de l’accident, puis s’est fait hélitreuiller sur le canot orange du “Bugaled”, afin de récupérer les vrais papiers d’“identité” qu’il a ensuite remis à la Navy. D’un tour de passe-passe, il a fait du “deux canots en un”.


Pour ce qui est du Turbulent, ce n’est pas seulement le vaisseau qui serait en cause, mais plutôt son commandant, comme j’ai déjà pu l’écrire : « le Turbulent anglais, qui n’est pas sans défaut technique et qui possède surtout un capitaine plutôt embarrassant  : celui qui fera échouer le nouveau fleuron des sous-marins anglais (l’HMS Astute) sur un banc de sable en voulant entrer au port. On s’attendait à le voir condamné pour un pareil manque de pilotage.

HMS Astute Royal navy


Pour certains observateurs, il avait évité la cour martiale en menaçant de révéler qu’il avait bien coulé le Bugaled en l’entraînant vers le fond.

C’était bien lui, Andy Cole, le capitaine au soir du 15 janvier 2004 : on le surnommait depuis longtemps « le lourdeau ». Le témoignage précisait que « peu après le naufrage du Bugaled Breizh, ce sous-marin anglais aurait envoyé un message, reçu par le Rubis, signalant qu’il était en avarie, et qu’il rentrait au port… » Le même commandant, devenu « Captain Calamity » après l’échouage de l’Astute, nouveau fleuron de la Navy,  mis en cause, rejettera l’accusation en demandant de « regarder vers le Rubis ».  Renforçant l’idée comme quoi ces deux-là jouaient alors au chat et à la souris dans moins de 100 mètres d’eau !  Le Secret Défense français s’expliquerait alors sans peine : le commandant anglais avait pris des risques incroyables, vu le manque de fond à cet endroit; mais il aurait été suivi par le Rubis.  Reconnaître la présence du Turbulent, c’est reconnaître la même prise de risque côté français.  Et ça, la Royale Navy ne peut le faire… ou ne pouvait, puisque le nouveau témoignage admet une présence française dans aussi peu d’eau…


Andrew Lawrence Coles de la Royal Navy
alias « Captain Calamity »
Commandant du HMS Turbulent le 15 janvier 2004







Un jeu qui aurait mal tourné, le Turbulent tentant d’échapper à un moment à la poursuite du Rubis.  En effectuant une manœuvre qui aurait très bien pu être une violente marche arrière, qui accréditerait des dégâts tels que ceux que l’on a pu constater sur une photo, malencontreusement mise en ligne par la Royal Navy pour illustrer son activité sous-marine.  Ce cliché que je me suis empressé  de sauvegarder et de vous montrer, après avoir pris le soin de le transmettre à maître Dominique Tricaud, l’avocat des familles du Bugaled Breizh.  On y distingue un kiosque particulièrement abîmé à l’arrière, les tuiles anéchoïques arrachées révélant un dessous blanc ou en acier, pouvant être la trace du ripage de câbles de funes d’un chalutier, ou en tout cas les tracs d’un contact violent sur une surface étendue.  Une trace de câble, mais pas celui d’un sonar remorqué.  La Navy a peut-être bien commis une erreur monumentale en laissant filer cette photo.  Le submersible été retiré du service depuis et la photo illustre toujours son retrait du service, toujours nichée au fond d’un article de la BBC…

la voici :





La Royal Navy semble abonnée depuis des années aux incidents d’ordre divers. Le 20 juillet 2016, l’un des successeurs du Turbulent, l’HMS Ambush, de nouvelle génération, tout récemment commissionné, commandé par Alan Daveney est entré en collision avec un navire marchand devant Gibraltar.. l’engin était pourtant réputé posséder à bord des « capteurs de qualité issus des fabricants leaders mondiaux ».



L’image du kiosque fort abîmé du sous-marin renforce l’idée d’une marine anglaise bien aventureuse, et pas trop capable de maîtriser ces engins, ou qui prend des risques inconsidérés.  Pour ce qui est du tanker ou du cargo tamponné… on n’en sait pas davantage : on lui a demandé de se faire discret, visiblement.  On va finir par croire que les sous-mariniers anglais ont perdu la main : l’année précédente, l’HMS Talent (de la classe Trafalgar lui aussi) en avait eu pour 1/2 million de livres de réparations après avoir heurté « un iceberg » dans une chasse au sous-marin russe.  La encore c’est son kiosque qui avait le plus souffert.




L’occasion de rappeler ici que ce genre de « collision avec de la glace » avait sacrément un air de déjà vu… l’excuse de « l’iceberg » étant une excuse bien connue… depuis des décennies !

Nota : il faut que d’autres langues se délient, et c’est pourquoi l’armateur a lancé hier un appel aux marins qui pourraient savoir quelque chose. En ce moment même, une juge anglaise est en train de réexaminer le dossier.  C’est le moment de témoigner.  Ou de libérer sa conscience.  Les familles des marins décédés attendent toujours cela.  Depuis plus de 14 ans…

à «Yves Gloaguen, Georges Lemetayer, Patrick Gloaguen, Pascal Le Floch, Eric Guillamet»

TF121