Vladimir Poutine a fait état des avancées russes en matière d'armement dans un discours devant le Parlement, envoyant un message clair à l'adresse de Washington : il est temps de considérer Moscou comme un partenaire d'égal à égal.
«Ecoutez-nous maintenant» : dans son discours devant le Parlement russe le 1er mars, Vladimir Poutine a envoyé un message clair aux Occidentaux et particulièrement aux Américains, pour leur signifier que les avancées militaires russes rebattaient les cartes en termes diplomatiques.
Le président russe a en effet longuement insisté sur les nouveaux systèmes balistiques développés par Moscou – vidéos de présentation à l'appui – assurant que «rien de tel [n'existait] chez personne dans le monde». Au terme de la présentation, Vladimir Poutine a rendu hommage aux hommes qui composent l'armée, expliquant que cet arsenal, aussi sophistiqué soit-il, ne servirait à rien si la Russie n'avait pas à son service les meilleurs soldats et officiers du monde, citant en exemple le pilote Roman Filipov, récemment abattu en Syrie et qui s'est fait sauter une fois attrapé par les rebelles.
Une démonstration de force dont le but était de faire comprendre à Washington que la Russie a rétabli l'équilibre militaire et qu'elle est aujourd'hui un interlocuteur qu'il est désormais impossible de négliger.
En effet, selon le maître du Kremlin, après la chute de l'URSS qui avait placé la Russie dans une position de faiblesse, les Etats-Unis étaient persuadés de pouvoir garder une supériorité militaire totale avant que Moscou ne se rétablisse. Pour y parvenir, Washington a tenté au cours des 15 dernières années «d'obtenir des avantages unilatéraux sur la Russie», en imposant «des restrictions et sanctions illégales du point de vue du droit international». «Tout ce que vous avez tenté d'empêcher et de bloquer en appliquant une telle politique s'est déjà réalisé», a lancé le chef d'Etat, précisant que la Russie n'avait «pas pu être contenue».
S'il a notifié sans ambiguïté à Washington l'échec de sa politique et la volonté de voir son pays traité sur un pied d'égalité, Vladimir Poutine a tenu à souligner que le développement de cet arsenal militaire à la pointe de la technologie avait été conçu pour «garantir la paix dans le monde».
Dans son discours, le président russe a en outre fait part de son inquiétude quant à la doctrine nucléaire des Etats-Unis, qui se sont déclarés prêts à riposter avec l'arme atomique même en cas d'attaque conventionnelle. En guise de réponse, Vladimir Poutine a affirmé que Moscou n'envisageait d'utiliser son arsenal nucléaire qu'en cas d'attaque du même type, envers la Russie ou ses alliés, ou de destruction massive. Dans ce cas de figure, le président russe n'a laissé plané aucun doute sur la riposte de Moscou : elle sera «immédiate et proportionnée».
«Il s'agit de systèmes russes d'armement stratégique dernier cri que nous développons en réponse à la sortie unilatérale des Etats-Unis du traité ABM [Anti-Ballistic Missile] et au déploiement de ce système [ABM], tant sur le territoire des Etats-Unis qu'au-delà de leurs frontières nationales».
«Nous ne violons [aucun traité] et la puissance accrue de la Russie ne menace personne», a enfin conclu le chef d'Etat.
Poutine veut améliorer «le bien-être» des Russes
Vladimir Poutine a promis jeudi d'améliorer le niveau de vie des Russes et de diviser par deux un niveau de pauvreté jugé «inacceptable». Le président s'exprimait devant le parlement russe à moins de trois semaines de la présidentielle, dont il est le grand favori.
Il a débuté son adresse annuelle devant le législatif en insistant sur la nécessité d'améliorer «le bien-être» de la population et d'investir dans les infrastructures et la santé pour éviter à la Russie de prendre du «retard», ce qui constitue selon lui son «principal ennemi».
20 millions de pauvres «Les prochaines années seront décisives pour la vie du pays», a insisté M. Poutine. «Nous devons résoudre une des tâches clés de la prochaine décennie: pourvoir une croissance certaine et à long terme des revenus réels des citoyens et réduire en six ans par deux le taux de pauvreté», a-t-il déclaré devant le parlement à Moscou.
Il a souligné que le nombre de personnes confrontées à la pauvreté dans le pays était passé de 42 millions en 2000 à environ 20 millions actuellement. Ce niveau est cependant reparti à la hausse lors de son dernier mandat, marqué par la récession économique.
M. Poutine a mis l'accent sur l'importance des avancées technologiques afin que son pays ne reste pas sur le bord du chemin de la «révolution technologique». Le président russe, aux commandes depuis plus de 18 ans, est candidat pour un 4e mandat de six ans à la présidentielle du 18 mars, qu'il devrait remporter largement faute d'opposition réelle.
Malgré les promesses de campagne lors de son retour au Kremlin en 2012, son dernier mandat a été marqué par une chute du niveau de vie et une progression de la pauvreté, conséquence de la flambée des prix causée entre 2014 et 2016 par la chute des cours du pétrole et les sanctions occidentales liées à la guerre en Ukraine.
Pollution à éradiquer
Il a également dit vouloir lutter contre la «neige noire», l'eau non potable et le «smog» qui affecte les Russes à cause de la pollution. M. Poutine a même averti qu'il n'existait «aucun endroit où se réfugier».
«Il est difficile de parler d'une vie longue et en bonne santé quand des millions de personnes doivent boire de l'eau qui ne correspond pas aux normes, quand tombe de la neige noire, comme à Krasnoïarsk, et quand les habitants de grands centres industriels ne voient pas le soleil pendant des semaines à cause de la fumée», a-t-il lancé.
A partir de 2019, «300 entreprises industrielles qui ont un impact négatif important devront respecter l'environnement», a-t-il indiqué. Il a assuré avoir «déjà renforcé les exigences écologiques pour les entreprises afin que diminuent les déchets industriels. A partir de 2021, toutes les entreprises présentant un grand risque pour l'environnement devront le faire», a conclu M. Poutine.
La Russie est régulièrement frappée par des accidents industriels, qui colorent parfois les rivières ou provoquent des neiges noires, comme à Krasnoïarsk, une ville industrielle située en Sibérie.
Des zones écologiques fragiles, comme le lac Baïkal, classé au patrimoine de l'Unesco, sont aussi en péril. En août, le président avait déjà sonné l'alarme, dénonçant l'ampleur de la pollution touchant le lac le plus profond de la planète et le plus grand d'Eurasie.