Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

jeudi 8 février 2018

Que font encore les Américains en Syrie ?


L'objectif de destruction de l'EI, avancé par Washington pour justifier sa présence en Syrie, ayant été atteint, le ministre russe des Affaires étrangères se demande ce que fait encore sur le sol syrien l'armée américaine. Et propose une réponse.

«Il est très probable que les Américains désirent diviser la Syrie», a déclaré sans ambages le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, le 7 février, lors d’une conférence à Sotchi, en Russie. «Ils ont tout simplement renoncé à leurs déclarations selon lesquelles leur présence en Syrie […] était destinée à vaincre l’Etat islamique et les terroristes. Maintenant, ils affirment qu'ils y maintiendront leur présence, jusqu'à ce qu'ils s'assurent qu'un processus stable de règlement politique en Syrie commence, en vue d'un changement de régime politique», a-t-il poursuivi.

Par ailleurs, Sergueï Lavrov a averti que le financement américain des groupes rebelles armés de l’Armée syrienne libre (ASL) et des forces démocratiques syriennes (FDS, coalition incluant des combattants des YPG kurdes) pouvait avoir «des conséquences très dangereuses».

Ces propos font écho à ceux que le chef de la diplomatie russe avait tenus, le 19 janvier dernier, lors d'un point presse au siège des Nations unies à New York, au sujet de la crise d'Afrin. Sergueï Lavrov avait alors déploré l'implication de Washington «dans la création d'entités gouvernementales alternatives sur de vastes pans du territoire syrien». «A présent [que Daesh est défait, les Etats-Unis] ont d'autres projets à long terme», avait-il déclaré.

Les Etats-Unis comptent près de 2 000 soldats actuellement stationnés en Syrie – une présence militaire qui devrait être prolongée, selon le secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson. «Il est crucial, pour notre intérêt national, de maintenir une présence militaire et diplomatique en Syrie», avait-il déclaré mi-janvier. Il est à noter que Damas n'a jamais accordé son autorisation au déploiement de ces militaires américains, sur son propre territoire.

100 membres des forces pro-Assad tués par la coalition

Plus de 100 combattants des forces pro-gouvernementales syriennes ont été tués lors d'un accrochage avec les forces de la coalition internationale sous commandement des Etats-Unis. Selon Washington, ils attaquaient les forces démocratiques syriennes (FDS).

«Dans une nouvelle agression (...) les forces de la coalition ont visé les forces populaires» dans la province de Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, a affirmé la télévision d'Etat syrienne, dans une apparente allusion aux groupes paramilitaires alliés au régime. Elle a fait état de la mort de dizaines de combattants.

Cette opération menée dans la nuit de mercredi à jeudi a été déclenchée par une attaque du régime contre des positions des Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance arabo-kurde alliée de Washington dans la lutte antijihadistes. Ces frappes interviennent sur fond de tensions croissantes entre Damas et Washington, les Etats-Unis accusant le régime d'avoir utilisé des armes chimiques.

«Nous estimons que plus de 100 membres des forces prorégime syriennes ont été tués alors que des affrontements (avaient lieu) avec les Forces démocratiques syriennes et les forces de la coalition», a déclaré jeudi un responsable militaire américain.

Environ 550 soldats

Les FDS et la coalition répondaient à une «attaque (...) contre le quartier général des Forces démocratiques syriennes», a-t-il affirmé. Il a expliqué qu'entre 20 et 30 obus de chars et d'artillerie étaient tombés à environ 500 mètres de ce quartier général. La coalition a riposté avec des tirs d'artillerie et des frappes aériennes. Environ 500 hommes de la coalition sont engagés dans cette riposte, a précisé le responsable américain.

Les combats ont eu lieu à huit kilomètres à l'est d'une ligne de démarcation fixée par la Russie et les Etats-Unis le long de l'Euphrate, les forces russes opérant à l'ouest et les forces américaines à l'est. «Les responsables de la coalition ont été régulièrement en contact avec leurs homologues russes avant, pendant et après» les frappes, a ajouté le responsable.

Il n'a pas précisé si les combattants prorégime tués dans cette riposte étaient des Syriens ou bien des étrangers engagés dans une des milices pro-Assad constituées notamment de volontaires libanais et irakiens. L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie, a fait état d'un bilan de 20 morts dans les rangs des forces prorégime.

«Les forces du régime ont frappé à l'artillerie des positions des FDS dans plusieurs villages ainsi que qu'un champ pétrolier», a précisé le directeur de l'OSDH Rami Abdel Rahmane.

Sommet Turquie-Russie-Iran

Sur le plan diplomatique, les présidents russe Vladimir Poutine et turc Recep Tayyip Erdogan sont convenus lors d'un entretien téléphonique jeudi d'organiser prochainement à Istanbul un sommet Turquie-Russie-Iran consacré à la Syrie, selon des sources à la présidence turque.

La Russie et l'Iran, qui soutiennent le régime de Bachar el-Assad, et la Turquie, qui appuie l'opposition, avaient tenu un premier sommet trilatéral dans la station balnéaire russe de Sotchi en novembre dernier.

Lors de cette rencontre, M. Poutine avait rallié M. Erdogan et le président iranien Hassan Rohani à l'idée d'organiser une réunion entre représentants du régime et de l'opposition en Syrie. Celle-ci s'est tenue le mois dernier, sans produire de résultat concret.

Si elles soutiennent des camps opposés en Syrie, la Turquie et la Russie ont renforcé ces derniers mois leur coopération sur ce dossier dans le cadre d'un réchauffement de leurs relations après une grave crise diplomatique fin 2015.

Selon les sources présidentielles turques, MM. Erdogan et Poutine sont par ailleurs convenus lors de leur entretien d'«accélérer» l'installation de nouveaux postes d'observation dans la province rebelle d'Idleb (nord-ouest de la Syrie), dans le cadre d'une «zone de désescalade» visant à réduire l'intensité des affrontements.

AFP