Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

lundi 20 novembre 2017

« El Chapo » et les avions 8


Le laxisme mexicain sur les propriétaires d’avion est évident.  Equivalent à celui de la FAA aux USA, en tout cas !  C'est l'histoire d’un propriétaire d’avion ayant fait deux années de prison, aux Etats-Unis en prison fédérale après une condamnation de 2005 pour avoir l’année précédente acheté des avions au Mexique et en 2004 pour avoir commis des fraudes impliquant des aéronefs, puis pour les avoir revendus aux États-Unis en falsifiant leurs livres de bord.  L’homme avait recommencé dans le même domaine dès sa libération et son extradition en 2007.  Son histoire s’est terminée en tragédie, par un crash d’un de ses avions piloté par une personne bien trop âgée, tuant une chanteuse connue en tournée.  Mais auparavant, il avait défrayé la chronique… politiquement, dirons-nous, puisque l’on arrive avec lui en Libye chez… Kadhafi.

Le cas emblématique de Starwood Management


A Toluca de Lerdo aussi, on trouve ainsi de drôles de jets, qui ne servent pas nécessairement au transport de drogues, mais à celles de « personnalités ».  Tel le LXB-RYP (ici en 2010), un Hawker 600A vu ici sur l’aéroport de Princess Juliana International à Philipsburg, à Saint-Martin, dans les Antilles néerlandaises, comme ici à Barcelone le 18 juillet 2011 et là en février 2001 à Los Angeles.  En 2011, il a en effet été très affairé.

Car  cet avion, enregistré chez Starwood Management, installé à Las Vegas, est la propriété de l’industriel Christian Eduardo Esquino-Nunez, suspecté par la DEA d’appartenir à un gang ultra violent de Tijuana, et il aurait été loué par ce même Esquino à trois canadiens dont Cynthia Vanier, liée au groupe Lavalin SNC… qui avaient tenté d’extraire de Libye un des fils de Kadhafi, Saadi en l’occurrence, lors de la débâcle du pouvoir libyen. 

Ayant révélé le deal de Lavalin, société en charge de la mise à niveau de l’aéroport de Benghazi, un projet à 500 millions de dollars signé en 2008, Vanier avait été débarquée vite fait bien fait par sa société.  SNC Lavalin avait un autre projet dont elle était moins fière, avec Kadhafi :  la construction d’une gigantesque prison à Guryan, estimée à 275 millions de dollars. Avec la découverte de cet étrange accord, on découvrait que Lavalin avait même proposé en 2008 la vice-présidence Maghreb du groupe au fils Kadhafi, lui assurant un salaire de salaire de 150 000 dollars pendant 3 ans !!!  Selon le vice-président de Lavalin, c’était un juste retour des choses, un bakchich classique chez les Kadhafi:  « Ben Aïssa affirme que Kadhafi avait rendu de « précieux services » à SNC-Lavalin en 2001 et 2002 pour lui permettre de décrocher un contrat de 475 millions de dollars pour l’opération et l’entretien de l’usine de fabrication de tuyaux de Sarir, en Libye« .


L’affaire de l’aéroport de Benghazi avait été un vrai fiasco industriel :  « SNC-Lavalin Montréal est une grosse entreprise réputée à travers le monde.  Malheureusement, ceux qui étaient chargés de construire l’aéroport de Benghazi provenaient de SNC-Lavalin Tunis, qui n’a pas la même réputation.»  Dirigée par Anis Mahmoud, l’équipe tunisienne responsable du chantier faisait preuve d’un manque flagrant d’expérience et de compétence «à tous les niveaux de l’organisation», selon M. Beitelmal. «Je ne sais pas comment le siège social au Canada a pu permettre que cela se produise, étant donné sa réputation dans le monde de la construction, mais ce qui se passait à Benghazi était une sous-estimation ridicule des compétences des Libyens et de leurs capacités à distinguer les bonnes performances des mauvaises», tranche M. Beitelmal.  Russell Brown, un consultant en génie mécanique qui a supervisé une partie des travaux avant d’être remercié par SNC-Lavalin, affirme que les «Tunisiens» confiaient des contrats de sous-traitance à leurs proches, alors que ces derniers n’avaient pas les qualifications requises ».

Arroser la famille Kadhafi, dans l’espoir d’un retour juteux


Brosser le fils de Kadhafi dans le sens du poil dans l’espoir d’obtenir des contrats avait mené SNC-Lavalin bien loin, ce qui lui avait été promis : « par exemple, SNC-Lavalin avait transféré 11,4 millions d’euros et 1,65 de  German Marks,  sur un compte bancaire à Malte.  Les fonds ont ensuite été transférés sur des comptes à Genève, Milan et Malte détenues par une société appelée Dorion Business Co., Ltd, qui était contrôlée par M. Kadhafi. Le transfert était étiqueté, « Commissions de consultants rémunérés par la Société canadienne de S & C Lavalin. »  Les gains « ont servi à acheter des yachts pour le bénéfice de Saadi Kadhafi », dit la note interne.  Un des bateaux, l’Hokulani, est un superyacht de 45 mètres avec deux suites VIP, un jacuzzi, une salle de divertissement avec une télévision à écran plat et l’hébergement pour 10.  Il a récemment été mis en vente au USA pour 28,5 millions de dollars.  SNC-Lavalin a aussi dépensé 200 000 dollars pour décorer la suite penthouse de M. Kadhafi à Toronto, et M. Roy a payé les frais d’entretien sur la propriété, selon le GRC.  La société s’est chargée de la sécurité, de l’hospitalité et d’un jet privé lorsque M. Kadhafi a visité le Canada ».  Chez les Kadhafi, on le sait, tout se payait… ou plutôt, tout se faisait offrir !

Des commissions occultes à gogo


L’opération de sauvetage du fils Kadhafi avait tourné au final elle aussi au fiasco.  Le Financial Post n’avait pas hésité à l’occasion faire le procès de Riadh Ben Aissa, citoyen canadien mais aussi tunisien (d’où les ouvriers de l’aéroport).  Le pot aux roses financier avait ainsi été décrit : « ces commissions occultes, étaient payées à Saadi par M. Ben Aissa en contrepartie de certains contrats libyens attribués à SNC.  Selon les autorités suisses, des dizaines de millions de dollars de plus déplacés à travers les propres comptes suisses de M. Ben Aïssa, à partir de septembre 2001 à mars 2011.  L’argent provenait de SNC ».  Saadi, réfugié au Niger a été transféré en 2014 en Libye, où il attend depuis d’être jugé.  Ancien footballeur d’opérette, poussé en avant en Italie par Silvio Berlusconi, quel hasard, un temps petit ami du mannequin Vanessa Hessler (mademoiselle Alice, sur les pubs), mêlé à des fiestas douteuses, il est depuis longtemps cocaïmane, ce que tout le monde savait. Selon Wikileaks, en réalité il était surtout bisexuel, ce qui donnait du sel à son ex-statut de footballeur ! Tout cela pour mener grand train de vie.  Lors de ces fameuses soirées, Mouatassim Kadhafi, un autre fils de Kadhafi (tué en Libye après avoir  été fait prisonnier vivant) avait engagé des prostituées auprès du vénézuélien Félix Farias, travaillant pour Elie Nahas, d’origine libanaise, sous le couvert d’une agence de mannequins.  Un scandale qui touchait le monde du festival !!!  Certaines avaient lieu au Carlton de Cannes et d’autres sur le yacht libyen baptisé « Che Guevara II«  (Photo ci-dessus à Malte) !!!

Un phénomène historique, chez Esquino


Si l’épisode Kadhafi était récent, les liens de la famille d’Eduardo Nunez Esquino avec les grands trafiquants de drogue ne dataient pas d’hier.  Et ils ont aussi passablement mis à mal la vie politique du Mexique, en mêlant les politiciens à leur jeu, comme l’explique si bien Daniel Hopsicker: « pour la présidence mexicaine en 1994 (et avant son assassinat) le candidat du PRI Donaldo Colosio avait utilisé un avion (un Sabreliner SC 80) dont le propriétaire était Amada Carrillo Fuentes.  Cependant, il a été signalé (il a été signalé) par un journaliste de la ville de Mexico nommé Juan Ruiz Healy, qu’il avait des liens avec les frères Esquino-Nunez de Monterrey.  Colosio avait ses avions fournis par les baron de la drogue via une «société» appelée Air Siesta, Inc.  Située à l’aéroport de Meacham à Fort Worth, au Texas (puis après à MCallen, Texas), détenue par le frère d’Ed Nunez, Salvador Esquino-Nunez (décédé également) ».   L’avion incriminé était le XA-RLP.  Il appartenait de fait à Sonia Barragán Pérez, la  propre femme d’Amado Carrillo Fuentes !!!


Ici, le Sabreliner 75A N11887, ex LV-WYD, ex N75S chez Air Siesta Inc, qui n’est autre que le fameux XA-RLP, d’Aero Horizontes S.A, avant qu’il ne devienne Air Siesta (certains évoquent un XA-RLR, plutôt).  L’avion finira sur le ventre le 30 avril 2008, sur l’aéroport de Venustiano Carranza, en provenance… de Toluca, train avant rentré… Colosio n’avait pas pu accéder à la présidence, il avait été assassiné à Lomas Taurinas le 23 mars 1994, d’une balle à bout portant de .38 Taurus en pleine tête et une autre dans le ventre, en pleine sortie de meeting électoral.  L’assassinat avait été filmé de bout en bout.  L’assassin, présenté comme un loup solitaire, donnera 18 versions différentes de son méfait.  En fait, on se dirige depuis plusieurs années d’enquête sur un assassinat commandité par le parti PRI lui-même, à savoir le président Carlos Salinas de Gortari, et son chef de cabinet,assassinat colosio Jose Maria Cordoba Montoya qui en auraient été les instigateurs.



Après le décès, en effet, d’autres meurtres laissent présager d’un complot mené en haut lieu :  Joseph Federico Benitez Lopez, directeur de la sécurité publique à Tijuana, qui menait une enquête parallèle sur l’assassinat est ainsi tué par une bombe le  28 avril 1994, et le 17 avril 1996, Arturo Ochoa Palacio, délégué du PGR (le Procureur général de la République, équivalent du Garde des Sceaux en France) est lui aussi  tué à Baja California, or c’est celui qui avait demandé à examiner de plus près les copies des différentes bandes enregistrées de l’assassinat.  Pour certains, le second coup de feu au ventre était celui d’un second tireur… (la balle aurait été différente). 

Et il aurait été tiré après, alors qu’on emmenait le corps dans une camionnette, selon un autre théorie encore.  Le président Carlos Salinas De Gortari, on le retrouvera dans une autre histoire de coke, avec un autre avion.  C’est avec De Gortari que le pays a vraiment sombré, pour devenir le champ de tirs actuel des cartels de la drogue.  Carlos Salinas de Gortari était réapparu aussi lors d’une affaire de vente d’une mystérieuse  villa située dans la station balnéaire de Tulum Quintana Roo, au Mexique.  En 1994, la rumeur voulait en effet qu’elle appartienne à la famille de l’ancien président, alors que rien vraiment ne le prouvait.  Une immense villa appelée Casa Magna  qui sera saisie par  le bureau du procureur des États-Unis en 1997, au prétexte que c’était une maison de narco-trafiquant.  Car au départ, cette immense villa aurait appartenu à « à une femme inconnue, venue de l’état de Sinaloa ».  Et en réalité, elle avait été édifiée très certainement par Pablo Escobar dont l’inconnue était le prête-nom.  Les murs très épais (la villa ressemble aussi un peu à un bunker !) avaient été conçus à l’épreuve des balles, paraît-il !!!


« A cette époque, Escobar était lié au trafiquant de drogue mexicain Amado Carrillo « Le Seigneur du Ciel », un chef du cartel de Juarez, qui était responsable du déplacement de la cocaïne de la Colombie aux États-Unis, il n’est donc pas surprenant que Escobar ait souhaité avoir une propriété avec vue sur l’océan sur la péninsule du Yucatan » peut-on lire. »  Après un abandon de trois ans, le service de l’administration fiscale, responsable de la perception des taxes, a cédé la propriété (en 2005) à la société Amansala, S.A. de C.V., de Melissa Glee Perlman et Erica Joy Grace, de Sacramento, en Californie qui lui a donné le nom de « Casa Magna Amansala Eco Chic Resort ».  Cela a duré jusqu’en 2008 lorsque le ministère des Finances a déterminé qu’une femme du Sinaloa, appelez Sandra Eufrocina Chavez Vega, était la véritable détentrice de la propriété selon son représentant légal, un avocat de Jalisco nommé Carlos Gonzalez Nuño ».  Au temps d’Escobar, c’est une dénommée Fanny Barrera Coartas, identifiée ainsi dans les rapports du PGR comme étant en relation avec Cartel Medellin, qui avait en effet supervisé les travaux de construction de « Punta Piedra« , le premier nom de l’édifice.  En 2002 avaient été arrêtés trois Colombiens au Costa Rica en train d’acheter un arsenal de guerre d’une valeur de 25 millions de dollars, en offrant de la cocaïne en échange.  Celle qui est derrière cela et qui à Mexico jouait alors les reines de la jet set s’appelait Fanny Cecilia Barrera, qui est en réalité au service des paramilitaires auxquelles ces armes étaient destinées.  C’est Carlos Romero Ali Varela, un trafiquant d’armes ayant la double nationalité, colombienne et  vénézuélienne, qui était ce jour-là tombé dans un piège tendu par des agents du FBI, en compagnie de Barrera.  L’armement était destiné à Carlos Castaño !!!  La villa est devenue depuis un hôtel, appelé « Milamores ».

La mort de la chanteuse aux 15 millions de disques vendus

Esquino avait une autre lourde casserole derrière lui.  Il trainait même plutôt une batterie complète, à lire ce qui va suivre.  Le 9 décembre 2012, son Learjet N345MC s’était écrasé, avec à son bord l’opulente chanteuse Jenni Rivera et six autres personnes à bord.  Une chanteuse pesant ses 15 millions d’albums vendus.  L’avion avait plongé verticalement de 28000 pieds, s’écrasant presque à la vitesse du son !  Les restes du corps de la chanteuse (décapitée lors du choc) avaient été montrés au public, notamment un pied arraché et déchiqueté où l'on apercevait encore son vernis à ongles (?).


Là encore, l’avion n’était pas tout neuf, loin de là, et il avait été acheté 250 000 dollars seulement, le pilote, Miguel Perez Soto, étant lui âgé de  78 ans… Etrange vol et étrange affréteur !licence pilote Car Esquino avait derrière lui un sacré palmarès, comme avionneur :  il avait purgé auparavant deux années aux Etats-Unis (dans le pénitencier de Lompoc) pour des accusations reliées au domaine de l’aviation, justement, mais aussi bien avant encore pour celle d’avoir importé de la cocaïne en 1990 aux states (480 kilos, transférés par plusieurs appareils, ceux connus comme appartenant à Amado Carrillo Fuentes, connus comme “The Lord of the Skies”) !


Condamné en 1990 à cinq ans de prison, il n’en avait pas fait la moitié  : pour quelles raisons, le motif demeure fort obscur !!!  A l’époque, c’était surtout du trafic de marijuana, dirigée par Robert Castoro, qui n’avait pas hésité lui aussi à coopérer après son arrestation de 1988., comme d’ailleurs Damian Tedone, lui aussi repenti et absous…. Esquino était-il devenu informateur, beaucoup y songent pour expliquer une telle impunité… En haut le certificat du pilote, valable pour LR-JET et pour HS-125, en VFR seulement (pilotage à vue) retrouvé dans les débris.

Le Learjet, un avion certes capricieux



Certes l’arrivée sur le marché du Learjet a provoqué des bouleversements chez les pilotes habitués aux  « trapanelles à pistons ». Le prédécesseur de l’avion incriminé, le petit Learjet 23 avait provoqué une vraie révolution à son arrivée en 1963.  Et avait aussi augmenté le taux d’accidents :  sur les 100 construits, 29 en avait connus !!!  Relisons l’essai du modèle 24 en août 1967 par un spécialiste, Jacques Lecarme  qui indique ses difficultés propres de pilotage :  « le mariage roulis-lacet (dit Dutch Roll) devient plus important que les stabilités statiques.  Sa fréquence et son amortissement sont très difficiles à tenir dans des valeurs compatibles avec la réponse humaine dans tout le domaine vitesse, incidence, altitude et nombre de Mach, que peut parcourir un avion à gros écart de vitesse et à plafond élevé.  Par ailleurs, un homme sain et habile ne peut plus contrer ou amortir proprement une oscillation de période inférieure à une demi-seconde. Tous les avions à réaction, surtout les petits, ont donc des ennuis de ce côté.  La solution la plus commune est l’amortisseur de lacet (…) Même triste nécessité pour le décrochage.  Les profils minces et à bords d’attaque assez pointus, sont méchants à ce point de vue.  S’il y a de la flèche, le décrochage part des bouts, en arrière, et il y a matage ou auto-cabré.  Où, s’il y a flèche très forte, le décrochage est général, la portance devient exclusivement tourbillonnaire et l’on ne s’en aperçoit que par le taux de descente.  On doit donc descendre à pente modérée avec forte puissance et se poser plein moteur ».  Lecarme y ajoutant « une queue en T qui ajoute un sur-décrochage (ou décrochage bas) lorsqu’en régime tourbillonnaire, la queue se retrouve masquée par l’aile ».  Au total un avion plutôt délicat à piloter, donc, c’est une évidence.

Les magouilles d’Esquino

Après le crash de l’avion de la célèbre chanteuse, pour s’en défendre, Esquino était allé jusqu’à dire pour se disculper que l’appareil ne lui appartenait déjà plus, car l’avion venait juste d’être acheté par la chanteuse, et que le vol fatal avait été offert comme « test » !!!  Plus tard il évoquera une crise cardiaque du pilote (à son âge avancé, ça pouvait facilement passer).  C’était aussi un drôle d’avion:  en 2005, il avait raté son atterrissage à l’Amarillo International Airport au Texas, et avait dû subir des réparations conséquentes.  Il avait été loué alors par  Air America Jet Charter... à bord, les réservoirs d’essence de bout d’aile n’avaient pas le même poids, ce qui avait provoqué en partie l’atterrissage désastreux, l’avion étant devenu instable.  Dans les débris du crash de 2012, on avait ramassé l’autorisation de vol, qui montrait que seule le pilote plus âgé avait de l’expérience, le second étant complètement novice.  Ce qui n’avait pas empêché Esquino de se retrouver à la tête de deux jets américains caractérisés ici dans ce jugement du 10 juin 2014 comme étant « illégaux » :  « Esquino Christian Eduardo Nunez (ci-après « Eduardo Nunez » ou « Nunez »), est à la fois un citoyen du Mexique et un criminel condamné aux États-Unis, à qui en tant que tel est interdit, en vertu de la loi fédérale, de posséder ou d’enregistrer des aéronefs pour les faire voler aux États-Unis.


Responsable d’achats multiples par l’entremise d’entremetteurs de paille choisis pour dissimuler volontairement et déformer son implication, Nunez a été en mesure d’orchestrer la propriété et l’utilisation illégale de deux avions; le Grumman G-1159 de 1975, n° de série 157 et immatriculé N468HW et un avion de 1969, un Grumman G-1159 , n° de série 50 immatriculé N650KA aux États-Unis ».  Le premier étant hautement reconnaissable de loin… avec sa couleur verte et ses dés dessinés, de son propriétaire de 2007 (Night Flight LLC), vu ici à … Toluca.  Cet appareil passé lui aussi par Gulf Air Sales, détenu par Esquino en 2012 seulement, soit après ses déboires de l’affaire Kadhafi, appartient aujourd’hui à Ford Electric Co :  en 2013, déjà, il ne semblait plus en très bon état…

Esquino et son ami américain en affaires


Esquino était aussi en cheville avec Jay Knabb; patron de Pegasus Wireless, en réalité une cascade de sociétés fictives qui faisaient la cavalcade entre elles, via des achats et reventes d’actions, notamment ou des sociétés rachetées par Knabb dont il n’avait pas réglé les anciens propriétaires qui commençaient à lui faire des procès.  On pense à Bernard Tapie, bien sûr et à Jean-Marie Messier (les plus méchants évoquant la rapacité d’un Patrick Drahi.. qui embarque tout le monde dans le même gouffre financier).  Knabb après s’être engouffré dans la Wifi alors balbutiante, promettait déjà une nouvelle « technologie de pointe » à tout le monde avec le streaming à venir.  Il avait de l’entregent, et fan de guitares, avait même réussi à séduire Eric Clapton pour qu’il vienne faire la retape de ses technologies nouvelles.  Il promettait aussi 500 millions de dollars de ventes annuelles, avant qu’on ne s’aperçoive que tout était du vent dans ses projets et ses actes.  En réalité il avait derrière lui un lourd passé de délinquant financier; dont les traces avaient été effacées.  « En 1990, sa première entreprise, Software Exchange, avait déposé son bilan en Caroline du Nord.  Plus tard, le bateau de Knabb a été repris après que John Weible, un prêteur hypothécaire de Myrtle Beach, S.C., qui l’avait poursuivi en justice aux États-Unis.  Un tribunal de district de Caroline du Sud l’avait poursuivi pour non-paiement d’un prêt.  Mais à chaque fois il avait rebondi.  Selon  Weible: « C’était le kid Teflon! »  Au cours de cette période, Knabb a été arrêté pour fraude à l’assurance, selon la police de North Myrtle Beach, mais l’affaire a finalement été abandonnée.  Nous l’avons repéré sur le registre de Caroline du sud des délinquants sexuels connus » (…) Ce n’est pas la première fois qu’une société associée à Knabb a été poursuivie par un ancien actionnaire pour des raisons similaires.  Il suffit de demander Babak Dowlatshahi, qui, en 2000, a accepté de vendre à Fayetteville, N. C, un grossiste informatique à une société contrôlée par Knabb appelé BeachAccess, (« Accès à la plage »), qui avait fusionné en une société cotée en bourse appelée systèmes de biofiltration. Dans le cadre de l’accord, Dowlatshahi a reçu des actions.  Quand il a essayé de les vendre, il ne pouvait pas.



En 2001, il a intenté un procès en Caroline du Nord pour obtenir réparation.  Le différent a finalement été réglé.  La réponse de Knabb:  « Jay Knabb a été renvoyé de ce procès. »  « Dans le passé, les actions de deux sociétés Knabb – BIFS Technologies, anciennement biofiltration Systèmes et le sans fil Frontier – s’étaient effondrées ».  Le 8 juin 2012, Peter Knabb était condamné à 21 ans de prison pour fraude.  On estimait à 30 millions de dollars cette dernière !!!  Son trésorier Stephen Durland, recevant 2 ans et demi comme tarif.  Parmi les bien saisis, le Gulfstream II N412JI, un jet acquis pour 2.5 millions de dollars.  Par Aero-Marine LLC, une des nombreuses coquilles vides créées par Jasper.  Domiciliée à Draper, en Utah, fief des mormons comme on le sait !  Jasper Knabb a très certainement financé plusieurs appareils d’Esquino.  Lors de la condamnation de Knabb, des curieux font remarquer la disparité avec Esquino :  qui donc avait protégé autant le second et pourquoi donc ?

Une bien étrange impunité, après une lourde condamnation


La carrière d’Esquino est donc fort étonnante.  Car le parcours de ses multiples affaires de justice étonne, pour le moins, ainsi que leurs jugements successifs sans conséquences réelles sur sa carrière d’avionneur : « les documents de la Cour indiquent également qu’Esquino a été condamné à deux ans dans une prison fédérale après avoir plaidé coupable en 2004 pour avoir commis des fraudes impliquant des aéronefs avez acheté au Mexique, puis d’avoir falsifié les livres de bord des aéronefs et les avoir revendu aux États-Unis.  Toujours en 2004, un juge fédéral l’a condamné, lui et une de ses sociétés créancières, à payer une somme de 6,2 millions de dollars après avoir été accusé d’avoir omis de payer ses dettes à une banque.


Comme les années passaient, les ennuis d’Esquino ont augmenté.  Cette année, en février (2012),  XB-RRCun avion Gulfstream G-1159A du gouvernement d’une valeur de 500 000 dollars a été saisi par le US Marshals Service pour le compte de la DEA après son atterrissage à Tucson sur un vol originaire du Mexique.


Quatre mois plus tard, la DEA a dévoilé tous les dossiers de Starwood datant au 13 décembre 2007, y compris et les documents d’État de l’impôt sur le revenu, de l’information de banque de dépôt, les dossiers sur tous les actifs et la société de vente, et la relation d’Esquino avec plus d’une douzaine d’entreprises et les particuliers, y compris celle de l’ancien maire de Tijuana, Jorge Hank Rhon, un empereur du jeu, membre d’une des familles les plus puissantes du Mexique.  Les fédéraux soupçonnaient Hank Rhon  (ici en photo) d’être lié au crime organisé, mais pas une seule des allégations n’a pu être prouvée (1).  Il a toujours nié toute implication criminelle. »  L’avion saisi était assuré par la chambre de Commerce et d’Industrie de Tucson, qui ne pouvait ignorer le passé trouble de son propriétaire, relève le site Courthouse News Service… Bref, beaucoup savaient, qu’Esquino trafiquait depuis très longtemps… alors comment était-il arrivé à la tête d’une société dotée d’une demi-douzaine de Gulfstream, de 4 Hawker Siddeley 600, d’un bimoteur de taille moyenne, de plusieurs avions Dassault Falcon, de quelques Cessna bimoteurs et de Beechcraft King Air ????  N’était-il pas devenu à son tour le « roi du ciel », le successeur de Carillo Fuentes ???  Travaillait-il comme informateur pour la DEA ?  Ici  le N25GJ de Starwood effectuant un vol de Fort Lauderdale à Monterrey, Nuevo Leon,.  Le 6 février 2010.  L’avion deviendra ensuite … XB-RRC (il est photographié ici à Chino le 19 mars 2014).

Des soutiens cachés évidents


Des gens qui bénéficient de soutiens en haut lieu… au Mexique, donc.  L’un des hommes qui aurait pu découvrir le fonctionnement de Nunez Esquino selon certains observateurs était José Francisco Blake Mora, le secrétaire à l’intérieur du président Felipe Calderon (l’équivalent au ministre de l’intérieur chez nous), mais  il est mort avec 7 autres personnes dans un accident d’hélicoptère Super Puma survenu le 11 novembre 2011. Le même jour, Gabriela (Gabby) Cueto, l’homme d’affaires danois Pierre Flensborg, et un ancien officier de police mexicain Jose Luis Kennedy Prieto ont été arrêtés à Mexico dans l’affaire du retour présumé de Saadi Kadhafi au Mexique.  Cynthia Vanier avait été arrêtée la veille, également à Mexico. L’hélicoptère, piloté par un homme affichant 6501 heures de vol et d’un co-pilote, avait impacté le sol à vitesse normale, dans un secteur où le brouillard régnait.  Aucun problème mécanique n’avait été signalé.  Les ministres de l’intérieur mexicains portent la poisse, on serait tenté de le croire :  en 2008, c’est le Learjet XC-VMC, modèle de 1998, de Juan Camilo Mouriño Terrazo qui s’était écrasé en pleine capitale.  Pour les narcos; le décès de Mourino, tombait à pic… comme on peut le lire ici dans le reportage.  Celui-ci, qui luttait contre les cartels de la drogue, était en train de remonter toute la filière remontant… vers les plus hautes instances du pays.  Ce jour-là, dans l’avion il avait aussi l’ex-directeur de l’agence anti-criminalité du Mexique.

Un laxisme à tous les niveaux


Le laxisme mexicain sur les vols intérieurs est flagrant et s’applique à tous les domaines. Outre les jets sans aucune adresse valable, il y a aussi le problème des avions vétustes.  Le 20 septembre dernier on filmait l’atterrissage de nuit, sur le ventre d’un appareil cargo sur l’aéroport de Guadalupe International Airport.  Impressionnant, et sans faire de victimes une belle prouesse de pilotage.


On s’apercevait après que l’avion en difficultés était un antique Convair 340, XA-UNH, d’Aeronaves TSM, un ex-moteur à pistons devenu « hybride » et ayant subi il y a bien longtemps une greffe de deux turbopropulseurs.  L’appareil avait effectué son premier le 26 juin 1956 sous l’étiquette Swissair (HB-IMC).  Un avion de 61 ans d’âge !!!

Un avion… évaporé !


En 2010, Starwood Management avait acheté un HS-125-600A (N°256068) immatriculé N600AE à Air Eagle LLC. L’appareil, datant de 1976, mais en bon état, allait se rendre célèbre quatre ans plus tard, sous un autre propriétaire, il est vrai, Aircraft Holding Solutions llc Trustee, déclaré à Dover… dans le Delaware, le pays des inscriptions fantômes (on serait surpris de trouver qui se cache derrière, je parie).  Resté cinq mois sans voler dans un hangar près de la piste sud, il décollait à 22H42 heure locale le 11 septembre 2014, du Santo Domingo’s Las Americas International Airport en République Dominicaine pour un vol de routine vers Punta Cana.  Le problème, c’est que 10 minutes plus tard il ne donnait plus signe de vie :  l’avion venait d’être tout simplement volé.  Des radars le verront d’abord voler vers le Venezuela puis vers le Honduras.


Puis plus rien.  L’avion n’a depuis plus donné aucun signe de vie !  On en sait aujourd’hui un peu plus sur cette affaire :  c’est  un groupe « d’hommes d’affaires » du Honduras, de Mexicains, de Vénézuéliens et d’Américains qui étaient déjà venus le 11 juillet précédents pour assister à des combats de coq « dans un endroit inconnu » du pays.


Drôle d’explication. Qui ne passe pas vraiment auprès du responsable du DNCD, le major général Julio César Souffront Velázquez. Il a affirmé que « l’avion s’est envolé mercredi avec un plan de vol et, à environ 70 miles vers le sud, il a éteint son transpondeur.  Les deux pilotes ayant décliné leur nom à leur arrivée s’appelaient Fabio Urbina et Hector Rios ».


Le premier, on le retrouve comme pilote instructeur à Miami dans les catégories multimoteurs et même sur hélicoptère « Principal for Opa Locka Helicopters« !  A l’examen, on constate que le site Internet de la société est une coquille vide de plus (il affirme que « OPH is currently enrolled in a drug line testing program as part of its FAA certification requirement ».  Mieux encore quand on découvre l’adresse donnée sur le site pour la société d’hélicoptère : un site entrepôt, où l’on peut apercevoir des voitures et quelques… bateaux, qui jouxte l’aéroport d’opacité Locka.  A leur arrivée au Las Americas International Airport, les deux lascars avaient acheté pour 2000 dollars de kérosène pour leur jet.  Selon une source, la tour de contrôle radar AILA qui visualisait l’avion, l’avait perdu quelques minutes plus tard, il avait subitement disparu de l’écran, sans pouvoir communiquer avec lui, bien qu’elle ait essayé de contacter les pilotes par radio-communication.  

« Evidemment, l’en éteignant, et pour être clair, disons, en enfreignant la loi, il s’est dirigé vers le sud. Nous comprenons par là la direction du Venezuela » (…) « Jusqu’à présent, nous estimons que l’avion, s’il est allé au Venezuela, c’était pour se charger en drogues « , a-t-il dit.  Décrivant le mode de fonctionnement des avions effectuant des opérations similaires, il a indiqué qu’ils se rendraient en Amérique du Sud pour s’y poser et se rendre ensuite en Amérique centrale, d’où ils partiraient pour les États-Unis.  Autre information découverte depuis : « selon des informateurs, cet avion avait fait deux autres voyages en République dominicaine depuis le Venezuela et dans l’un d’entre eux il y avait quelqu’un très proche du président Nicolas Maduro et d’un général de la marine vénézuélienne ».  On songe bien sûr à Tarek El Assaimi. V oire à «  »El Pollo » Carvajal, qui a changé de nom depuis…. mais ça, ce sera pour d’autres épisodes, tant leur dossier est épais !

(1) et pourtant : le 12 mai 2015, Jorge Hank Rhon était là pour accueillir à sa sortie de prison, après 25 ans passés derrière les barreaux, Antonio Vera Palestina, son homme de main de l’époque qui avait assassiné avec son collègue Victoriano Medina le journaliste fondateur du magazine Zeta, Hector « El Gato » Félix Miranda.

ici les conversations de la tour avec le pilote du Learjet


TF121