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mercredi 15 novembre 2017

Attentats de Paris et Bruxelles; où en est l'enquête ?


La «kounya» Abou Ahmad est : Oussama Atar


Le prétendu émir a changé de visage

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Le commanditaire: un seul et même homme

Le Belgo-Marocain Oussama Atar, 32 ans, est considéré par les enquêteurs comme le coordinateur depuis la Syrie des attentats de Paris et Bruxelles.

Alors que la France a commémoré la mémoire des 130 victimes des attaques terroristes du 13 novembre 2015, l’enquête sur les attentats de Paris et Bruxelles progresse toujours dans l’ombre. Et vient de connaître une avancée significative : un commanditaire depuis la Syrie a été identifié.

Ce commanditaire, dont le nom de guerre Abou Ahmed apparaît plusieurs fois, pourrait avoir joué les premiers rôles. Il est soupçonné d’avoir missionné depuis la Syrie deux assaillants du Stade de France et le commando arrêté en Autriche.

Les enquêteurs ont aussi retrouvé dans un ordinateur, abandonné à Bruxelles, « des conversations entre un certain Abou Ahmed et des membres de la cellule » à l’origine des attentats de Bruxelles, portant notamment sur des modes d’action envisagés, d’après une source proche du dossier.

Abou Ahmed ou Abou Ahmad : les enquêteurs ne connaissent que son nom de guerre, mais ils soupçonnent cet homme d'avoir orchestré depuis la Syrie la venue en Europe de deux des kamikazes du 13 novembre et de deux autres jihadistes, probablement missionnés pour participer aussi aux tueries.

Les enquêteurs pensent que derrière le nom de guerre «Abou Ahmad», cité à plusieurs reprises dans les investigations, se cache Oussama Attar, 32 ans, un vétéran du jihad aujourd’hui membre de l’organisation Etat islamique, qui avait revendiqué les attentats du 13 novembre à Paris et ceux du 22 mars à Bruxelles.

L'homme intéresse au plus haut point les enquêteurs. Son numéro de téléphone, retrouvé dans la poche d'un des kamikazes du Stade de France et dans le portable d'Haddadi, est connu depuis plusieurs mois de la DGSI pour être lié au groupe État islamique (EI). Son numéro avait aussi été découvert dans le répertoire d'un proche d'Abdelhamid Abaaoud, organisateur présumé des attaques du 13 novembre, à l'occasion d'un coup de filet à Athènes en janvier 2015 lors du démantèlement de la cellule djihadiste de Verviers qui projetait un attentat en Belgique, d'après Le Monde.

«Il est le seul coordinateur depuis la Syrie à avoir été identifié en l’état des investigations», a précisé une des sources. Atar aurait été ainsi celui qu aurait recruté les deux Irakiens venus se faire exploser au Stade de France le 13 novembre et aurait été en contact avec les frères El Bakraoui, deux des terroristes islamistes belges auteurs des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles dont il est un cousin éloigné.

La «kounya» (surnom) Abou Ahmad est apparue dans l’enquête après l’interpellation, le 10 décembre en Autriche, de l’Algérien Adel Haddadi et du Pakistanais Mohamed Usman. Les deux hommes avaient débarqué le 3 octobre 2015 sur l’île grecque de Leros, parmi le flot de migrants, en même temps que les deux kamikazes irakiens du Stade de France.

Après des dénégations, Adel Haddadi a avoué qu’ils avaient été missionnés pour commettre des attentats à Paris et que le mystérieux Abou Ahmad avait organisé leur venue en Europe depuis la Syrie.

Le surnom Abou Ahmad est par ailleurs apparu grâce à l’exploitation d’un ordinateur abandonné dans une poubelle près d’une des planques utilisée par la cellule djihadiste en Belgique. Les enquêteurs ont exhumé des conversations dans lesquelles des membres de la cellule semblent s’adresser à Abou Ahmad en évoquant des testaments et des modes d’actions, selon une source proche de l’enquête. Dans d’autres messages, les auteurs des attaques lui détaillent leur projet, lui soumettent l’idée d’activer d’autres cellules en France, ou même de kidnapper des personnalités contre la libération de certains combattants

En août, la presse belge s’était déjà fait l’écho d’Oussama Atar comme possible « cerveau » des attentats de Bruxelles, sans que son rôle opérationnel soit détaillé. L’homme, détenu six ans durant dans une prison irakienne avant d’être rapatrié en Belgique en 2012 pour des prétendues raisons de santé, au terme d’une vaste campagne de mobilisation, a donc pris tout le monde à revers.

Les enquêteurs s'intéressent alors aux 198 migrants passés, comme eux, le 3 octobre par l'île de Leros et identifient rapidement Haddani et Usman qui se trouvent toujours dans le camp de réfugiés de Salzbourg, où ils sont arrêtés le 10 décembre. Usman est soupçonné d'être un artificier pour le groupe pakistanais Lashkar-e-Taïba (LeT) accusé par l'Inde d'être responsable des attentats de Bombay en 2008. Lui dit avoir voulu "venir en Autriche et vivre ici".

Un mandat d'arrêt européen devrait être prochainement délivré par les juges français afin que les deux hommes soient transférés en France, selon une source proche du dossier. Avec Salah Abdeslam incarcéré en France, la justice française aurait alors à sa disposition trois suspects-clés dans l'enquête sur les pires attentats de l'histoire de France.



L'artificier identifié

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Ce Syrien était l’artificier des attentats, le mentor de Najim Laachraoui.

Il serait le seul acteur important des attentats de Paris en fuite. Selon toute vraisemblance, celui qui est entré en Europe sous le faux nom d’Ahmad Alkhald - né le 1er janvier 1992 en Syrie - a en effet joué un rôle actif dans les attentats de Paris et, plus indirectement, dans ceux de Bruxelles. C’est lui qui aurait, avec Najim Laachraoui qui se fera exploser à Zaventem le 22 mars 2016, confectionné les gilets explosifs utilisés à Paris. Ce même Najim Laachraoui aurait sollicité, lorsqu’il contactait Raqqa au départ de Bruxelles, les conseils de ce Alkhald pour confectionner le TATP qui sera utilisé à Zaventem et à Maelbeek.

Un mandat d’arrêt européen et un mandat d’arrêt international ont été lancés contre lui. Son parcours entre la Syrie et la Belgique a été retracé mais on perd sa trace à Vienne, qu’il a rejointe et quittée le 16 novembre 2015, trois jours après le drame parisien.

L’inculpé qui a le mieux connu le soi-disant Ahmad Alkhald est vraisemblablement Osama Krayem, le Suédois arrêté le 9 avril, le même jour que Mohamed Abrini, "l’homme au chapeau".

Osama Krayem, qui aurait renoncé au dernier moment à se faire exploser dans le métro avec Khalid El Bakraoui, pense qu’Ahmad Alkhald serait originaire de la région d’Alep.

Krayem et Alkhald se seraient rencontrés sur le chemin des migrants en Macédoine. Leur trace passe par Ulm (Allemagne) où Osama Krayem a loué, sous un faux nom, deux chambres à l’hôtel Ibis.

Salah Abdeslam est venu les chercher là-bas le 3 octobre 2015. Abdeslam a ramené trois hommes en Belgique. Outre Krayem et Alkhald, il y avait aussi Sofien Ayari, le Tunisien qui sera arrêté avec Salah Abdeslam à Molenbeek quatre jours avant les attentats de Bruxelles.

Comme à chacune de ses missions de convoyage, Abdeslam avait emporté de fausses cartes d’identité belges. Alkhald en recevra une au nom de Yassine Noure, né le 18 août 1983.

En Belgique, sa trace se retrouve dans deux planques des terroristes qui frapperont à Paris : rue Radache, à Auvelais, louée par Najim Laachraoui, et rue du Fort à Charleroi, d’où partira, le 12 novembre, le "convoi de la mort" vers Paris. A Auvelais, il aurait notamment démonté une machine qui servira à la confection des explosifs.

L’ADN du soi-disant Ahmad Alkhald a été retrouvé sur deux des gilets explosifs qui ont été emmenés à Paris le 13 novembre : le gilet que Brahim Abdeslam a déclenché au comptoir Voltaire et le gilet sans dispositif de mise à feu, présumé défectueux, qui avait été abandonné par Salah Abdeslam à Montrouge.

Ahmad Alkhald avait cependant alors déjà vraisemblablement quitté la Belgique. Le 1er novembre 2015, il a été contrôlé par la police hongroise dans un train Vienne-Belgrade. Il avait déclaré venir d’Ulm et vouloir se rendre en Turquie. Sa trace s’est perdue le 16 novembre 2015 à Vienne, d’où il a pris un vol Vienne-Ankara (via Istanbul). Il aurait alors rejoint Raqqa, la capitale de l’Etat islamique, d’où il aurait aidé Najim Laachraoui à préparer les explosifs, en quantité bien plus importante qu’à Paris, qui seront utilisés à Bruxelles.

Les enquêteurs ont, en effet, retrouvé un fichier audio intéressant dans l’ordinateur abandonné par les kamikazes de Zaventem dans une poubelle de la rue Max Roos, à Schaerbeek.

Pour communiquer avec ses commanditaires à Raqqa, que ce soit pour faire rapport ou obtenir des consignes, Najim Laachraoui envoyait des fichiers audio via des canaux sécurisés et cryptés. Ce fichier a été envoyé entre le 15 février et le 15 mars 2016.

Najim Laachraoui demande à son contact de consulter un certain "Mahmoud". Ce Mahmoud serait Ahmad Alkhald. Les questions sont précises. Elles ont trait aux proportions à utiliser pour la confection du TATP.

Najim Laachraoui n’a pu obtenir dans le commerce que des produits aux concentrations moindres que celles qui sont requises. Il demande l’impact que cela peut avoir sur la confection. Il demande aussi des schémas électriques de commandes à distance et voudrait qu’on les lui envoie par vidéo ou, à défaut, sur dessin.

Il propose aussi que "Mahmoud" effectue des tests à Raqqa avec du TATP disposé en dessous de rails de chemin de fer. Ce qui laisse entendre qu’il a un moment envisagé de faire sauter des trains.

"Demande à Mahmoud qu’il fasse ça en dessous des rails chez vous là, à Raqqa, tu vois dans la périphérie de Raqqa, je me souviens il y avait des rails tu vois… ?"