Abdelkader Merah a été reconnu coupable d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, jeudi. Il a été condamné à 20 ans de prison. Il a en revanche été reconnu non coupable de complicité d'assassinats, soit le chef d'accusation le plus lourd. Il est par ailleurs reconnu coupable du vol du scooter en réunion. Il était jugé par la cour d'assises de Paris.
Son coaccusé Fettah Malki a lui aussi été reconnu coupable d'association de malfaiteurs et vol en lien avec une entreprise terroriste. Il écope de 14 ans.
Un jugement très attendu
Après cinq semaines d'audiences sous haute tension, marquées par les témoignages déchirants de proches de victimes, ce jugement était très attendu.
Les assassinats de Merah étaient les premiers attentats djihadistes commis en France depuis ceux du GIA algérien en 1995. Ils ont marqué l'avènement d'une nouvelle forme de terrorisme qui a depuis coûté la vie à plus de 240 personnes dans le pays.
Entre le 11 et le 19 mars 2012, Mohamed Merah avait abattu trois militaires, un enseignant et trois élèves d'une école juive dans les villes de Toulouse et Montauban, avant d'être tué le 22 mars par les forces d'élite de la police.
L'enjeu du procès était de déterminer le rôle exact joué par son grand frère Abdelkader, âgé de 35 ans, qui s'est présenté comme un musulman «orthodoxe» lors des débats. Il est accusé d'avoir «sciemment» facilité «la préparation» des crimes de Mohamed en l'aidant à dérober un scooter et à acheter un blouson utilisés lors des tueries. Il est également accusé d'avoir participé «à un groupement criminel affilié à Al-Qaïda».
«Nouveau visage» du djihadisme
A ses côtés comparaissait Fettah Malki, 34 ans, à qui il est reproché d'avoir fourni à Mohamed Merah un gilet pare-balles, un pistolet-mitrailleur et des munitions.
L'avocate générale, Naïma Rudloff, a appelé la cour à démasquer le «nouveau visage» du terrorisme. Celui qui entend «répandre l'islam par l'intimidation et la terreur» à travers «une idéologie totalitaire maquillée de religiosité».
«Abdelkader a fabriqué Mohamed Merah», a lancé la magistrate, qui a requis à son encontre la peine maximale encourue, la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une peine de sûreté de 22 ans.
Sur Fettah Malki, décrit comme «sans loi, sans foi, sans morale», elle a estimé que le délinquant avait vendu l'arme et le gilet pare-balles à Merah en connaissant sa radicalisation. Elle a requis contre lui 20 ans de réclusion criminelle assortie d'une peine de sûreté des deux-tiers.
La défense de Mohamed Merah a plaidé l'acquittement, demandant à la cour de juger «dans le respect du droit» et en constatant «l'absence de preuve» des assertions de l'accusation.
«Avez-vous apporté la preuve?»
Les avocats de Fettah Malki ont également demandé à ce que leur client soit jugé pour ce qu'il est et ce qu'il a fait et pas pour «une potentialité terroriste» avancée sans preuve par l'avocate générale.
«Avez-vous apporté la preuve qu'il était au courant des intentions criminelles de Merah? Non. Mon client n'appartient pas à ce monde-là», a répliqué l'un des avocats de Malki, Edouard Martial.
«J'affirme que si Abdelkader Merah est ici, c'est parce que son frère est mort et que si Mohamed Merah avait été vivant, il serait seul dans le box», a résumé de son côté l'un des avocats du principal accusé, Me Eric Dupond-Moretti. «Si vous condamnez Abdelkader Merah, vous aurez jugé sans doute mais vous n'aurez pas rendu justice. La justice sera morte ou bien gravement blessée car nous nous serons couchés», a-t-il ajouté.
L'avocat avait auparavant mis en garde la cour contre deux écueils à la sérénité de leur jugement: «Le chagrin des victimes qui emporte tout sur son passage» et «l'opinion publique, cette prostituée qui tire le juge par la manche».
AFP