Il est des cadeaux dont il vaut mieux s'abstenir. Le ministre israélien de l'Agriculture, Uri Ariel, l'a appris à ses dépens, pour le plus grand bonheur du Premier ministre russe, Dmitri Medvedev. Le 10 novembre dernier, Medvedev visite un institut agricole israélien, la Volcani Agricultural Research Organization, et s'amuse à piloter un drone télécommandé. Uri Ariel, emporté par l'enthousiasme du moment, décide d'offrir le précieux objet au Russe, selon l'AFP. Un geste fort regrettable. Tout d'abord, l'objet ne lui appartient pas. Il a été acquis par l'institut Volcani, dont les représentants ont assisté, médusés, à l'enlèvement de leur bijou qui vaudrait 50 000 dollars (près de 46 600 euros).
Mais ce n'est pas tout : ce don est surtout une incroyable bourde diplomatique. Car ce drone contenait des technologies américaines de pointe censées rester confidentielles. Les États-Unis, fous de rage, ont demandé des comptes à Israël. Mais le mal est fait.
Des conséquences « déprimantes et difficiles » (Institut Volcani)
Le drone serait un hélicoptère conçu par une entreprise espagnole Alpha Unmanned Systems pour transporter des caméras thermiques à infrarouge fabriquées par l'entreprise américaine Flir, capables de fournir des informations et des images sur l'apport réel en eau et les substances contenues dans cette dernière (telles que les pesticides) dans les récoltes et les arbres qui ont été irrigués, comme le raconte un brin goguenard le site de Russia Today, un site d'information russe proche de Poutine.
Une technologie exclusive, utilisée par Israël sous licence, qui ne peut être transférée à un tiers sans autorisation. D'autant qu'en ces temps de sanctions anti-russes prises par les États-Unis, tout transfert d'une technologie civile de pointe susceptible d'être appliquée dans le domaine militaire est interdit.
Selon Haaretz, le quotidien national israélien, la caméra du drone aurait toutefois été retirée de l'appareil, et la télécommande (d'une valeur de 13 000 dollars) n'aurait pas été remise aux Russes.
Mais cela ne suffit pas à enrayer les vives critiques dont fait l'objet le ministre israélien coupable du méfait, notamment celles de l'opposition, qui appelle à la démission d'Uri Ariel. L'institut Volcani a exprimé son désarroi dans un communiqué par la voix de Moshe Reuveni, qui représente les chercheurs de l'institut : « Le ministre Uri Ariel a à nouveau prouvé qu'il était aussi loin d'être un bon gestionnaire que le ciel est loin de la terre. Les conséquences directes et indirectes du geste du ministre sont tellement déprimantes et difficiles qu'il est dur de croire que cela se soit réellement produit. »
Du côté du ministère de l'Agriculture, on se défend comme on peut, par voie de communiqué également : « Le don de cet hélicoptère à la délégation [russe] a été fait en accord avec les professionnels concernés. Le ministère de l'Agriculture fera prochainement l'acquisition d'un nouvel hélicoptère afin que les activités de recherche puissent se poursuivre. » Et de préciser, selon Haaretz, qu'Israël n'a pas l'intention de demander à la Russie de rendre le drone. Donner, c'est donner.