Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mercredi 17 août 2016

Satellite quantique chinois : non, il n'est pas inviolable !


À chaque fois qu'une nouvelle technologie de sécurité arrive, on la qualifie d'inviolable. Puis, invariablement, elle est vaincue.



Depuis que la Chine a lancé mardi 16 août le premier satellite au monde devant utiliser la technologie quantique pour transmettre ses clés de chiffrement, un déluge de raccourcis s'est abattu sur nos écrans. "Inviolable" est le mot qui revient le plus souvent : avec son nouveau système de sécurité, ce satellite serait impossible à pirater, il serait in-vio-lable. Rien que cela. De quoi jeter à la poubelle la bonne vieille loi d'Internet, selon laquelle tout ce qui est connecté est piratable ? Sûrement pas ! Cette sécurité sera vaincue, comme toutes les autres avant elle.

Il ne faut toutefois pas négliger la belle avancée technologique que pourrait permettre ce satellite expérimental, nommé Micius, si les tests se révèlent concluants dans les deux années qui viennent. En utilisant les propriétés physiques des photons, le satellite sera capable de transmettre des clés de chiffrement de façon immensément plus sécurisée qu'aujourd'hui. Si le signal est intercepté, les photons auront des caractéristiques différentes à l'arrivée, et le destinataire du message saura que l'échange n'est pas sécurisé.

Une start-up française prometteuse... sabordée en 2010

Un tel système fournira un avantage stratégique certain à qui le maîtrisera, jusqu'à ce que l'on découvre comment tromper le destinataire et lui faire croire que le signal n'a pas été compromis. Car cela arrivera ! Comme toujours, ce n'est qu'une question de temps et de ressources. D'ailleurs, l'objectif des experts n'est pas de trouver un système inviolable, mais de mettre en œuvre le système le plus compliqué à pirater possible, afin que le rapport entre l'importance de l'information visée et les ressources nécessaires pour l'obtenir devienne moins intéressant pour les espions ennemis. À l'ère numérique, l'objectif n'est plus de maintenir la porte du coffre-fort fermée à tout prix, mais de retarder le plus possible son ouverture, afin que l'information ait moins de valeur lorsqu'elle est déchiffrée.

La recherche sur les technologies de sécurité quantiques a beaucoup progressé ces dernières années. Des opérateurs de câbles sous-marins ont testé des protections contre les mouchards, posés notamment par l'USS Jimmy Carter, un sous-marin nucléaire américain spécialement modifié pour ces missions, probablement pour le compte de la NSA, l'agence de sécurité américaine. Une start-up française, SmartQuantum, avait d'ailleurs fait des avancées prometteuses en 2010 lorsqu'elle a été sabordée, vraisemblablement à l'initiative d'un géant français de la défense.