Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mercredi 3 août 2016

Le nouveau président Duterte avait promis d'éliminer les trafiquants de drogue


Ce n’était pas qu’un discours !

Rodrigo Duterte a été élu à la présidence des Philippines le 9 mai.
Image: Reuters


«Oubliez les lois sur les droits de l’homme. Si je suis élu président, je ferai exactement ce que j’ai fait en tant que maire. Vous, les dealers, les braqueurs et les vauriens, vous feriez mieux de partir. Parce je vais vous tuer», déclarait Rodrigo Duterte, le 7 mai, lors de son dernier meeting électoral.

Bel et bien élu à la présidence des Philippines le 9 mai, l’homme qui renvoie Donald Trump au rang d’anodin tribun semble bien appliquer ses promesses électorales. Entre le 10 mai et le 1er août, pas moins de 512 personnes suspectées d’être impliquées dans le trafic de drogue ont été tuées par des forces de police ou des milices non identifiées, relève le titre philippin The Inquirer, qui sur son site Internet tient à jour une «Kill List», une liste détaillée de ces morts, dont nombre d’entre elles sont à classer au rang d’exécutions extrajudiciaires. La liste rapporte souvent la découverte de corps sur lesquels les meurtriers ont écrit des inscriptions comme «Trafiquant de drogue, à ne pas imiter» ou «Revendeur de drogue, pardon Seigneur».

ABS-CBN, autre média philippin qui tient aussi ses statistiques, arrive à un plus grand nombre encore de victimes durant le même laps de temps: quelque 770, dont 472 au cours d’opérations policières. Un graphique montre une nette augmentation du nombre de personnes tuées depuis l’accès au pouvoir du nouveau président.

Durant toute sa campagne électorale et depuis sa prise de fonctions, le 30 juin, Rodrigo Duterte a multiplié les messages encourageant les forces de police, mais aussi tout citoyen, à éliminer les délinquants, en particulier les dealers, mais aussi les consommateurs. Mi-juillet, se basant sur des statistiques officielles de la police, il s’était ouvertement réjoui de l’élimination par les forces de l’ordre de 200 personnes, qualifiant la guerre entreprise contre la drogue de «succès».

Devant ces chiffres affolants, un consortium de 329 ONG vient de réclamer l’intervention urgente de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et de l’Organe international de contrôle des stupéfiants, afin que cesse cette politique de nettoyage et que Manille respecte ses engagements internationaux envers les droits humains. «Au vu du nombre de vies en jeu, il est crucial que les autorités en charge du contrôle international des drogues mettent un terme aux atrocités commises aux Philippines et qu’elles affirment sans équivoque que les actions menées ne constituent pas des mesures de contrôle acceptables», écrivent-elles dans une lettre.

Incontrôlable, Rodrigo Duterte avait aussi promis durant sa campagne que 100 000 délinquants finiraient dans la baie de Manille.

Contrairement à ce que dit ta mère, la violence peut résoudre les problèmes. Chris kyle


La police abat six gardes armés d'un maire

Le président Rodrigo Duterte avait déjà menacé de «tirer à vue» sur ce maire s'il continuait à protéger son fils trafiquant de drogue.

Des centaines de personnes sont mortes depuis l'élection en mai du président à l'issue d'une campagne outrancière qui l'a vu promettre de faire abattre des milliers de trafiquants de drogue présumés. Il a notamment appelé publiquement à leur meurtre.

Les gardes ont été tués mercredi à l'aube dans la ville d'Albuera, sur l'île de Leyte, dans une fusillade entre policiers et soutiens du maire Rolando Espinosa, a déclaré la police. L'incident «est lié à l'enquête concernant l'implication du maire et de son fils dans le trafic illégal de drogue», a déclaré à la presse le porte-parole de la police nationale Dionaldo Carlos.

Six hommes armés ont été tués, a-t-il affirmé. Dix-sept armes et plusieurs grenades avaient été trouvées sur place.

Lundi, le président Duterte avait donné 24 heures à M. Espinosa et à son fils pour se rendre, après l'arrestation de cinq employés et gardes du corps du maire dans une opération anti-drogue. «Sinon, un ordre de 'tirez à vue' sera donné s'ils résistent ou mettent en danger les policiers chargés de les arrêter», avait expliqué le porte-parole de la présidence, Ernesto Abella, à la télévision.

Tu vas mourir

Le maire s'est finalement rendu mardi, mais son fils reste en fuite. Dans une étrange conférence de presse aux côtés du maire diffusée en direct à la télévision, le chef de la police nationale, Ronald de la Rosa, l'a appelé à se rendre: «Si tu nous écoutes là, Kerwin, ton père s'est déjà rendu, tu devrais faire comme lui». «Si tu ne te rends pas, tu vas mourir. Donc il vaudrait mieux te rendre, ta vie est réellement en danger», a-t-il ajouté.

La police affirme avoir tué plus de 400 trafiquants de drogue depuis l'élection de M. Duterte. Les organisations de défense des droits de l'Homme craignent que ce bilan ne soit bien plus élevé, des civils se transformant aussi en justiciers suite aux appels au meurtre du président.

Selon la police, plus de 100'000 trafiquants et consommateurs de drogue se sont rendus à la police lors de multiples redditions de masse, dans plusieurs régions du pays. Ils ont promis de cesser leurs activités illégales.

ATS