Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 22 décembre 2015

Les messes de Noël ciblées par les djihadistes ?


Selon Europe 1, le ministre de l’Intérieur s’inquiète de la sécurité dans les églises, notamment pour les offices des 24 et 25 décembre. Ses services auraient adressé des instructions très précises aux préfets et aux directeurs de la police et de la gendarmerie. Elles renouvellent les consignes données en avril après l’attentat déjoué contre une église de Villejuif : s’informer auprès des responsables des paroisses des horaires des veillées et des messes, les sensibiliser à des mesures de protection (voitures suspectes, repérages, comportements inhabituels), les inviter à faire ouvrir les manteaux à l’entrée des églises, voire à fouiller les sacs comme dans les grands magasins, signaler tout colis ou bagage abandonné.

Sur les 45.000 paroisses dénombrées en France, il est évident que toutes ne pourront être protégées : au mieux cent à cent-cinquante lieux de culte catholiques, en raison de leur notoriété et de l’affluence attendue, feront l’objet d’une surveillance particulière, notamment dans la capitale. Ailleurs, il faudra compter sur la vigilance du clergé local et des fidèles. Sans tomber dans la paranoïa. L’épiscopat rappelle que les églises sont traditionnellement des lieux ouverts et accueillants, ce qui n’empêche pas le réalisme. Du reste, les patrouilles de policiers, de gendarmes et de soldats de l’opération Sentinelle ne sont pas illimitées : quand elles exerceront une surveillance à proximité des églises, elles seront contraintes de la relâcher dans d’autres lieux sensibles.

Sans être alarmiste, il faut concevoir que la France est entrée dans une période où un acte terroriste peut survenir à tout moment. Si l’on peut espérer que le gouvernement prenne toutes les mesures possibles pour assurer la protection des Français, ce n’est pas faire preuve d’un anti-hollandisme primaire que de constater qu’il a fallu une série d’attentats en 2015 pour que l’accent soit mis sur la sécurité ; que l’angélisme qui consiste à prétendre que des terroristes ne se glissent pas parmi les migrants est irresponsable ; que la politique extérieure de la France au Moyen-Orient a fait de notre pays une cible privilégiée de l’État islamique sans pour autant être efficace. Pire : il est indécent que François Hollande, pour remonter dans les sondages, opère une sorte d’instrumentalisation des attentats pour se mettre en avant, se présenter comme un rassembleur, voire un sauveur, lui qui a tant divisé les Français.

Les plus âgés de nos lecteurs se souviennent peut-être d’une autre période où la France fit l’expérience du terrorisme : c’était en Algérie, parfois en métropole. Le terrorisme aveugle a été l’une des principales armes utilisées par les nationalistes du FLN. Des bombes explosaient dans des cafés, dans les cinémas, les spectateurs regardaient sous leur siège avant de regarder le film, des soldats et des civils (y compris des musulmans) étaient égorgés, décapités… L’Histoire a préféré oublier ces exactions. À cette époque, le terrorisme ne faisait pas l’unanimité contre lui : certains Français – artistes, écrivains, chrétiens de gauche, trotskistes, syndicalistes – se glorifiaient même d’être des « porteurs de valise ». On a tendance à accepter les moyens ignobles de ses amis – quand on ne les justifie pas -, oubliant que l’emploi de moyens ignobles corrompt toute fin.

Il est d’autant plus choquant de rapprocher, comme on l’a fait récemment, l’État islamique du Front national, quoi qu’on pense de ce parti : ceux qui se prêtent à de tels amalgames pratiquent une forme de terrorisme intellectuel qui, s’il n’est pas sanglant, n’en est pas moins totalitaire.

Souhaitons que de nombreux Français ne fassent pas seulement la fête en ce temps de Noël. Qu’ils trouvent le temps de se recueillir, dans les églises ou ailleurs. Qu’ils prennent conscience que tout terrorisme est abject. Surtout, qu’ils n’aient pas peur et espèrent dans l’avenir !

Jean-Michel Léost