Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

jeudi 11 juin 2015

Loi sur le renseignement : Renforcer l'arsenal du SRC



Les services secrets devraient être mieux armés pour lutter contre le terrorisme. Contre l'avis d'une minorité socialiste, le Conseil des Etats est entré jeudi en matière sur la nouvelle loi sur le renseignement par 37 voix contre 2 et 3 abstentions.

Les services secrets ne doivent pas pouvoir pénétrer dans la sphère intime des citoyens sans soupçon concret, a critiqué Paul Rechsteiner (PS/SG), à l'origine de la fronde. Des centaines de milliers de personnes ont été fichées au temps de la guerre froide. Il ne faut pas répéter les erreurs du passé.

Avec l'évolution technique, les services secrets disposent déjà de plus d'informations qu'il n'en faut. Le défi reste leur exploitation intelligente, et cela ne nécessite pas de nouvelle loi, a-t-il estimé. Il vaut mieux s'engager pour que la Suisse reste un havre de sécurité et de liberté.

Autogoal

«Sans sécurité, il n'existe pas de liberté. Ne pas entrer en matière serait un autogoal», a répliqué Joachim Eder (PLR/ZG). La Suisse n'est pas une cible prioritaire d'attentats djihadistes, mais elle sert de base logistique. Si on veut améliorer la sécurité de tous, il faut accepter des limitations minimales de la liberté de chacun.

La liberté personnelle des citoyens est le bien le plus précieux. Mais le monde a évolué et les attaques terroristes réclament de nouvelles réponses et bases légales, a estimé Alex Kuprecht (UDC/SZ).

Paul Rechsteiner n'a convaincu que le président du PS, Christian Levrat, mais le Fribourgeois ne s'est pas exprimé. «Je préfère des services secrets encadrés par une loi que sans encadrement ou pas de services secrets du tout», a défendu Géraldine Savary (PS/VD). Les nouvelles mesures suscitent beaucoup d'inquiétudes légitimes, mais la commission préparatoire a amélioré l'équilibre entre sécurité et respect entre libertés fondamentales.

Le projet initial n'était pas bon et le National l'a rendu catastrophique, a jugé Luc Recordon (Verts/VD). Mais la commission a un peu redressé la barre et le texte est nécessaire, a-t-il ajouté en invitant le Conseil à y apporter des améliorations en matière de balayage du réseau câblé et de la surveillance. Les deux écologistes se sont toutefois abstenus lors du vote.

Pas de chèque en blanc

C'est une des lois les plus importantes de la législature, a estimé le conseiller fédéral Ueli Maurer. Le projet ne donne pas de chèque en blanc au Service de renseignement de la Confédération (SRC), le Conseil fédéral et la délégation des commissions de gestion du Parlement pourront toujours intervenir. Rien de comparable avec la NSA américaine. Pas question non plus de collecter des données à bien plaire comme cela a pu être le cas lors de l'affaire des fiches.

Avec le texte, le SRC pourra surveiller des communications (courrier, téléphone, courriel), observer des faits dans des lieux privés, si nécessaire en installant des micros, ou perquisitionner secrètement des systèmes informatiques et y installer des «chevaux de Troie».

Mais ces mesures seront soumises à autorisation et utilisées en dernier recours pour lutter contre le terrorisme, la prolifération d'armes et l'espionnage. Elles ne permettront pas de s'attaquer à l'extrémisme violent. Il faudra aussi obtenir l'aval du Tribunal administratif fédéral, puis du chef du Département fédéral de la défense (DDPS), qui devra consulter ses collègues de Justice et Police et des Affaires étrangères.

Le SRC devrait aussi pouvoir faire enregistrer les signaux par internet. Certains craignent l'oeil de Big Brother sur le réseau. La loi interdit toutefois de toucher à ces données si tant l'émetteur que le récepteur se trouvent en Suisse ou d'utiliser des indications concernant des personnes et entreprises helvétiques comme mots clés de recherche.

Cautèles de commission

La commission a en outre élargi les mesures soumises à autorisation à l'infiltration dans des systèmes informatiques à l'étranger ainsi qu'à l'observation ou enregistrements de la sphère privée. Elle souhaite également créer une autorité de surveillance autonome et indépendante, rattachée au Département de la défense sur le plan administratif. Le Conseil des Etats entame l'examen du détail du projet.

ATS