Image: Keystone
Le secret le mieux gardé de Suisse? Celui d’un certain fromage appenzellois, vantent les affiches publicitaires qui ornent les murs du Service de renseignement de la Confédération (SRC).
Un brin d’autodérision pour cadrer un discours plus sombre: le SRC a présenté ce lundi son rapport de situation 2015. Il souligne l’évolution de la menace liée au djihadisme en Suisse.
«Sans vouloir alarmer les gens, le danger est devenu plus grand», relève le conseiller fédéral Ueli Maurer. «La situation s’est détériorée au niveau du risque terroriste, renchérit le chef du SRC, Markus Seiler. On ne peut exclure qu’une attaque ait lieu en Suisse.»
Les cibles à risques? Il est difficile de les identifier tout comme les acteurs du djihadisme, isolés et radicalisés, souligne le rapport du SRC. Mais il cite en particulier «les intérêts étrangers en Suisse, les organisations internationales ou des installations ou personnes d’origine juive.»
Face à cette évolution, les agents secrets suisses se sont fixé un but: «Aucun voyageur du djihad ne doit échapper à la surveillance», souligne Christian Duc, chef de coordination de l’antiterrorisme.
Et ce n’est pas une sinécure. Depuis 2001, 64 cas ont été recensés, dont les deux tiers concernent l’Irak et la Syrie. En parallèle, plus de 200 internautes, qui prônent une idéologie djihadiste en Suisse ou depuis la Suisse, ont été identifiés.
Auditions préventives
Face à la difficulté de récolter du matériel pour nourrir une instruction judiciaire, notamment lorsque ces djihadistes présumés sont à l’étranger, le SRC mène aussi des auditions préventives avant un éventuel départ. «La plupart n’ont aucune idée de ce qui les attend sur place», témoigne Christian Duc.
Le Genevois explique encore que la menace djihadiste s’accentue aujourd’hui par la surenchère à laquelle se livrent l’Etat islamique, Al-Qaida, Al-Nosra, ou encore Boko Haram.
Le SRC veille donc, mais il collabore aussi avec d’autres agences de renseignements. «Sur le front terroriste, il est nécessaire de travailler avec les Etats-Unis», estime Markus Seiler. Mais le Bernois s’agace lorsqu’on évoque le risque de mise sous tutelle des James Bond helvétiques par le géant américain. «Nous ne travaillons pas sur mandat de l’étranger.»
Renforcement souhaité
Une indépendance qui a son prix, a souligné un Ueli Maurer lui aussi agacé par les comparaisons entre ses espions et les autres. «Aucun autre Service de renseignement n’a de règles aussi strictes, avec un contrôle aussi strict et aussi peu de moyens que le nôtre.» Le ministre plaide ainsi pour la loi sur le renseignement, qui doit renforcer les possibilités pour le SRC d’acquérir de l’information. Ueli Maurer espère aussi un renforcement de l’effectif. Mais pas question de peindre le tableau en noir, pour l’UDC qui a conclu avec son proverbial optimisme: «Notre SRC est petit, mais costaud!»