Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mercredi 12 mars 2014

La Crimée indépendante, «comme le Kosovo»


Le Parlement de Crimée a déclaré mardi la péninsule indépendante de l'Ukraine. Les députés de la région à majorité prorusse ont notamment invoqué le précédent du Kosovo pour justifier leur démarche du point de vue du droit international. A Kiev, les nouvelles autorités ukrainiennes ont décidé de muscler leurs forces militaires.

La déclaration a été adoptée par 78 des 81 députés présents, selon un communiqué de ce parlement considéré comme illégal par Kiev. Le conseil municipal de Sébastopol a lui aussi approuvé la proclamation, qui constitue une étape préalable avant le référendum de dimanche pour permettre le rattachement de la Crimée à la Russie.

Le texte invoque la Charte des Nations unies et «d'autres documents internationaux établissant le droit des peuples à l'autodétermination». Il se réfère notamment à l'avis rendu le 22 juillet 2010 par la Cour internationale de justice (CIJ), selon lequel «la proclamation unilatérale d'indépendance par une partie d'un Etat ne viole aucune norme du droit international».

Référendum «illégal» selon Didier Burkhalter

En cas de vote en faveur du rattachement ce dimanche, la Crimée demandera à «être admise dans la Fédération de Russie», précise la déclaration. La péninsule sera alors déclarée «Etat indépendant et souverain avec une forme républicaine de gouvernement».

La Russie a jugé que cette déclaration était «absolument légitime». Mais le président de la Confédération Didier Burkhalter a estimé, au nom de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), que le référendum de dimanche était «illégal». Raison pour laquelle l'OSCE n'enverra pas d'observateur pour cette consultation.

La chancelière allemande Angela Merkel a de son côté jugé que la situation en Crimée s'apparentait à «une annexion». Selon des propos cités par une source parlementaire, elle a estimé que l'Europe ne doit pas couper le fil du dialogue avec Moscou, mais qu'elle doit fixer des limites à la Russie, notamment au moyen de sanctions.

Contrôle renforcé

Sur le terrain, les forces prorusses contrôlent désormais les points stratégiques de la presqu'île. Tout est en place pour une sécession rapide. Le «Premier ministre» de la région Serguiï Axionov s'est autoproclamé «chef des armées».

Des hommes en treillis fouillent les voyageurs arrivant à Simféropol en provenance du nord. Seuls les vols venant de Moscou peuvent y atterrir.

6000 soldats ukrainiens

A Kiev, le président ukrainien par intérim, Olexandre Tourtchinov, a déclaré que l'Ukraine allait se doter d'une «Garde nationale». En raison de la gabegie qui a régné sous l'ex-président Viktor Ianoukovitch, le pays ne peut compter que sur 6000 hommes d'infanterie prêts au combat, face aux quelque 200'000 soldats russes déployés sur les frontières du pays, a déclaré le ministère ukrainien de la défense.

Kiev en appelle à l'aide occidentale. Le Premier ministre Arseni Iatseniouk a estimé que le mémorandum de Budapest, signé en 1994 par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la Russie, oblige Washington et Londres à intervenir. Le traité garantit l'intégrité territoriale de l'Ukraine contre l'abandon de son arsenal nucléaire.

Exercices militaires américains

Des avions de l'OTAN ont survolé la Pologne et la Roumanie pour surveiller l'évolution de la situation. Et la marine américaine s'apprête à effectuer des exercices militaires en mer Noire avec la Bulgarie et la Roumanie ces prochains jours.

La Commission européenne a quant à elle proposé à l'Ukraine de fortes réductions des tarifs douaniers, pour un montant évalué à quelque 500 millions d'euros (610 millions de francs) par an. La semaine dernière, Bruxelles avait proposé à l'Ukraine un plan d'aide «d'au moins 11 milliards d'euros».

Ianoukovitch contre la sécession

Parallèlement, Viktor Ianoukovitch, réfugié en Russie, a réaffirmé être le président «légitime» de l'Ukraine. Il s'est dit prêt à revenir à Kiev et a regretté «que la Crimée se détache» de l'Ukraine.

Du côté diplomatique, Sergueï Lavrov et John Kerry se sont entretenus par téléphone. Les chefs de la diplomatie russe et américaine ont abordé les «propositions concrètes» de Moscou et Washington visant à «assurer la paix civile et la concorde» en Ukraine, selon le ministère russe des affaires étrangères.

«Absolument légale» 

La Russie juge que la déclaration d'indépendance de la Crimée est «absolument légale», a annoncé le ministère des affaires étrangères. 

Cette proclamation a été adoptée mardi par le Parlement régional de la péninsule russophone du sud de l'Ukraine. Les parlementaires ont notamment invoqué le précédent de l'indépendance du Kosovo, reconnue par l'ONU, pour justifier leur démarche. Dans son communiqué, la diplomatie russe souligne que dans le cas du Kosovo, l'ONU et plusieurs pays occidentaux avaient estimé «qu'une déclaration unilatérale d'indépendance d'une partie d'un Etat ne violait aucune norme du droit international». 

«La Fédération de Russie respectera les résultats de l'expression libre de la volonté des peuples de Crimée au cours du référendum», ajoute le ministère, précisant que des observateurs, notamment de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), y étaient invités. Septante-huit des 81 députés présents dans le Parlement de Crimée ont adopté la «déclaration d'indépendance». Celle-ci constitue une étape préalable avant le référendum de dimanche pour permettre son rattachement à la Russie.