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lundi 26 août 2013

À Londres, les poubelles espionnent les passants


Déjà sous les yeux permanents de caméras de surveillance, voilà que dans le quartier d’affaires de la City même les poubelles récoltent des données sur les passants, afin de mieux les cibler commercialement.

Les poubelles "intelligentes" de la City, enregistrent les données des passants (Photo : @Tobers/flickr cc.)


Les travailleurs de la City ont pu voir débarquer l’an passé durant les Jeux Olympiques de nouvelles poubelles dites « intelligentes ». Fleurissant sur les trottoirs, elles livrent sur leurs côtés–entre plusieurs tranches publicitaires- des informations météorologiques, d’actualité ou bien de trafic des lignes de transport en temps réel. Pratique. En revanche, ce qu’ils ne soupçonnaient pas, c’est que ces poubelles pouvaient enregistrer les données des smartphones grâce à leurs bornes Wi-Fi.

Des données servant à établir les habitudes des passants, fichés à chaque passage devant une de ces poubelles. Le prix s’élève à 35 000 euros pièce et il en existerait déjà une centaine de ce type sur les trottoirs londoniens, dont une douzaine comportant le dispositif. L’usage, commercial, de ces bases de données captées, est d’étudier les intérêts des passants, afin de mieux cibler les messages publicitaires diffusés dans la zone. C’est la start-up Renew qui est derrière l’installation de ces poubelles d’un nouveau type et qui revend les informations aux annonceurs.


Des données transmises aux annonceurs publicitaires

Cette pratique a bien entendu indigné les habitants du quartier, ainsi que l’association Big Brother Watch. Les autorités se sont empressées de demander à la société d’arrêter de recueillir de telles données, issues de la vie privée. Si Kaveh Memari, le patron de Renew, tente de calmer le jeu en précisant que « nous ne pouvons pas vraiment suivre les gens, nous ne voyons pas les gens, tout ce que nous voyons est un dispositif ».

Capture d'écran du site Quartz -qui a révélé l'affaire-, indiquant où sont placées ces poubelles intelligentes


Ces poubelles « fournissent une vision sans précédent (...) - les points d'entrée et de sortie, le temps passé dans un endroit, les centres d'intérêt » des utilisateurs de smartphones, renchérit le fabricant. Sous la pression des défenseurs de la vie privée, Renew a arrêté de collecter les informations sur les passants. Mais l’entreprise compte bien vendre sa création à d’autres grandes villes comme Rio, New-York ou encore Dubaï.

Plus d’un demi-million de téléphones enregistrés en une semaine

(Photo : @g arango/flickr cc.)


En l’espace d’une semaine lors du mois de juin, c’est ainsi le passage de quatre millions d’utilisateurs, dont 530 000 uniques, qui a été comptabilisé. « Les développements futurs (de ce dispositif) ne dépendront pas seulement de la technologie, mais surtout de la façon dont les gens réagissent vis-à-vis de cette technologie interactive », s’est ainsi confié Kaveh Memari, confiant du potentiel commercial de son procédé.

Se revendiquant être un « cookie du monde réel » (en référence aux cookies informatiques qui récoltent nos centres d’intérêts lors de lectures sur le Web) et précisant que les données récoltées étaient anonymes, la technologie Presence Orb, qui habite ces poubelles, profite d’une réglementation laxiste quant à la liberté de telles pratiques. Souriez, vous êtes scannés.

Tollé général 

Devant le tollé provoqué par ce dispositif, le patron de Renew, Kaveh Memari, s'est défendu en expliquant que la technologie avait seulement été à l'essai en juin et qu'elle ne permettait que de comptabiliser le nombre de passants, sans obtenir leurs données personnelles. 
 
Elle est comparable à la technologie utilisée par les sites internet qui comptent le nombre de visiteurs uniques, sans connaître leur identité, a-t-il expliqué. "Nous ne pouvons pas vraiment suivre les gens, nous ne voyons pas les gens, tout ce que nous voyons est un dispositif", a-t-il déclaré. 

"Peu importe..." 

"Peu importe ce que peut faire la technologie, a rétorqué un porte-parole de la City of London. Tout ce qui se passe dans les rues doit être fait avec précaution et avec le soutien d'un public informé."
 
Kaveh Memari a insisté sur le fait que l'utilisation éventuelle des informations collectées par ces poubelles devrait se faire en accord avec des groupes de protection des données. "Les développements futurs (de ce dispositif) ne dépendront pas seulement de la technologie, mais surtout de la façon dont les gens réagissent vis-à-vis de cette technologie interactive", a-t-il affirmé.
 
Renew, qui a installé ces poubelles très sophistiqués dans la capitale britannique pendant les jeux Olympiques de Londres en 2012, compte vendre ce produit dans d'autres villes comme New York, Dubaï et Rio.