Département de la défense
Des soldats suisses de l'unité d'élite DRA 10 auraient été envoyées au Mali durant deux mois. C'est ce qu'affirme un conseiller national UDC saint-gallois. Le Département de la Défense dément.
le conseiller national UDC saint-gallois Lukas Reimann qui a «sorti» l'affaire ce lundi au Parlement. Il a déposé une interpellation urgente déclinée en dix questions au Conseil fédéral, affirmant que, selon une source qualifiée de sûre, des soldats du DRA 10 (Détachement de reconnaissance de l'armée 10, une unité d'élite) auraient été envoyés durant deux mois au Mali.
Or, comme l'explique l'élu au média alémanique Blick, qui relate l'affaire ce mardi, toute intervention à l'étranger de plus de trois semaines des forces de la Confédération doit faire l'objet d'une approbation du Parlement; ou au moins ce dernier doit-il en être informé.
Les forces suisses ont-elles été engagées aux côtés de troupes en guerre dans ce pays africain en proie aux islamistes et où la France est intervenue? Contacté par Tribune de Genève, le Département de la Défense dément: «Aucun soldat n’a été envoyé dans ce pays», affirme Karin Suini, porte-parole du DDPS. Le Conseil fédéral n'a pas encore formellement répondu à l'interpellation urgente.
Le média alémanique a également reposé la question à la source de Lukas Reimann, qui confirme que le DRA 10 était en Afrique.
Ces dernières années, une information avait déjà circulé sur une intervention en 2003 des mêmes forces d'élite en Irak, où un soldat avait été blessé. Ce qu'avait démenti pareillement le Département de la Défense, alors dirigé par Samuel Schmid.
Discrétion exigée
Mais que fait vraiment le DRA 10 en dehors d’exercices et d’entraînements réguliers à l’étranger avec d’autres forces spéciales? Le Département fédéral de la défense (DDPS) et les Affaires étrangères (DFAE) restent muets. Tout comme le Département de justice et police (DFJP), qui peut aussi être impliqué dans des prises de décision. Le DRA n’est pas plus prolixe. Un silence qui s’explique par le besoin de discrétion pour mener de délicates missions à terme.
le DRA 10 n’aurait, selon plusieurs experts, pas mis les pieds au Mali, d’autres membres du DDPS, en revanche, s’y trouvent: des représentants des Services de renseignement extérieurs. Des diplomates, dont un connaisseur de l’Afrique de l’Ouest actuellement en poste à Berne, et des membres de Fedpol, la police fédérale, sont aussi venus renforcer l’équipe habituelle du DFAE sur place.
Blessures en Afrique du Sud
Le DRA 10 n’a pas pour seules missions d’exfiltrer des otages ou d’évacuer des Suisses dans des régions en crise. Ses membres, formés aussi à l’ethnologie, à la psychologie et à la diplomatie, sont également mobilisés pour des missions de renseignement et de reconnaissance de terrain. Mais également, par exemple, pour escorter des convois délicats (lire les détails dans l’encadré).
Un médecin fait partie de l’unité de choc, de même que des «médics», une sorte d’ambulanciers de crise, capables, par exemple, d’arriver sur les lieux d’un crash d’avion en parachute, ce qu’un médecin ordinaire ne peut pas faire.
Ont-ils déjà travaillé dans des zones «chaudes» du globe pour traiter dans l’urgence des blessures de guerre? Là encore, le plus grand mystère demeure. Un informateur confirme cependant que des «exercices» sont menés en Afrique du Sud, pays où le taux de criminalité et de blessures par balles est particulièrement élevé. «S’exercer sur des mannequins ou des cochons n’est pas suffisant. L’Afrique du Sud est de ce point de vue un terrain intéressant, les blessures par balles étant fréquentes…»
Un outil indispensable
Le DRA est un outil vraiment indispensable, insiste un diplomate. «Les crises ont tendance à se multiplier dans le monde. Jusqu’à présent, on pouvait compter sur des pays amis en cas de difficultés, mais cela sera de moins en moins possible…» Le DRA 10 serait régulièrement sollicité par la cellule de crise du DFAE et par les services de renseignement pour des missions ponctuelles à l’étranger, mais obtiendrait rarement le feu vert de la hiérarchie. Le DDPS aurait mis son veto à de nombreuses sollicitations, dit-on. Mais des blocages existent aussi du côté du DFAE.
En attendant de pouvoir agir dans l’urgence lors de vraies missions, les soldats du DRA 10 rongent leur frein.