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mardi 12 juillet 2011

Les Etats-Unis suspendent une partie de leur aide militaire au Pakistan

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Les relations entre les deux alliés se sont sévèrement dégradées après le raid américain dans lequel Oussama Ben Laden a été tué.

Les Etats-Unis ont décidé de suspendre une partie de leur importante aide militaire au Pakistan. Ce pays est un allié sur lequel Washington s’appuie pour réprimer les groupes islamistes armés, notamment en Afghanistan, mais avec lequel les relations se sont sévèrement dégradées. La décision a été annoncée dimanche 10 juillet par le secrétaire général de la Maison Blanche, William Daley.

Le bras droit du président Barack Obama a confirmé que la décision portait sur environ 800 millions de dollars d’aide militaire, soit plus d’un tiers du budget de plus de 2 milliards de dollars que les Etats-Unis versent par an. L’aide va notamment au maintien de plus de 100.000 soldats pakistanais le long de la frontière avec l’Afghanistan.

Le porte-parole de l’armée pakistanaise, le général Athar Abbas, y a réagi de manière mesurée : "Nous n’avons reçu aucune notification officielle ou communication sur le sujet", indique le général Athar Abbas. "Au-delà de cela, l’armée, aujourd’hui comme hier, a mené avec succès des offensives en utilisant ses propres ressources sans quelque soutien extérieur que ce soit", a t-il ajouté. La décision américaine a été, par ailleurs, saluée par son voisin indien qui a estimé que le soutien financier américain à son pays rival aurait perturbé l’équilibre militaire de l’Asie du Sud-Est.

Acrimonie diplomatique

Les ventes d’armes au Pakistan, comme les avions de combat F-16, et l’aide non militaire à ce pays éprouvé par les ravages des inondations de 2010, ne sont pas concernées, selon des responsables cités par le New York Times. Islamabad "a pris des mesures qui nous ont amené à suspendre certaines aides que nous donnons à l’armée" pakistanaise, a déclaré William Daley dans l’émission "This Week" de la chaîne ABC. "La vérité, c’est que notre relation avec le Pakistan est très compliquée", a t-il commenté.

Le Pakistan a reçu 18 milliards de dollars des Etats-Unis depuis les attentats du 11 Septembre lorsqu’Islamabad a officiellement mis fin à son soutien aux talibans afghans et décidé de coopérer avec Washington. Les relations entre les deux pays sont cependant restées délicates et le raid américain du 2 mai en territoire pakistanais, au cours duquel Oussama Ben Laden a été tué, a cristallisé la suspicion mutuelle.

Un allié à la fiabilité soupçonnée

Côté américain, la présence du chef d’Al-Qaïda dans une ville-garnison du nord du Pakistan a relancé les doutes sur la compétence des services de sécurité pakistanais, voire des complicités avec la nébuleuse islamiste. Les Etats-Unis considèrent que les principaux cadres d’Al-Qaïda se cachent au Pakistan et y entraînent leurs kamikazes dans les zones tribales du nord-ouest, qui servent également de bases aux talibans afghans. Côté pakistanais, le raid été vécu comme une humiliation pour l’armée pakistanaise, institution clé de ce grand pays musulman de 170 millions d’habitants à l’opinion publique majoritairement anti-américaine.

Dès le 25 mai, plus de cent conseillers militaires américains ont dû partir. Parallèlement, aux Etats-Unis, de nombreux parlementaires ont accentué la pression pour couper toute assistance au Pakistan, troisième bénéficiaire de l’aide américaine après l’Afghanistan et Israël. L’assassinat fin mai du journaliste Syed Saleem Shahzad, auteur d’articles sur les liens présumés entre Al-Qaïda et l’armée pakistanaise, a ajouté aux crispations. Le plus haut gradé américain, l’amiral Mike Mullen, s’est ouvertement inquiété que les autorités pakistanaises puissent y avoir trempé.

"Nous faisons de notre mieux pour jouer ensemble la partition"

Manifestement, la tension politique suscitée par le raid contre Ben Laden n’est pas retombée. "Tant que nous ne serons pas sortis de ces difficultés, nous suspendrons une partie de l’argent que les contribuables américains se sont engagés à verser", a prévenu William Daley.

"Nous faisons de notre mieux pour jouer ensemble la partition mais nous disons à ceux qui sont en grande partie responsables des difficultés internes au Pakistan qu’ils ne peuvent pas continuer comme ça", avait de son côté prévenu le 23 juin la secrétaire d’Etat, Hillary Clinton. Les Etats-Unis restent cependant soucieux de ménager l’avenir. Le Pakistan demeure un acteur clé du processus de paix en Afghanistan d’où le président Obama a décidé de retirer les forces américaines d’ici à fin 2014.

Nouvelobs