L'armée française évoque l'implication de combattants arabes. Les talibans ont revendiqué l'attaque et révélé l'identité du kamikaze : c'est un Afghan.
Cinq jours après l'attentat-suicide qui a tué cinq soldats français dans la province de Kapisa, l'incertitude plane sur les auteurs de l'attaque. Vingt-quatre heures après, le chef d'état-major des armées, l'amiral Édouard Guillaud, affirmait au micro d'Europe 1 : "Il est possible que ce soit ce qu'on appelle là-bas des étrangers. Quand on dit là-bas des Arabes, c'est simplement des non-Afghans, entraînés à l'extérieur du territoire et introduits dans le territoire". Une déclaration contredite par Zabihullah Mujahid, porte-parole des talibans afghans qui a revendiqué l'embuscade. Publié dans la presse afghane et pakistanaise, le texte précise l'identité du kamikaze. Il s'appellerait Murad Ali et serait originaire de la province afghane du Nangarhar.
Difficile de savoir qui dit vrai. Mais la présence de combattants arabes en Kapisa ne doit pas être exagérée. Cette province est une voie d'accès vers Kaboul, donc un endroit stratégique qui attire plusieurs groupes armés afghans et pakistanais. Alors que, durant la guerre contre les Soviétiques dans les années 1980, la Kapisa était un bastion du Hezb-i-Islami, dirigé par Gulbuddin Hekmatyar, la situation a changé ces dernières années lorsque les talibans du mollah Omar ont commencé à s'y infiltrer.
Carrefour stratégique
D'autres mouvements leur ont emboîté le pas, en particulier le réseau du chef de guerre afghan Jalaluddin Haqqani et de son fils Sirajuddin. Ce vétéran de l'insurrection contre l'Armée rouge dispose de bases arrière au Pakistan, dans l'agence tribale du Nord-Waziristan, près de la frontière afghane. Il entretient des liens avec le chef taliban local, Hafiz Gul Bahadur, qui envoie aussi des combattants en Kapisa.
Ensuite, il y a les talibans salafistes, un groupe afghan qui a aussi combattu les Soviétiques. En janvier 2010, dans une interview à la chaîne Al Jazeera, ils ont prêté allégeance au mollah Omar. Ils ont des relations avec les combattants arabes venus faire le djihad en Afghanistan. Enfin, ces derniers mois, des talibans pakistanais venus du nord-ouest du Pakistan se sont réfugiés dans la province voisine du Nuristan. Ils ont dû quitter leur pays après plusieurs opérations menées par l'armée pakistanaise. "On ne peut pas exclure qu'ils soient en train de se déplacer vers Kaboul à travers la province de Kapisa", estime Fabrizio Foschini, chercheur auprès de l'Afghanistan Analysts Network, un centre basé à Kaboul.
Emmanuel Derville