Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 15 septembre 2009

13e Régiment de Dragons Parachutistes

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Le 13eme Régiment de Dragons Parachutistes à été crée en 1676 portant successivement les noms de ses colonels et celui de "Dragons de Monsieur", il devient le 13eme régiment de Dragons en 1791 ,puis "Régiment de Dragons de l’Impératrice" sous le second empire, nom de tradition qu’il continue à porter. C’est en 1952 qu’il prend son appellation actuelle .En garnison à Dieuze depuis 1963, ce régiment de recherche dans la profondeur à la particularité d’être interarmes et dépend de la Brigade de Renseignements et de guerre électronique.
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Le 13 est une branche de la Direction du Renseignement Militaire (DRM), qui dépend elle-même de la Brigade de Renseignement et de Guerre Electronique (BRGE) qui regroupe dans l’Est plusieurs régiments, dont le 13e RDP. Ce dernier est effectivement le seul consacré à la recherche humaine sur zone, les autres se consacrant au recueil de données à distance.
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Les professionnels du 13e régiment de dragons parachutistes (RDP), l’une des branches de la brigade de renseignement de l’armée de terre, constituent le réservoir humain de l’espionnage militaire français. La technologie la plus performante ne peut toujours pas faire l’économie de l’homme, indispensable à l’élaboration de toute opération de terrain. Seule l’addition des satellites, centres d’écoutes ou avions espions d’un côté, et de l’autre des yeux et des oreilles d’un soldat, permet à cette armée secrète de fonctionner.
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Les professionnels du 13e régiment de dragons parachutistes (RDP), l’une des branches de la brigade de renseignement de l’armée de terre, constituent le réservoir humain de l’espionnage militaire français. La technologie la plus performante ne peut toujours pas faire l’économie de l’homme, indispensable à l’élaboration de toute opération de terrain. Seule l’addition des satellites, centres d’écoutes ou avions espions d’un côté, et de l’autre des yeux et des oreilles d’un soldat, permet à cette armée secrète de fonctionner.
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Au cours des siècles, les dragons se sont mus en taupes...
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Deux régiments, le 2e de Hussards, une unité blindée basée à Sourdun, en région parisienne, et le 13e RDP de Dieuze, en Moselle, composent ce que les militaires appellent "la recherche humaine". Toujours en uniforme, même s’ils se camouflent, ils ont pour mission de collecter et de transmettre les résultats d’observations effectuées in situ.
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Dieuze, 5000 habitants, bourg riant du pays du Saulnois, coincé entre les plaines champenoises et les Vosges. Pourtant, derrière un haut mur de briques rouges palpite l’un des cœurs du renseignement militaire. Le quartier Lyautey, une caserne jadis érigée par les Prussiens, abrite le 13e RDP. A première vue, rien d’exceptionnel. La bannière tricolore et l’étendard du régiment claquent dans le vent glacé. Plus loin, la salle d’honneur, un panégyrique gravé dans le bois de l’entrée : toutes les opérations du régiment, de 1676 à nos jours. Une bonne centaine. Epier et renseigner : l’un des plus vieux métiers du monde. Le 13e RDP est exclusivement dédié à cette activité, qui combine aujourd’hui haute technologie et compétences humaines. Risques de défaillance...
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Afin d’éviter cela, chacun des mille soldats du régiment reçoit une formation spéciale pendant une vingtaine de mois qui le rend pleinement opérationnel. Au menu : tests psychologiques, apprentissage de langues étrangères, initiation à la photo, mise dans des conditions extrêmes et, bien sûr, maîtrise des techniques d’infiltration et de camouflage. Car les "dragons" du 13e doivent avant tout être des soldats furtifs, des paras invisibles, tantôt couleur sous-bois, tantôt transformés en rochers dans une rivière.
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Répartis en deux catégories observateurs ou radios, c’est-à-dire spécialistes des transmissions, les hommes de cette troupe secrète sont à même d’intervenir en n’importe quel point du globe. Par voie aérienne, aquatique ou terrestre. Tous parachutistes de formation, ils maîtrisent les airs. Mais seuls certains sont estampillés Sotgh. Ce sigle barbare désigne les sauteurs opérationnels ("chuteurs opérationnels")de très grande hauteur. Traduction civile : ces soldats sont largués, avec 80 kilos de matériel répartis sur le ventre et sur le dos, à 10 000 mètres d’altitude. Ils subissent le même entraînement que les pilotes de chasse. Equipés de masque à oxygène, ils sont capables de dériver, dans le silence et dans le froid, sans être détectés par le moindre radar, sur une centaine de kilomètres afin d’atteindre leur cible.
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Tout aussi discrets, les hommes-poissons, estampillés comme "nageurs-palmeurs". Aussi aguerris que des commandos de marine. En combinaison sèche, armés de fusils étanches, le visage noirci, ils remontent les fleuves, stagnent dans les étangs ou s’infiltrent par les rivières. Ils poussent leur imposant barda, bien compact, bouclé dans des sacs hermétiques, tout bonnement au fil de l’eau ou sur de petits canots maquillés en corps flottants.
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Enfin, sur la terre ferme, les dragons de Dieuze pilotent indifféremment n’importe quel véhicule tout-terrain ou des motos. Camouflés par d’étonnantes combinaisons indétectables, couleur neige ou forêt, ils crapahutent, de jour comme de nuit, totalement fondus dans le paysage. "Tous les moyens d’infiltration sont bons. Il faut simplement qu’ils soient adaptés à la mission et au terrain. Mais on peut tout imaginer", indique un officier du 13e.
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A l’arrivée "sur zone", la mission touche son "cœur". Observer et renseigner. Vérifier la localisation exacte d’une cible, analyser l’activité d’un PC ennemi. Tout voir sans être vu, jamais, et tout comprendre. Les véhicules tout-terrain, canots et autres parachutes sont enterrés ou camouflés. Capables de vivre en autonomie totale des semaines d’affilée, pratiquement sans bouger d’un centimètre, les soldats aménagent leur poste d’espionnage. Le plus spectaculaire : un trou, une cache intégrée au paysage.
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Tantôt rocher, tantôt sapin, l’homme trompe même l’animal...
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Le dragon creuse une profonde ornière dans le sol, étaie la cavité à l’aide de planches ou de bouts de bois et confectionne un couvercle étanche qui lui confère, si tout va bien, invulnérabilité et invisibilité. De temps en temps, il entrouvre de quelques centimètres la trappe de son bunker individuel de fortune pour épier, photographier ou écouter. Ensuite, il fait "sortir le rens" et l’achemine à bon port, en toute confidentialité.
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D’autres se dissimulent sous un tas de feuilles mortes, dans un tronc vide, dans une mare... Les anecdotes sont légion, de l’oiseau qui niche sur un "homme-sapin" à la bête sauvage qui s’assoit au pied d’un "talus vivant".
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Qu’ils soient "chuteurs" ou "palmeurs", tous font le même boulot. Tous sont aguerris et peuvent survivre dans les pires conditions. Dans le grand froid : il leur arrive de rester immobiles des semaines entières par -20°C. Ou dans la fournaise : ils savent "sécher sans broncher". Ils sont étanches à la mousson et imperméables au blizzard.
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"La spécificité de cette unité, souligne un officier du 13e, réside dans le fait qu’elle est modulaire et autonome. Dans la préparation d’une mission, comme dans sa réalisation, nous sommes maîtres d’œuvre. Il n’y a pas d’apports extérieurs. Nos personnels sont formés pour parer à toutes sortes d’éventualités. Ils ne peuvent théoriquement pas être dépassés par les événements."
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Ultime défi : la légitime défense. Les dragons sont tous armés, généralement avec du matériel dernier cri mais, paradoxalement, ils sont sans doute les seuls militaires à n’avoir pratiquement pas le droit de faire feu. Pour eux, tirer est synonyme d’échec. "Cela veut tout simplement dire que l’on est repéré", reconnaît un parachutiste. De Kolwesi au Cambodge, de Sarajevo à la Somalie, cette armée invisible a accompli partout ses missions en situation extrême. Quant aux opérations en cours, "désolé, mais ça... c’est secret-défense", lâche le chef de corps.
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A Dieuze, l’imposant portail du quartier Lyautey se referme sur ses secrets. Dans la nuit lorraine, le dragon de faction a une autre mission. Veiller sur la devise du régiment, inscrite sur le fronton : "Au-delà du possible".
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Christophe Gautier