samedi 20 septembre 2014

Ces Suisses au service de Tsahal


 Multiculturel
Durant son séjour, Jérémie a rencontré des volontaires venus du monde entier. 
DR


Spartiate
Le confort est sommaire sur les bases où volontaires et soldats se côtoient. 
DR


Appelons-le Jérémie. Agé de 20 ans, il n’a pas encore fait son service militaire en Suisse, la faute au sempiternel problème des étudiants à faire coïncider formation et passage sous les drapeaux. Pourtant, un uniforme militaire, ce Romand en a déjà porté un: celui d’Israël!

C’était il y a trois ans. Encore mineur, notre homme s’est engagé, via une association du nom de Sar-El, à fournir un service civil sur des bases de Tsahal, sans toutefois combattre au front. «Notre tâche est de remplacer des réservistes pour qu’ils puissent rester aux études ou à la maison.» Au menu, donc: tri de munitions, chemins à tracer à coups de pioche ou encore véhicules militaires à repeindre. Un travail logistique mené dans une ambiance stricte et sous une chaleur avoisinant parfois les 45 degrés. «Au début, je ne savais même pas où j’étais. Il s’agissait en fait d’une base dans le nord du pays. Exactement où, je ne sais plus.»

Une semaine dans le Golan, dans un secteur sous tension, conclura son séjour, avec notamment une nuit de garde épique, au son des tirs d’armes automatiques. «Au milieu de la nuit, j’ai commencé à entendre des coups de feu depuis un village voisin. Je me suis dit: «Je plains le gars qui est en plein tour de garde.» C’est là que j’ai réalisé que je commençais le mien dix minutes plus tard. Comme nous n’étions pas armés, je ne faisais pas le malin.» Divers exercices, dont du tir et une marche dans le désert, marqueront cette dernière semaine, un peu plus axée sur l’exercice et moins sur le travail logistique.

Ni Juif ni Israélien

Jérémie n’est pas Juif et n’a pas la nationalité israélienne. Quant à ses croyances religieuses, chrétiennes, il dit qu’elles n’ont pas eu beaucoup d’influence sur son choix de payer de sa personne pour Israël. Alors pourquoi cet engagement au profit d’une armée étrangère, lui qui est un chaud partisan de la neutralité suisse? «Il s’agit d’aller au bout de mes idées et également de passer du temps au soleil de manière utile», confie-t-il. Pour lui, le caractère strictement civil de son engagement fait que cette aventure ne contrevient pas au droit suisse, qui interdit le service pour une armée étrangère. A terme, il espère qu’une solution à deux Etats mettra un terme à la guerre au Proche-Orient, même s’il pense que «l’extrémisme islamique» du Hamas ou du Hezbollah est du même acabit que celui qui secoue l’Irak ou la Syrie.

29 volontaires suisses

Retraitée de la région genevoise, Yvonne van Gulik est la représentante en Suisse de Sar-El. L’année dernière, ce sont 29 personnes, habitant ou résidant dans notre pays, qui sont parties soutenir Tsahal par son intermédiaire. «Avant de les envoyer, je les rencontre toujours en personne. Dans un lieu public». Mis au courant de la rigueur des conditions de vie sur place, une bonne partie des volontaires ne vont pas plus loin que ce premier entretien. «Je leur dis la réalité: les chambres sont pour le moins spartiates, il y a des araignées et la discipline de l’armée…» Une discipline qui veut par exemple que les volontaires portent tous l’uniforme militaire israélien. «Beaucoup de volontaires sont jeunes, autour des 18 ans. Un tel accoutrement permet d’éviter que l’attirance soit trop forte. Et puis on fait souvent du travail salissant. Il s’agit d’éviter de ruiner ses habits civils.» Dans l’autre camp, ces considérations esthétiques ne suffisent pas à convaincre Rémy Viquerat, du collectif Urgence Palestine Genève. Il dénonce «l’endoctrinement» que subiraient les jeunes dans un tel programme. «Et puis je me demande bien si la Suisse sera aussi sévère avec ces volontaires qu’avec les gens qui, en 1936, avaient rejoint le Front républicain, en Espagne…»