L'Iran a dénoncé jeudi comme «répugnante» la réaction de Donald Trump aux attentats meurtriers de Téhéran. Le président américain a affirmé que République islamique, accusée de soutenir le «terrorisme», récoltait ce qu'elle semait.
Alors que le Département d'Etat a condamné ces attentats qui ont fait treize morts et des dizaines de blessés, Donald Trump a estimé que «les Etats qui appuient le terrorisme risquent de devenir les victimes du mal qu'ils soutiennent».
Quelques heures plus tard, la réponse du ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif a fusé, cinglante. «Le communiqué de la Maison Blanche et les sanctions du Sénat sont répugnants, alors que les Iraniens font face à la terreur soutenue par les clients des Américains», a-t-il écrit sur son compte Twitter.
Le Sénat américain a en effet voté par 92 voix contre sept de nouvelles sanctions à l'encontre de l'Iran pour «soutien à des actes de terrorisme international» et à des groupes «terroristes» du Moyen-Orient, ainsi que pour ses essais de missiles balistiques et ses atteintes aux droits de l'Homme.
Washington et Téhéran ont rompu tout lien diplomatique après la révolution islamique de 1979. Depuis l'entrée en fonction du président Trump en janvier, les relations entre les deux pays n'ont cessé d'empirer. Lors d'un récent voyage en Arabie saoudite, grande rivale sunnite de l'Iran chiite, M. Trump avait appelé toutes les nations «à isoler l'Iran».
Iraniens outrés
Sur les réseaux sociaux, des Iraniens se sont également montrés outrés par son attitude au moment où leur pays est confronté aux premiers attentats revendiqués par l'Etat islamique (EI) sur leur sol. Ils ont rappelé qu'au moment des attentats du 11 septembre 2001 à New York et Washington, commis par des djihadistes d'Al-Qaïda, ils avaient allumé des bougies à Téhéran en hommage aux victimes.
La réaction de M. Trump qui a oublié ce mouvement de solidarité, c'est vraiment la «classe», a ainsi ironisé sur Twitter l'économiste iranien Ali Ghezelbash.
Djihadistes iraniens
Les attentats de Téhéran ont visé mercredi deux lieux hautement symboliques de la capitale iranienne: le Parlement et le mausolée de l'ayatollah Khomeini, père fondateur de la République islamique née en 1979. Ils ont été commis par des hommes armés, dont certains étaient déguisés en femmes, ainsi que par des kamikazes qui se sont fait exploser.
Les six assaillants sont morts et cinq personnes ont été arrêtées dans les heures qui ont suivi les attentats. Les auteurs étaient des Iraniens ayant rallié l'EI, a précisé Reza Seifollahi, secrétaire-adjoint du Conseil national suprême de sécurité d'Iran.
«Il y a plusieurs dizaines de combattants iraniens» au sein de l'EI, «notamment en Irak, en Syrie et en Afghanistan», selon Clément Therme, de l'Institut International d'études stratégiques (IISS).
Les auteurs des attaques menées mercredi contre le Parlement et le mausolée de l'imam Khomeiny à Téhéran, qui ont fait 13 morts, sont des nationaux iraniens qui avaient rallié le groupe État islamique (EI), a déclaré un haut responsable iranien.
Les six assaillants «étaient des Iraniens et avaient rejoint Daesh (acronyme arabe de l'EI) quelque part en Iran», a déclaré tard mercredi à la télévision nationale Reza Seifollahi, secrétaire-adjoint du Conseil national suprême de sécurité.
L'attaque de mercredi est la première revendiquée par le groupe djihadiste, sur le territoire iranien. L'EI avait menacé ces derniers mois de frapper l'Iran, pays chiite à 90% et qui apporte un fort concours militaire contre l'EI en Syrie et en Irak.
Le ministère des Renseignements iranien a affirmé que les six terroristes qui ont mené le double attentat de Téhéran avaient été dans les rangs de l'Etat islamique à Mossoul et en Irak, avant de revenir en Iran l'été dernier.
Après avoir rejoint l'Etat islamique, les cinq auteurs des attentats «ont participé à des crimes commis par ce groupe terroriste à Mossoul (Irak) et Raqa (Syrie)», a affirmé le ministère des Renseignements iranien dans un communiqué publié par l'agence de presse Isna.
Une vingtaine d'années
Quatre assaillants ont mené l'attaque contre le Parlement à Téhéran. Deux se sont fait exploser et deux autres ont été tués par les forces de sécurité.
Les assaillants du Parlement étaient «âgés de 20 à 25 ans», a déclaré à l'agence Fars Mohammad Hossein Nejat, chef adjoint des services de renseignement des Gardiens de la révolution, le corps d'élite d'Iran.
Les musulmans chiites sont considérés comme des apostats par les sunnites. Ces derniers forment une minorité importante en Iran, notamment à ses frontières avec l'Irak et le Pakistan.
Simples «pétards»
Les Gardiens de la révolution, l'armée d'élite du régime, ont accusé les Etats-Unis et l'Arabie saoudite d'être «impliqués» dans ces attentats. Les autorités saoudiennes ont démenti toute implication.
Le guide suprême Ali Khamenei a tenu de son côté à minimiser les attaques. Il les a qualifiées de «pétards qui n'auront aucun effet sur la détermination du peuple iranien». Dans une vidéo publiée en mars, l'EI avait menacé l'Iran. Le groupe affirmait qu'il allait conquérir ce pays, «le rendre à la nation musulmane sunnite» et provoquer un bain de sang chez les chiites.
Si ces dernières années certaines régions proches des frontières avec l'Irak, l'Afghanistan et le Pakistan ont été ciblées par des groupes armés, les grands centres urbains avaient jusqu'alors été épargnés. C'est précisément près de ces frontières que vivent principalement les membres de la minorité sunnite d'Iran.
ATS