Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

vendredi 16 novembre 2018

La DGSI alerte sur un possible espionnage industriel américain visant Airbus


Les Etats-Unis font-ils de l'ingérence économique en espionnant les grandes entreprises françaises via des cabinets d'avocats américains ? La DGSI a notamment alerté l'exécutif sur le sujet de l'aéronautique : Boeing surveillerait Airbus.

Selon une note de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) datée du 12 avril, destinée à l'exécutif et à laquelle Le Figaro a récemment eu accès, Washington favoriserait ses entreprises nationales en récoltant des informations sur les entreprises françaises dans les domaines sensibles de l'aéronautique, de la santé et de la recherche.

Le procédé paraît presque trop simple : des cabinets d'avocats américains interviennent par exemple au sein du géant aéronautique Airbus dans le cadre d'audits de conformité en matière de lutte contre la corruption. Ainsi, des avocats disposent d'un accès privilégié aux données stratégiques du groupe depuis 2015.

Une aubaine pour la NSA qui redistribuerait ces données aux entreprises qu'elle aurait intérêt à voir prospérer... telles que Boeing, l'avionneur américain ? A tout le moins, les experts de la DGSI, alertent : «Les informations de toutes natures saisies auprès des cadres d'Airbus permettent de cartographier tous les intermédiaires et contacts du groupe, ainsi que ses axes de développement à l'international.» La note de six pages précise également : «Les acteurs américains déploient une stratégie de conquête des marchés à l'export qui se traduit, à l'égard de la France en particulier, par une politique offensive en faveur de leurs intérêts économiques. Les secteurs ciblés correspondent à des domaines d'avenir présentés de longue date comme stratégiques par les autorités américaines, dont l'aéronautique, la santé et plus généralement le monde de la recherche.»

Un préfet témoignant anonymement pour le quotidien a également rappelé qu'«il fut un temps pas si lointain où les services américains ont été lourdement suspectés d'avoir piégé les ordinateurs de Bercy». Et de déplorer : «Il s'agit bien de dépecer les fleurons tricolores.» Le préfet ajoute :«Les Américains coopèrent très fortement avec la France et les services alliés au niveau opérationnel contre le terrorisme islamique et l'espionnage chinois ou russe, mais 60 % de leur activité reste centrée sur la recherche de renseignements stratégiques. Tous les moyens sont bons pour faire vivre leur patriotisme économique.»

En conclusion, le document de la DGSI pointe la fragilité des «domaines d'excellence français» qui seraient «particulièrement exposés» : «Les PME ne se sont pas suffisamment armées et les grands groupes français semblent également vulnérables, privilégiant des stratégies de repli et d'évitement afin de ne pas s'exposer.»